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Le marchand, la démocratie et le reste
L'AUTRE REGARD
Publié dans L'Expression le 08 - 02 - 2007

Le jeu des lobbies financiers investit les espaces électoraux et restreint le champ démocratique.
Aujourd'hui, le désenchantement et la désillusion, deux espaces-clés de la réalité sociale, marquent le quotidien. L'extraordinaire montée du capital et du marché interpelle les consciences et pose sérieusement la question de la légitimité des gouvernants, pas seulement chez nous mais même dans les pays démocratiques qui reculent dangereusement devant la poussée des puissances de l'argent. Ainsi, le discours redondant sur la sacro-sainte économie de marché dissimule mal l'émergence d'une idéologie nouvelle, dépouillant l'électeur de toute possibilité d'intervention dans les affaires de la cité. Les élections considérées comme partie importante de l'entreprise démocratique deviennent un véritable leurre, un simulacre que, d'ailleurs, ont vite compris les éventuels clients de l'urne, censée représentative de l'opinion générale, commençant à déserter massivement le territoire électoral. Le dernier référendum en France a connu un taux d'abstention record de 70%. Ce qui est énorme, mettant en avant la grave crise qui touche le territoire démocratique, aujourd'hui menacé d'inanition.
Les progrès techniques et scientifiques (domination de l'informatique, du nucléaire et des réseaux génétiques) suggèrent l'apparition de nouveaux problèmes et de nouvelles configurations sociopolitiques interpellant directement la notion de démocratie mise à mal par la colonisation des sociétés par le marché et les grands pôles économiques et technologiques comme la Nasa, Cogéma, Elf, qui constituent des Etats dans l'Etat et qui neutralisent toute possibilité de gestion démocratique. Sans oublier, bien entendu, ces «autoroutes de l'information» qui, paradoxalement, transforment tout simplement le citoyen en sujet. La citoyenneté, lieu fondamental de la démocratie athénienne, laisse place au triomphe du marché qui marginalise la parole plurielle et institue une sorte de pensée unique qui, d'ailleurs, caractérise les relations internes dans les sociétés et les rapports internationaux.
Logique économique
Le mandarin ou l'homme politique recule devant la domination du marchand qui «vendait» depuis des années son discours idéologique, au nom d'une mythique fin des idéologies et de l'histoire, prétexte à la mise sous le boisseau de toute parole différente. La parole unique devient le substitut de voix plurielles enterrées par ce marché rimant avec mondialisation. Dans un de ses ouvrages, le sociologue Francis Balle constatait ceci: «Les mandarins ont été dépossédés. Les médias ont largement précipité ce processus de dépossession; le rapport de force s'est inversé entre mandarins et marchands au bénéfice des seconds qui semblent à présent régner sans partage. Désormais, assujettis, les mandarins ont dû s'incliner.» Ces propos indiquent tout simplement que le temps démocratique est en train de s'étioler pour être remplacé par l'espace marchand, marqué par de profondes inégalités et une culture unique qui réveille subrepticement les particularismes culturels et identitaires fonctionnant comme des aires factices de protection.
Cet état de fait favorise l'exclusion, la disparition de nombreux droits sociaux (logement, emploi, santé...), la négation de valeurs symboliques sur lesquelles reposaient l'élan démocratique et le dépérissement progressif de l'Etat-Nation. Dans ce contexte peu reluisant, il n'y a plus de place pour la citoyenneté. Henri Lefebvre a raison de dire que «le citoyen a fait place à l'usager». C'est en termes de clients éventuels que les «citoyens» sont catégorisés. Ainsi, les relations intérieures comme les rapports internationaux sont régis par une logique commerciale et économique. Quand les intérêts économiques sont en jeu, la démocratie est mise en veilleuse. Quand il s'agit d'affaires en jeu, il est pardonnable de faire abstraction de la question démocratique qui n'apparaît que pour servir de paravent à des entreprises de discrédit de pays peu ouverts aux desiderata des grandes entreprises multinationales qui gouvernent le monde. Eltsine agressait de manière caractérisée le Parlement un certain mois d'octobre 1993, l'Occident s'était tout simplement tu parce qu'il y avait des affaires commerciales à contracter avec l'homme fort de Moscou. Le commerce régit les relations internationales et dissimule, quand il le faut, les dérapages sur le plan des droits de l'homme et de la démocratie.
La démocratie est sacrifiée sur l'autel du sacro-saint marché qui menace l'Etat démocratique et lui retire certaines de ses prérogatives, tout en restreignant son champ de souveraineté et en l'assujettissant à la logique des puissances financières. L'électeur perd ainsi sa voix et sa légitimité et se retrouve dépourvu de toute possibilité de parole libre. Ce n'est pas sans raison que le grand journal économique, Wall Street Journal, qu'on ne peut soupçonner de mollesse libérale, dresse ce sévère constat: «Bien que non élus, anonymes et souvent non américains, les gros investisseurs détiennent désormais un pouvoir sans précédent-peut-être même un droit de veto- sur la politique économique des Etats-Unis.». Cette affirmation du Wall Street Journal est révélatrice des nouveaux enjeux qui marquent les sociétés humaines ces dernières années, avec l'émergence de nouvelles technologies et de nouveaux médias, souvent au service des grands groupes économiques. Le piège se referme ainsi sur le mythe démocratique trop marqué par des rides anticipées et les nombreuses ambiguïtés caractérisant son territoire dual. Les rêves originels subissent de profondes blessures que le «temps disciplinaire», pour reprendre la belle formule de Michel Foucault, n'arrive pas encore à panser.
