Mohammed Boukhalfa a eu le malheur d'avoir un CCP aux mêmes coordonnées qu'un autre collègue qui a déposé plainte pour escroquerie. Et au milieu de ces flots deux femmes était malheureuses, Madame Boukhalfa et Maître Aïd, l'avocate. Un détenu, une victime et trois témoins comparaissent devant Bahia Allallou, la juge de Hussein Dey, qui va jouer d'emblée la décontraction : «Alors, vous êtes deux policiers qui courent derrière leurs droits. Le premier pour récupérer son argent et le second, la liberté», dit la présidente, peu emballée par ce dossier «bizarre». Maître Nassima Aïd, venue de Chéraga, décidée à ce que toute la vérité éclate en ce mercredi de juin 2009. Elle écoute la magistrate lire les quatre retraits effectués le 11 novembre 2001 depuis le CCP. «A y voir de près, vos retraits sont en dessus de votre paie !», constate Allallou qui est visiblement pressée d'entendre les trois témoins dont une jeune fille, qui prête serment à la demande de la présidente. «C'est si loin, madame la présidente, que je ne me souviens plus», dit-elle en précisant toutefois qu'elle se rappelle seulement que l'inculpé lui avait demandé le nouvel avoir. «Nous, au guichet, ce qui nous importe c'est que le client exhibe sa carte nationale d'identité ou son permis de conduire et il est servi. D'ailleurs, plus de 90% des usagers sont connus dans nos guichets et donc, une fois le nouvel avoir lu, nous faisons notre boulot», a-t-elle dit sans aucune gêne et devant une avocate ravie. Maître Aïd va faire un boucan autour des patronymes : les deux s'appellent : Ahmed Boukhalfa, voilà où se situe l'os : «Il n'y a aucune escroquerie ni usurpation de patronyme !», a lancé l'avocate qui s'est dit outrée que ce policier soit détenu pour une faute qu'il n'a jamais commise. Il est vrai qu'il y avait aussi cette bonne question de la présidente à propos des sommes retirées. Elle avait fait remarquer au détenu qu'au vu de sa paie, les retraits étaient «gros, gras et massifs». Ici, le policier avait préféré ne faire aucun commentaire au grand ravissement de Maître Aïd, décidée ce mercredi à arracher la liberté de son client et lui redonner un moral autre que celui d'un flic aux arrêts de «rigueur» pour faute professionnelle. «Ce qui m'agace, c'est que le parquet bosse comme un robot. Personne ne réfléchit à l'homonymie, à l'erreur, à la faute involontaire. Le mandat de dépôt qui était selon la loi et qu'il est d'ailleurs toujours, est devenu la règle», avait dit la défenseure qui s'est vraiment défoncée pour tout entreprendre et arriver au verdict visé d'entrée de jeu. Tabi, cette mère de famille aisée et à l'aise, a donné cette nette impression d'avoir tout compris et qu'elle en avait marre d'avoir en face d'elle une avocate venue de la lointaine Chéraga (circulation oblige) bomber le torse pour une cause somme toute, bête, car, au fond, pourquoi ce policer qui touche des «miettes» n'a-t-il pas tourné sa cupidité dix fois dans ses méninges avant de retirer les sommes qui ne lui ont jamais appartenu ? Et le verdict (une année de prison assortie du sursis) aura été très juste !