En dépit du caractère progressiste de quelques-unes de ses lois, le gouvernement marocain se montre peu favorable à leur application. En témoigne le refus systématique par l'administration d'agréer les associations dont les objectifs dérangent les certitudes de la monarchie. Le Maroc devrait mettre fin aux «manœuvres bureaucratiques généralisées qui minent la liberté d'association» et «exiger des fonctionnaires locaux qu'ils remplissent les obligations que leur impose la loi marocaine», estime Human Rights Watch (HRW). Dans un rapport publié hier, l'ONG américaine de défense des droits de l'homme affirme que «les représentants locaux du ministère de l'Intérieur refusent souvent la déclaration d'enregistrement d'une association lorsque ses objectifs ou ses membres déplaisent aux autorités». Pourtant, souligne HRW, la loi marocaine stipule que les nouvelles associations doivent simplement déclarer leur existence aux autorités locales, sans avoir besoin d'obtenir une autorisation préalable. «La loi oblige les fonctionnaires à accepter les déclarations déposées par les associations», insiste l'ONG. «Il en va de la liberté d'association comme de beaucoup d'autres questions liées aux droits humains. Le Maroc adopte des lois progressistes mais ensuite l'administration fait ce qui lui plaît», observe Sarah Leah Whitson, directrice de la division Moyen-Orient/Afrique du Nord de l'ONG, citée dans ce rapport. HRW passe en revue une dizaine de cas d'associations qui se sont vu refuser le «récépissé» officiel attestant de leur enregistrement. Faute de ce document, elles ne peuvent exercer leurs activités, recevoir des subventions, organiser des manifestations, louer des locaux publics ou ouvrir des comptes bancaires. Parmi elles, figurent des associations luttant contre la corruption, qui défendent les droits des diplômés universitaires au chômage, de la population amazighe (berbère), des Sahraouis et des migrants sub-sahariens, selon HRW. «L'administration a également entravé les activités de multiples associations caritatives et éducatives, apparemment parce que leurs dirigeants comptaient dans leurs rangs des membres de Justice et Spiritualité, l'un des mouvements islamistes les plus actifs du Maroc», note le rapport. En conclusion, HRW «recommande vivement» au gouvernement de «revoir la loi sur les associations de façon à restreindre les critères en vertu desquels une association peut être interdite». La formulation actuelle autorisant les fonctionnaires à refuser des associations «qui portent atteinte à la religion islamique, au régime monarchique ou à l'intégrité territoriale du Maroc (...) est trop générale et invite à la répression pour des motifs politiques».