Tout porte à croire que l'on se dirige vers la prise de décisions à même de sauver ce qui reste du site de l'oued Sébaou, ce véritable écosystème, de plus en plus menacé par une extraction effrénée et incontrôlée de sable et autres agrégats. Depuis plusieurs décennies, c'est l'oued Sébaou qui pourvoit la Kabylie et d'autres régions du pays en sable destinée à la construction. Il a toujours été soumis à une grande pression à telle enseigne qu'une véritable menace pèse sur le site. Toutes les mesures, notamment la réglementation de l'extraction, l'obligation faite aux extracteurs de se soumettre au cahier de charges qui souvent contient des mesures de protection…, n'ont rien apporté. Mais cette fois, le problème semble être pris au sérieux et surtout en haut lieu. C'est du moins ce qu'a laissé entendre le ministre des Ressources en eau en visite de travail et d'inspection dans la wilaya de Tizi Ouzou lundi. Abdelmalek Sellal a fait savoir lors de cette visite que désormais l'extraction sera limitée et contrôlée comme elle sera soumise à une autorisation qui sera établie par le ministère et non pas par le wali comme c'était le cas depuis toujours. Il ajoutera aussi que cette limitation n'est qu'un prélude pour aller vers une interdiction totale d'extraction de sable. Ces mesures annoncées, si elles venaient à être appliquées à la lettre, seraient salvatrices pour ce site qui se meurt. La menace pèse toujours Toute la vallée du Sebaou est plus que jamais menacée par de nombreux facteurs. Que cela soit l'extraction de sable et de tout venant ou les rejets de toutes sortes de déchets déversés directement dans l'oued, le processus destructeur ne s'arrête pas. La folie destructrice des hommes sous le regard des autorités viendra, nécessairement à bout de ce site écologique que même les oiseaux ont fui. Aujourd'hui, tout le monde, plus particulièrement les personnes soucieuses de l'environnement, s'accorde à dire qu'il faut agir vite avant qu'il ne soit trop tard. En effet, toute perte de temps supplémentaire serait synonyme d'une mort certaine de cet écosystème. Le long processus de destruction du site a débuté dès l'indépendance du pays avec l'industrialisation. Les deux principales entités industrielles de la wilaya de Tizi Ouzou, à savoir l'usine textile Cotitex de Draâ Ben Khedda, naguère fleuron de l'industrie nationale et réduite presque à néant ces dernières années, et l'Eniem de Oued Aïssi, toutes deux érigées non loin de la berge du Sébaou, ont d'abord dévoré des dizaines d'hectares de terres agricoles et pire encore déversé leurs rejets industriels dans le lit de l'oued. Au fil des années, d'autres phénomènes sont venus s'y greffer : décharges sauvages, eaux usées… bien sûr l'extraction effrénée de sable. Des sablières sont implantées tout au long du Sébaou. Elles procèdent sans discernement à toutes sortes d'agressions du site. Une noria de camions gros tonnage, d'engins comme les cases et les pelles baladeuses y ont élu domicile. L'oued Sebaou qui sert à étancher la soif de dizaines de villes et villages de Kabylie voit sa nappe phréatique de plus en plus menacée. Les mesures annoncées par le ministre, même si elles risquent de faire de nombreux mécontents parmi ceux qui ont pour emploi de «traire» sans répit cet oued, sont considérées comme une décision salutaire. Au Sébaou, en effet, et depuis la réalisation du barrage de Taksebt, le sable se raréfie. Tous les agrégats que charrient les oueds qui prennent naissance au Djurdujra se trouvent de fait bloqués au niveau du barrage.