Trente-deux ans après les faits, le cinéaste franco-polonais Roman Polanski est rattrapé par son passé judiciaire aux Etats-Unis. Contrairement à son «pianiste» au temps du nazisme, il n'échappera pas à la police des frontières helvète. Celle-ci, qui attend toujours d'accueillir en héros les Suisses toujours retenus en Libye, s'est consolée de cueillir Polanski au pied de la passerelle. Une arrestation qui n'a pas tenu en émoi que les participants au Festival du film de Zurich où il était attendu pour le couronnement de l'ensemble de sa carrière. Malgré le deuil et les drapeaux en berne, la série noire se poursuit en Afghanistan, la France a tenu à montrer sa contrariété dans l'affaire Polanski. Surtout que le réalisateur de la Neuvième porte risque d'en traverser un tas d'autres, la Suisse attend une demande d'extradition de la part de la justice américaine. «Sinistre», selon Bernard Kouchner qui a joint sa voix à celle de son collègue de la Culture et qui d'après lui Nicolas Sarkozy suit attentivement l'affaire. Y aura-t-il une explication à cette «cueillette» à laquelle personne ne s'y attendait d'autant que ce n'est pas la première fois que le cinéaste se rend en Suisse ? D'après la ministre helvète de la justice, l'arrestation de Roman Polanski est un devoir depuis 2005, date à laquelle les Etats-Unis ont demandé à Berne de le «coffrer» s'il venait à s'aventurer du côté de ce paradis fiscal où pas moins de 3000 évadés fiscaux français ont mis leurs argents au chaud. Il ne s'agit que de «petits fortunés». Pourtant, les Suisses semblent vouloir éviter à tout prix que le «coffrage» de Polanski soit lié à une éventuelle tentative de leur part d'appâter les Etats-Unis sur la question du retrait du pays de la croix blanche de la liste des paradis fiscaux. Si la Confédération décide d'extrader le réalisateur du Bal des vampires, cela ne se fera qu'en rapport avec un strict accord judiciaire américano-suisse. Et absolument rien d'autre, la Suisse n'aurait pas besoin d'être dans les petits souliers de Barack Obama, le nouveau gendarme de la finance mondiale qui prend le temps d'écouter les conseils de Nicolas Sarkozy avant d'acquiescer. Les intentions de réformer, retenues au dernier sommet du G20 à Pittsburg ? La Suisse n'a pas attendu ces engagements internationaux, couchés sur du beau papier, pour engager «ses» propres réformes. Son retrait de la liste des paradis fiscaux, du moins sa facilitation, elle l'obtiendra autrement que par l'éventuelle extradition de Roman Polanski. La justice américaine l'attend-t-elle vraiment de pied ferme alors qu'elle ne sait même plus quoi faire d'une soixantaine de détenus de Guantanamo qui ne sont ni libérales ni condamnables ? Moins encore extradables, les pays d'accueil se sont de plus en plus rares ? Le réveil du racisme aux Etats-Unis risquant de déboucher sur une multitude des procès que cette même justice ne saura plus même où donner de la tête. Pour le moment, le racisme ne concernerait que le Président Obama à qui l'on ne reproche plus sa réforme de la santé mais sa couleur de peau. Son " bronzage " comme aime bien le répéter Silvio Berlusconi. De retour de Pittsburg et à l'occasion de la fête de son parti à Milan, le président du Conseil italien a fait marrer son auditoire en évoquant le bronzage du couple présidentiel américain. Une blague de très mauvais goût qui fait peser le doute sur la sincérité de ses propos. Ce, avant de revenir à son discours sur ce qu'il a retenu à la fin du sommet du G20 et les actions de son gouvernement en la matière, notamment à l'étranger. A l'image de l'Amérique d'Obama et de la France de Sarkozy, demandera-t-il à la Suisse voisine de lui fournir une liste détaillée des évadés fiscaux italiens ? Sur les deux flancs des Alpes, le " pianiste " et le " bronzé " n'ont plus du tout envie de dévaler les pistes de ski.