La promesse faite par les membres du gouvernement concernant l'organisation de rencontres pour discuter avec les opérateurs économiques nationaux sur la mise en application des dispositions de la loi de finances complémentaire ne s'est toujours pas concrétisée. Les présidents des fédérations patronales ont affirmé n'avoir reçu, à ce jour, aucune invitation pour se mettre à table avec les ministres. La seule rencontre prévue cette semaine devra les regrouper avec le secrétaire général de la centrale syndicale pour débattre de la situation. Les producteurs en colère Un débat houleux a eu lieu entre les différents chefs d'entreprises affiliés à la Cipa à l'occasion d'une assemblée générale extraordinaire tenue avant-hier. Les producteurs nationaux de divers secteurs ont manifesté leur inquiétude de voir disparaître les entreprises qu'ils gèrent depuis plusieurs années. «Nous avons créé des entreprises et attendu longtemps que des mesures soient prises en faveur de l'investissement national à travers des facilitations à l'égard de l'entreprise algérienne et voilà que nous sommes surpris à l'annonce de ces mesures qui ne font que nous dissuader», ont-ils indiqué lors de cette réunion. Outre la révolte contre ces mesures jugées «injustes», les producteurs nationaux ont évoqué, une énième fois, leur marginalisation par rapport à la prise de décisions importantes. Les opérateurs ont été jusqu'à faire des reproches à leur fédération quant aux choix faits et aussi à la signature du pacte économique et social qui n'a pas été respecté comme cela a été prévu. «A quoi sert un pacte si on est à chaque fois mis devant le fait accompli», se sont-ils interrogés. «Nous nous dirigeons vers la fermeture des usines. Ce sera plus intéressant de les louer aux étrangers qui continuent de bénéficier de mesures encourageantes que de produire et d'avoir des bâtons dans les roues à chaque tournant», diront les opérateurs. Ils craignent sérieusement les conséquences de cette décision qui mettra en péril leurs investissements. La perte des emplois est fortement envisagée dans les scénarios des chefs d'entreprises qui ne voient pas de solutions immédiates à ces problèmes inattendus. L'autre point qui a soulevé la colère des opérateurs concerne la confusion totale, faite par les pouvoirs publics, entre opérateur économique et importateur. «Nous sommes des producteurs et non des importateurs. Nous voulons que les mesures prises dans cette LFC soient annulées au bénéfice des transformateurs de la matière première», ont-ils dit. Les opérateurs ont été très virulents, estimant qu'il n'y a plus moyen de reculer sur les dispositions de la loi de finances complémentaire qu'avec des mesures décidées dans le cadre d'une loi de finances 2010. «D'ici là nous ne serons plus en activité», ont-ils précisé. Les propos rassurants tenus par les responsables de la fédération en vue de calmer les esprits des opérateurs n'ont pas été suffisants. «Comment se fait-il que le ministre des Finances nous demande de produire d'avantage. Nous présentons des bilans mensuels sur notre activité et sur les résultats réalisés. De telles déclarations renseignent sur le mépris exprimé à l'égard des opérateurs», ont-ils précisé. Des explications tardives et non rassurantes Dans une lettre adressée hier à notre rédaction, la Cipa a estimé que les éclaircissements donnés par Karim Djoudi, ministre des Finances, à travers la presse n'ont pas été suffisantes. «Le ministre, dans les éclaircissements tardives sur la LFC, n'a à aucun moment abordé le volet de l'importation de la matière première, donc il n'a pas réconforté les producteurs et transformateurs nationaux», a précisé cette fédération dans son communiqué rendu public hier. Le rejet des opérateurs de ces nouvelles dispositions est imputé, selon la même organisation, à la déconsidération des producteurs nationaux. «Les opérateurs dénoncent le fait qu'ils soient mis dans le même sac que celui des importateurs de produits de bazar alors qu'ils continuent de soutenir les décisions des pouvoirs publics dans leur lutte contre le marché informel, nuisible à l'épanouissement et au développement de l'outil de production et favorisant la création du chômage.» Les opérateurs s'estiment lésés et citent les principales raisons ayant été à l'origine de ce sentiment. «Il y a eu plusieurs facteurs dont la dévaluation de la monnaie locale en 1990, la décennie noire, les promesses faites à l'occasion des assises de la PME-PMI et de la stratégie industrielle. Aucun geste n'a été fait en vu de remédier à toutes ces défaillances», estime la Cipa. La confédération des industriels algériens met en garde contre la faillite de l'outil de production, et sollicite les pouvoirs publics afin d'instaurer un dialogue franc avec tous les partenaires en vue «de définir contradictoirement la politique économique du pays».