Le marché de la voiture d'occasion est devenu une jungle où tous les coups sont permis, régi très largement par les lois de l'informel, et donc du plus fort. Dans les circonstances actuelles, des résistances très fortes en empêchent un minimum de formalisation. Une possibilité de le formaliser est d'en dresser un argus, serait-il tout juste indicatif, autrement dit d'indiquer le prix d'un véhicule d'occasion en fonction de certains critères. C'est ce qu'a tenté la revue spécialisée AutoInfo, en retenant trois paramètres : l'âge (année de fabrication), le kilométrage et l'état général du véhicule. La revue a dû rapidement mettre un terme à son ambition, en constatant que le prix du véhicule d'occasion n'obéit à aucune règle rationnelle. Sinon comment expliquer qu'une Maruti d'occasion qui se vendait à 240 000 DA en 2007, coûte 310 000 da en 2009 ? Ou encore, comment une voiture importée de France, par exemple, est plus chère une fois vendue en Algérie que dans son pays d'origine ? Et les anomalies du marché ne s'arrêtent pas qu'à ces deux cas.Pour bien faire comprendre la suite, il y a lieu de rappeler, au préalable, les lieux et les modalités des transactions autour du véhicule d'occasion : les grands marchés connus, comme celui d'El Harrach ou de Tidjelabine et, phénomène nouveau, des lieux connus des seuls initiés qui peuvent être situés dans n'importe quel endroit de la ville, mais généralement aux alentours des pompes à essence, parce que celles-ci disposent souvent de cafétérias pour la rencontre et la négociation et d'aires de stationnement. Les autorités publiques ont tenté de les interdire à maintes reprises sans réel résultat. Quant à la transaction d'individu à individu, elle peut avoir lieu n'importe où. Les connaisseurs du marché de la voiture d'occasion, comme les journalistes de la revue, ont fini par trouver les causes de la fluctuation, fréquemment à la hausse, des prix. La principale de ces causes est l'existence de groupes de revendeurs informels qui s'arrangent pour déterminer les prix et donc imposer leur loi. Pour ce faire, et selon les responsables de la revue, ils utilisent deux techniques : ainsi, ils repèrent les voitures appartenant à des femmes ou à des catégories socioprofessionnelles prestigieuses, comme celle des médecins. Ces catégories sont censées bien entretenir leurs voitures et ne pas rouler énormément et, par conséquent, le revendeur en tire un profit élevé, ce qui signifie forcer le marché à la hausse. La deuxième technique utilisée par ces revendeurs consiste à bloquer la vente en versant des arrhes dérisoires à des vendeurs individuels de façon à vendre leur propre produit à des prix nettement exagérés. Enfin, ces revendeurs s'arrangent pour que leur nom n'apparaisse jamais dans la transaction, usant de beaucoup de subterfuges pour faire les papiers directement entre l'ancien propriétaire et le nouveau. Il s'agit là de procédés, certes déloyaux, mais qui laissent le produit en bon état. Il y a d'autres comportements de revendeur qui s'apparentent, voire qui sont carrément des délits, en se livrant à des tas de trafics et de maquillage de l'état réel du véhicule. Mais cela est une autre histoire et, bien souvent, ces vendeurs ou revendeurs indélicats finissent en prison…