Cela reste à vérifier, mais il paraît qu'ils sont de moins en moins nombreux à débarquer au pays. Ils viennent prendre leur part de soleil et dans la foulée, souffler tel un vent de fraîcheur sur nos étés caniculaires. Les visages blanchâtres et la dégaine imprécise, nos «émigrés» sont reconnaissables. Râleurs parfois, ils répètent à l'envi qu'ils peuvent comprendre qu'ici, ce n'est pas là-bas, mais qu'il ne faut pas exagérer quand même… Un minimum dans la qualité de service, le respect du code de la route et un peu plus d'espaces de détente, ce n'est pas la lune pour des femmes et des hommes dont le choix du pays pour les vacances est essentiellement déterminé par l'appel du cœur. Tenez, à propos de conduite. Beaucoup, si ce n'est tout le monde, vous le diront avec la confortable certitude de ceux qui ne se trompent jamais : nos émigrés conduisent mal parce que «là- bas, ils n'ont pas de voiture et ceux qui en ont une ne l'utilisent que très rarement. Personne ne dira que s'ils sont si incommodants sur nos routes qui sont de véritables jungles où il n'y a de place qu'aux plus roublards, c'est précisément parce que nos compatriotes expatriés sont très à cheval sur les règles de… conduite. Si on les chambre gentiment, on se rattrape pourtant par plein de sollicitudes. Le commerçant fait un effort dans l'accueil et le service même si ce n'est pas toujours désintéressé, le taxi consent à la course impossible en lorgnant le pourboire, le voisin se montre disponible et quelques âmes mortellement patriotes suent à leur trouver des «preuves» que tout n'est pas si mal dans le pays. Et puis ces jeunes en quête de partance. Parents plus ou moins proches, vagues connaissances ou enfants de quartier et de village, ils sont toujours là à rôder autour de la «bonne affaire». Ah, épouser une émigrée ! Le tapis rouge garanti sur la route du paradis. Alors, on redouble d'ingéniosité. Charger la maman de travailler au corps des parents sensibles à la possibilité d'un parti du bled pour leur fille, on fait valoir ses propres qualité de séducteur ou plus rarement suggérer à demi-mot un stratagème pas très net. Pour les vacances, nos émigrés ne sont pas très exigeants, ils ne sont pas venus pour ça. Juste deux ou trois semaines de repos au bord de la mer sur les hauteurs des montagnes, à humer l'air du pays et à se fondre dans la foule de leurs racines, loin de la morosité des banlieues et de la course effrénée à la réussite. Avant de s'engouffrer dans l'avion ou le ferry du retour, ils jetteront un dernier regard sur ceux qui agitent le mouchoir de l'au-revoir. Les jeunes désillusionnés par le refus de leurs filles, des voisins qui ne savent pas pourquoi ils leur manquent déjà et des chauffards qui pensent que finalement, ils ne sont pas si dangereux sur les routes. L'année prochaine, ils reviendront. Moins nombreux ? Il faudra encore le vérifier. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir