Près de 3 patients schizophrènes sur 4 «entendent des voix». Souvent stigmatisé, ce symptôme était jusqu'à présent mal expliqué et difficilement traité. Or des chercheurs de l'Inserm et 2 équipes de psychiatres parisiens ont découvert une anomalie anatomique cérébrale qui pourrait expliquer la survenue de ces hallucinations auditives. La schizophrénie touche environ 1% de la population mondiale, selon l'Organisation mondiale de la santé. Parmi les symptômes qui intriguent, choquent ou déconcertent, les hallucinations auditives : 70% en souffrent ! Le patient a soit l'impression que des voix intérieures lui parlent, soit que des voix extérieures s'adressent à lui. Mais ces voix sont-elles de pures hallucinations, un «délire» ou correspondent-elles à une anomalie physiologique constituée ? Afin d'en savoir plus, des chercheurs CEA-Inserm de l'Institut d'imagerie biomédicale, en collaboration avec des services de psychiatrie de 3 CHU parisiens (Créteil, Cochin et Saint-Anne) ont comparé l'imagerie cérébrale (obtenue en faisant une IRM) de 12 patients ayant exclusivement des hallucinations auditives perçues comme extérieures, 15 patients entendant des voix à l'intérieur de leur tête, et 20 personnes sans schizophrénie. En examinant les images 3D des différentes zones cérébrales de ces sujets, les chercheurs ont constaté qu'il existe une «différence dans la région impliquée dans localisation spatiale du son» (zone du cerveau au niveau de la tempe droite). Chez les personnes qui entendent des voix venant de l'extérieur, une partie de la zone concernée par l'audition, située à la jonction de deux sillons est déplacée vers l'avant du cerveau. Pour les patients ayant des hallucinations auditives venant de l'intérieur de leur tête, cette jonction est déplacée vers l'arrière du cerveau. Il y a donc chez ces patients une déviation anatomique qui aurait pu se constituer pendant la maturation du cerveau (troisième trimestre de grossesse), lorsque ces sillons cérébraux apparaissent. Bien sûr ces résultats, qui suggèrent une origine anatomique à ce phénomène de «voix», devront être confirmés, mais constituent d'ores et déjà, comme le soulignent les auteurs «un argument de plus pour cesser de stigmatiser les patients atteints de cette maladie encore mal connue».