A la fin de juin, une quarantaine de personnes fréquentant ou non les plages de la commune de Aïn Bénian ont été évacuées d'urgence et au même moment vers l'hôpital de Baïnem qui leur a prescrit des antibiotiques. Les personnes transférées ont regagné leur domicile le jour même. Deux semaines après l'incident, aucune information n'a été donnée pour expliquer ces évacuations. Ce qui est sûr, c'est qu'il y a eu un déversement en mer dont les odeurs ont été nuisibles. Sa nature et son origine demeurent un mystère pour les habitants. Les faits remontent à jeudi 25 et vendredi 26 juin dernier. La population de Aïn Bénian a vécu des moments de peur suite à l'évacuation simultanée et en urgence, dans l'après-midi de jeudi, d'une quarantaine de personnes du port d'El Djamila (Ex-La Madrague) vers l'hôpital de Baïnem de la ville. Après l'examen médical, les médecins ont prescrit du bactrim (un antibiotique) et toutes les personnes évacuées ont regagné leur domicile dans la même journée. C'est la première fois que la population vit une situation pareille. Une chose est sûre : l'origine du mal est venue de la mer. Mais que s'était-il réellement passé entre jeudi après-midi et vendredi matin ? Les habitants parlent d'un déversement douteux. Ils donnent ainsi leur version des faits. Le problème s'est posé beaucoup plus à la plage Fontaine qui se trouve à quelques pas d'El Djamila plage elle-même partiellement touchée. Les personnes évacuées à l'hôpital s'étaient senti mal à l'aise à cause de ce déversement douteux dégageant des odeurs nuisibles réparties par la force des vents. «Une grosse tâche était nettement visible sur la plage jeudi après-midi», raconte un jeune en pointant du doigt l'emplacement de cette mystérieuse flaque dans la plage Fontaine. Comme chaque jour, les riverains fréquentent les plages le plus normalement du monde ce jour-là. Fontaine et El Djamila sont en fait très sollicitées par les estivants, surtout les riverains. Or, parmi les personnes transférées en urgence vers l'hôpital de Baïnem se trouvent des enfants, des jeunes, des adultes et des personnes âgées qui se sont baigné dans ces plages au moment des faits ou qui étaient installées sur le rivage ou chez elles. Les symptômes, tels que décrits par les concernés, sont toujours les mêmes : écoulements nasaux et lacrymaux et des brûlures dures ressentis dans l'appareil respiratoire. Le cas le plus «grave» était celui d'un jeune sportif : il a eu des vomissements. Curieusement, vendredi après-midi, Fontaine et El Djamila plage sont redevenues fréquentables. Les habitants se jetaient à la mer comme si rien ne s'était passé la veille et la matinée. Le problème ne se posait donc plus.Les causes qui avaient provoqué le transfert d'une quarantaine de personnes vers l'hôpital sont donc connues. Reste à connaître la nature de ce déversement et son origine. Sur ces deux points, en l'absence de toute explication, les habitants de la Madrague spéculent. Plusieurs pistes sont évoquées : les uns pensent qu'il s'agirait de rejet chimique dégagé par des bateaux en rade et ce rejet a fini à Aïn Bénian a cause des vents (Echarki, comme l'appellent les marins). Suivant les dires de ce groupe de personnes, c'est le vent (El Gharbi) qui a aussi fait nettoyer les plages de ce déversement dans l'après midi du vendredi. D'autres personnes qui avaient assisté à l'incident privilégient une autre piste : ils pointent du doigt des rejets industriels toxiques d'autant plus qu'une usine de médicament est déjà en activité sur les hauteurs de Guyot-ville. Ces spéculations ont-elles un fondement ? Les «explications» de l'APPL La protection des plages de la capitale est confiée par la wilaya à l'établissement public APPL (Agence urbaine chargée de la protection et de la promotion du littoral algérois). Créée en avril 1998, l'agence a pour missions, entre autres, «de suivre et contrôler la qualité physico-chimique et bactériologique des eaux de baignade» et «de contribuer à la conception et à la mise en place, avec les organismes concernés, des plans d'urgence pour prévenir ou lutter contre les pollutions ordinaires ou accidentelles». En clair, ce qui s'est passé à Aïn Bénian a été suivi par les responsables de l'APPL qui en ont la charge. Dans une déclaration faite mardi au Temps d'Algérie, le directeur de l'APPL commence par dire qu'il a été alerté par l'ingénieur de l'agence posté à Aïn Bénian et que des prélèvements ont été effectués à des fins d'analyses physico-chimiques et bactériologiques. Selon lui, trois plages ont été touchées par ce déversement. Il confirme qu'une quarantaine de personnes ont été évacuées vers l'hôpital de Baïnem et que personne n'a été hospitalisé. Sur le fond du problème, à savoir ce fameux déversement dont parlent tant les habitants de La Madrague, le premier responsable de l'agence se contente d'exhiber les résultats des analyses physico-chimiques faites au laboratoire de la Seaal (société des eaux et d'assainissement d'Alger). Ainsi, les résultats étaient négatifs, autrement dit l'eau était propre et sans risque sur la santé des baigneurs. On comprend par là qu'il n'y avait aucun déversement de produit à composante chimique ou autre qui aurait pu mettre en danger la santé des estivants. Une question : pourquoi donc une quarantaine de personnes ont été évacuées en urgence vers l'hôpital ? «C'était juste des gamins qui s'agitaient», dit sans détour le directeur de l'APPL même si les citoyens atteints ne sont pas des gamins. Toutefois, il fait remarquer que la station de relevage des eaux usées de la résidence Club des Pins serait tombée en panne pour une durée de vingt-quatre heures. Il laisse donc entendre que ce sont les eaux usées de la résidence qui sont parvenues jusqu'à La Madrague, soit un parcours de plus de deux kilomètres par mer. Mais, comme le précise le directeur de l'APPL, les eaux usées ne constituent pas vraiment un danger nécessitant un transfert vers les urgences… Au niveau de l'APPL, on réagit comme si rien ne s'était passé à Aïn Bénian.