Viol, inceste, pédophilie, harcèlement sexuel, prostitution infantile… Aussi surprenant qu'insupportable et inacceptable, c'est là le lot d'atrocités que subissent de jeunes enfants que l'on croyait à l'abri de ces graves déviations. Malgré les traditions et la religion, ces phénomènes abjects n'ont pas épargné notre société. «Tant que les traditions avaient leur impact sur la société, nous avons été épargné par ces malheurs. Aujourd'hui, la société algérienne évolue sans repères. Les nôtres ont été balayées d'un revers de la main et celles des autres ont été ‘'singées'' sans en maîtriser les conséquences», a expliqué Kenza Hadjaz, une psychologue en charge des enfants en danger moral. Tabous, violences sexuelles sont souvent placés sous le sceau du silence, ce qui accompagne d'opacité l'ampleur de leur étendue. Combien de victimes sous l'emprise de la honte taisent leur secret et n'osent franchir le pas de la dénonciation ? Combien d'affaires arrivent à la justice et combien s'achèvent de façon dramatique ? A la différence du viol, de l'inceste ou de la pédophilie, qu'il subit à son insu, en matière de prostitution, de victime la première fois, il devient acteur actif, même si les raisons qui l'on placé dans ce gouffre sont l'œuvre d'adultes. L'éclatement de la famille,source de tous les maux En premier lieu les parents qui, de plus en plus, brillent par leur démission. Démissionnaires à tous les niveaux. Absents lorsque leur progéniture quitte les bancs de l'école, qui les tient éloignés des dangers de la rue. Défaillants dans leur mission de la préservation de la cohésion de la cellule familiale. «La pauvreté est la première cause qui conduit à la pratique de la prostitution. L'inconscience amène certains parents à demander à leurs enfants de se débrouiller coûte que coûte pour ramener de l'argent. Une triste réalité entendue de la bouche d'enfants qui atterrissent en centre de rééducation, après des jours d'errance et de violences de tous genres. Et là où le bât blesse, c'est que ces pratiques s'étendent au-delà des régions rurales, pour toucher les grandes villes», s'insurge Kenza. Autant dire, jeter son enfant dans la gueule du loup. Dans bien des cas, ce gouffre prend pour nom prostitution. De l'avis de notre psychologue : «Quoi de plus complexe que de déterminer la frange d'adolescents que la prostitution va répugner et celle chez qui elle va développer une d'accoutumance à cette déviation. La prostitution, y compris celle des enfants des deux sexes, est malheureusement un phénomène réel chez nous.» Les raisons à cela, Kenza les explique par le fait qu'avant d'arriver lui-même à cette dépravation, l'enfant a vu cette chose se pratiquer dans son entourage, en marge d'autres vices, dont l'alcoolisme du père qui est l'une des premières raisons qui fait voler en éclats la cellule familiale. Développer la sauvegarde en milieu externe La rue, refuge de ces enfants en danger, en fera des proies faciles pour les prédateurs de tous bords, quand ils ne sont pas happés par des réseaux de prostitution.Socialement parlant, un enfant agressé au plan sexuel est un enfant complètement perturbé qui ne tardera pas à venir grossir les rangs des délinquants sexuels qui finissent derrière les murs des prisons. «Sa sexualité déformée, en sus d'absence de repères éducatifs sexuels, va en faire un pervers, voire un actif de sexualité perverse, qui va constituer une menace pour les autres garçons d'abord et la société en général. Ainsi d'enfant en danger, il devient dangereux. Son devenir est d'autant plus inquiétant, qu'en la matière, la prise en charge reste limitée. Le suivi social chez nous est très limité. La sauvegarde en milieu externe est quasiment absente. Le remettre dans son milieu naturel sans avoir effectué un travail sur la famille signifie le pousser à continuer dans son vice. Actuellement la seule alternative pour le juge des enfants reste son placement dans un centre qui accueille des enfants en danger moral.» Placement en famille d'accueil et application stricte des lois, préconise Kenza. «Pour que les crimes sexuels ne restent pas impunis. Les lois relatives à la protection des enfants existent, il faut maintenant réfléchir à la meilleure prise en charge de ces malades, car il s'agit bien de malades», dira Kenza. Mettre en en œuvre les moyens adéquats en termes de sanctions, de soins et de mesures éducatives, «car à l'âge de l'adolescence tout peut encore se jouer», conclura-t-elle.