«A El Kantara, où je m'attarderai deux jours, le printemps naissait sous les palmes, les abricotiers étaient en fleurs bourdonnant d'abeilles, les eaux abreuvaient les champs d'orge, et rien ne se pouvait imaginer de plus clair que ces floraisons blanches abritées par les hauts palmiers, dans leur ombre abritant, ombrageant à leur tour les céréales. Nous passâmes dans cet éden deux jours paradisiaques, dont le souvenir n'a rien que de souriant et de pur.» André Gide (1897). Ce passage descriptif témoigne à plus d'un titre que la région de Biskra, carrefour des civilisations, regorge par excellence de sites paradisiaques qui continuent depuis des millénaires à charmer autochtones et visiteurs. Parmi ces sites, la petite localité pittoresque d'El Kantara, située dans le sud-ouest des Aurès, à une cinquantaine de kilomètres au nord de Biskra et de la même distance au sud de Batna, entourée au nord par Mâafa, Aïn Touta, Telatou et Segana, au sud par Fontaine des Gazelles, à l'est par Aïn Zaâtout et à l'ouest par Bitam, abritant quelque 12 000 âmes, et qui s'étend sur une superficie estimée à 238,98 km2. Dotée d'un climat chaud et sec en été et très froid en hiver, cette localité carrefour des civilisations berbère, romaine et arabo-musulmane fut baptisée El Kantara (le pont) en raison de la situation géostratégique dont elle est dotée, elle constitue un trait d'union entre le nord et le sud du pays. Du temps des Romains qui y ont longuement séjourné, elle s'appelait Calceux Herculis, l'histoire dit qu'elle doit ce nom à son fondateur, Hercule. Touristiquement, elle recèle plusieurs atouts. Les majestueuses dunes de sables, les gorges, les palmeraies et le village rouge, entre autres. D'après l'histoire, les Romains furent les premiers à ouvrir un passage entre les montagnes en construisant le légendaire pont, lequel facilite jusqu'à présent le déplacement des marchandises surtout. Ce pont sera un peu plus tard remanié par les Français sous le règne de Napoléon III. Historiquement, les Berbères furent les premiers à habiter la région. Ce qui confirme en partie la thèse, ce sont les nombreuses appellations berbères, dont Oued Aghroum qui veut dire «la rivière de la galette». Faut-il souligner que la rivière était seule source de vie faisant vivre la totalité des autochtones, d'où l'association de «la galette» à «la rivière». A l'époque des conquêtes islamiques commandées par Tarek Ibn Ziyad, les premières tribus arabes s'y sont aussi installées côte à côte avec les aborigènes. El Kantara ensorcelle le visiteur et ne le laisse point insensible à ses multiples charmes, elle le fascine à tel point qu'il ne peut la quitter qu'avec un profond regret. Les fervents amateurs de la beauté sublime de la nature y découvrent de majestueuses montagnes, d'éblouissantes gorges et de prodigieuses falaises, un magnifique tapis vert, ou encore la somptuosité de la rivière qui coule en bas des gorges. Gaston de Vulpillières y a construit le musée Lapidaire, lequel témoigne des événements marquants que la région a connus à travers les âges, essentiellement l'époque de la présence romaine. A El Kantara, moult passagers empruntant la RN3 prennent des photos souvenir sur le pont romain où le visage et le nom de Napoléon III sont gravés en relief, tandis que d'autres préfèrent se promener dans les vieux quartiers dont les bâtisses sont construites en torchis, à l'exemple de Dachra Elhamra.