C'est devenu une «tendance» que d'inscrire ses enfants dans des écoles privées spécialisées dans les cours de soutien scolaire. Un engouement particulier a été enregistré cette année, où des files d'élèves et de parents se forment aux portes de ces établissements, dés le premier jour de la rentrée scolaire. Une attitude qui en dit long sur le système éducatif national, et la qualité des enseignants qui y exercent. Un phénomène qui va crescendo, sans que le ministère de l'Education nationale soit alarmé de ses répercussions sur le rendement de l'école publique. Les parents sont eux, convaincus que ces cours d'appui sont à l'origine de la réussite scolaire. Ils n'hésitent pas à consacrer un budget conséquent afin d'éviter à leurs enfants l'échec scolaire, jusqu'à devenir un véritable phénomène social. Il faut dire également que plusieurs raisons sont à l'origine de cette nouvelle attitude, à savoir la surcharge des classes et le manque d'expérience des nouveaux enseignants, sans parler des conditions pédagogiques des établissements scolaires. Les parents dépensent au minimum, 2000Da /l'heure pour chaque matière. Imaginons un père de famille qui a deux enfants en classe d'examen et qui se voit obligé de payer des cours de soutien pour au minimum trois matières chacun… Ce qui frappe le plus, c'est que certains enseignants n'hésitent pas à proposer à leurs élèves de prendre des cours particuliers dans des écoles privées où ils exercent en extra. Par peur de représailles, ils se sentent obligés de s'inscrire. Du tourisme pédagogique Parents d'élèves et syndicats ont condamné le comportement de ce genre d'enseignants, qui «manquent de conscience professionnelle». Contacté, le secrétaire général du Conseil des Lycées Algériens, (CLA) Idir Achour, estime que les cours de soutien privés sont devenus un phénomène social très désolant. Selon lui, il existe une «volonté» politique pour encourager ce type d'activité. «On essaye de mette en parallèle de l'école publique, une autre école privée qui ne dit pas son nom, et sous forme de cours particuliers» dit-il. Les conditions pédagogiques des établissements scolaires publics «favorisent» ce phénomène. «En raison de leur mauvaise gestion, les parents orientent leurs enfants vers les cours particuliers». Notre interlocuteur estime même que les cours de soutien dispensés dans ces établissements privés, «n'ajoute rien à nos élèves, bien au contraire». «Ce n'est que du tourisme pédagogique» indique-t-il. Le CLA estime malheureux, «qu'un ensemble d'enseignants soit entrainé dans ce monde, où ils gagnent beaucoup d'argent, alors qu'ils abandonnent leurs activités pédagogiques réelles dans les établissements publics, pour se concentrer aux cours particuliers». Idir va plus loin en accusant certains enseignants de faire «du marchandage de notes avec leurs élèves, surtout pour les élèves 1AS, 2AS, afin de les obliger de prendre des cours de soutien chez eux». Le seul moyen de s'attaquer à ce problème, c'est, selon lui, revoir les conditions pédagogiques des établissements publics, tout en prenant en charge les revendications à caractère social des enseignants. «On ne peut pas s'attaquer au cours particulier par un discours moralisant, mais plutôt par des décisions concrètes», ajoute-t-il. «On doit mettre à l'abri nos élèves» Pour le président du SNAPEST, Meziane Meriane, il s'agit d'un phénomène «malheureux» qui se répand depuis quelques années. «L'enseignement de qualité que doit consacrer l'école publique, les parents croient pouvoir le trouver dans ces écoles privées de cours de soutien scolaire». Selon lui, l'environnement pédagogique n'est pas en adéquation avec les aspirations et les attentes des élèves et des parents. «Il s'agit d'un constat négatif sur l'école publique qui va mal» souligne-t-il. Au sujet des enseignants qui osent marchander les notes des élèves contre des cours particulier, Meriane interpelle le ministère de l'Education Nationale et lui demande d'enquêter sur ce genre d'agissements. «On doit mettre à l'abri nos élèves et notre école de ce genre d'enseignants qui n'ont pas de conscience professionnelle» préconise-t-il. Meriane souligne également, qu'il s'agit de cas particulier, mais qui reste condamnable. Le président du SNAPEST estime nécessaire de revaloriser les cours de soutien à l'intérieur des établissements scolaires, pour barrer la route à ces «marchands». Pour lui, l'éthique à laquelle on devrait se référer «c'est notre religion qui interdit la triche et le mensonge. L'école nationale souffre du mal de conscience et d'éducation». Ahmed Khaled, président de l'association des parents d'élèves qualifie, pour sa part, l'engouement des élèves pour les écoles privées et les cours de soutien scolaire, représente un phénomène «récalcitrant». Mais selon lui, l'empressement des parents à inscrire leurs enfants dans ces établissements demeure compréhensible. «Certains enseignants, par manque d'expérience, ou incompétence, ou bien même fainéantise, poussent les parents à chercher l'intérêt de leurs enfants» explique-t-il. Ahmed Khaled fustige notamment, les enseignants qui sacrifient leurs activités dans les classes au profit d'écoles privées où ils exercent. «Ces enseignants exagèrent trop. Ils veulent s'enrichir sur le dos des parents. Il s'agit de manœuvre satanique sans aucune conscience professionnelle» assène-t-il. Ahmed Khaled a même appelé le ministère du Commerce à sévir. «Ils activent sans registre de commerce, ni autorisation. Ils ne paient ni les impôts, ni rien d'autre, alors que les honoraires sont exorbitants. Ce qui représente également une perte pour le trésor public». Cependant, cet engouement pour les cours de soutien dans les écoles privées reflète la défaillance du système scolaire. C'est devenu un business à grande échelle.