Toute illusion est porteuse de vide. C'est vrai que l'argent finit par acheter les grands groupes de presse, malgré la résistance de certains Etats pendant une relative longue durée, qui avaient, à l'époque, la possibilité de mettre en oeuvre des lois empêchant tout regroupement d'organes de presse. Mais c'est désormais peine perdue. Même les médias entrent en guerre contre des Etats-Nation, très fragilisés qui laissent désormais le soin au marché de diriger les affaires. Ainsi, après une minutieuse préparation idéologique d'une entreprise de marginalisation de l'espace étatique, le marché impose sa loi et constitue le lieu privilégié où se prennent les grandes décisions. Il y a eu donc un déplacement masqué de légitimité et une sorte de coup d'Etat contre l'Etat légal et légitime affaibli et dénigré, incapable de prendre en charge ses fonctions traditionnelles.
Se pose aujourd'hui une question fondamentale: la souveraineté est-elle encore l'apanage des représentants élus du peuple et du gouvernement qui, en principe, met en pratique sa politique? L'interrogation est quelque peu grave. Les réponses semblent rapides. Les «citoyens» doutent sérieusement de l'indépendance de leurs «élus» qui voient, impuissants, leur pouvoir squatté par les grands patrons ne cessant de grignoter du terrain. Les dernières élections dans certains pays européens indiquent un important taux d'abstention, ce qui montre le désenchantement et la déception des électeurs prenant désespérément conscience de cette dangereuse montée de l'argent qui se substitue à la voix des urnes, contribuant grandement à l'affaissement des partis politiques et à la culpabilisation perpétuelle des hommes politiques accusés de toutes les tares. Le discrédit caractérisant le personnel politique s'accompagne également d'un rejet de la presse, souvent accusée de rapporter des informations peu crédibles, selon des sondages effectués dans de nombreux pays européens.
Cette réaction de défense passive des populations qui ne veulent plus participer à des kermesses électorales dont on connaît à l'avance le vainqueur où l'argent joue un rôle fondamental dans la recherche des voix, est symptomatique du malaise et de la crise qui secouent la démocratie. Le jeu des lobbies financiers investit les espaces électoraux et restreint le champ démocratique, aujourd'hui favorable à l'extrême droite et aux forces xénophobes. Ces données poussent les gens du peuple à perdre confiance et à s'abstenir d'apporter une voix qui leur semble inutile. Ce type de manifestations de refus est l'expression d'un désenchantement et d'une désillusion engendrés par la corruption des moeurs politiques et la dictature du marché qui ôte toute souveraineté au «citoyen». Alexis de Tocqueville ne disait-il pas que la misère morale et politique rendait le gouvernant illégitime.
Aujourd'hui, si l'exclusion et le non-droit constituent les éléments-clés de cette nouvelle démarche, puisant sa source dans la puissance du marché dans les rapports intérieurs régissant les individus dans les Etats démocratiques, ils sont également les lieux nodaux régissant les relations internationales. Avec l'effondrement de l'ex-Union Soviétique, le monde est devenu unipolaire. Ce qui favorise la domination du marché. Il n'est plus possible de parler de développement sans évoquer l'économisme et l'hypertrophie de l'Etat. Ainsi, les pays sous-développés et ceux de l'Est et de l'Amérique latine sont obligés de suivre les instructions du FMI et de l'OMC s'ils ne veulent pas sombrer dans de successives crises souvent provoquées.
L'exclusion et le non-droit caractérisent donc également les relations internationales trop soumises au diktat des grandes puissances, elles-mêmes otages des oligarchies économiques et financières. Les manifestations à Seattle d'organisations et d'intellectuels contre la mondialisation constituent une réaction de défense contre un processus qui va encore creuser davantage le fossé des inégalités et consolider le non-droit. Aujourd'hui, on se met un peu partout en Europe à parler de «démocratie participative» (c'est le cas notamment de la «socialiste» Ségolène Royal) qui se substituerait à la démocratie «par délégation» devenue impuissante et peu opératoire. Cette manière de faire viserait à redonner au peuple la possibilité d'édicter les lois, chose qu'il a perdue sous les pressions continues du capital.
La démocratie et nous
Mais sommes-nous concernés par cette situation malaisée caractérisant l'espace démocratique? La réponse est simple. Les pays sous-développés, y compris tous les pays arabes, sont encore en retard par rapport à ce type d'interrogations. Certes, des expériences ont été menées ici et là, mais restent encore trop marquées par des dysfonctionnements extraordinaires qui empêchent toute véritable action démocratique. Déjà, la cellule familiale est dominée par des liens d'autorité interdisant toute parole différente. Ce qui ne peut qu'influer sur toute tentative de gestion démocratique. En Algérie comme dans d'autres pays africains, la nouvelle situation a permis la naissance de très nombreux partis qui ont tous fonctionné comme des «partis uniques» ou des «structures tribales».
Les contingences historiques, sociologiques et culturelles nous incitent à nous interroger sur les «lois» régissant la démocratie qui, selon les uns, serait universelle ou correspondant à des spécificités nationales, selon les autres. Le problème n'est pas encore réglé, d'autant qu'à notre connaissance, aucun travail sérieux n'a été fait sur cette question. Faut-il adapter les règles démocratiques aux réalités nationales ou les plaquer telles quelles dans nos sociétés peu préparées à ce type d'opérations et ne possédant pas les mêmes conditions historiques et culturelles? Ambitieux programme.


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