Paru aux éditions Jets d'encre en France, L'enfance trahie ou le Philistin de Khider Ben Si Saïd est une pièce de théâtre qui devrait être adaptée en arabe pour être jouée, car le sujet est d'actualité et touche directement la vie des artistes en Algérie. Il faut dire que le fait que le livre soit édité en France prouve que les éditeurs et les lecteurs algériens ne sont pas très intéressés par l'écriture théâtrale. Dans sa pièce, l'auteur parle de la situation de l'artiste qui se trouve dans un milieu culturel géré par des incultes. Le personnage principal, un artiste, se trouve face à un directeur qui n'a aucun lien avec le théâtre ni l'art. Un long dialogue est engagé entre l'honnête artiste et le directeur qui tente de convaincre l'artiste à renier ses principes et même son amour pour l'art. Une voix off entre en scène en se faisant passer pour le second souffle de l'artiste mais joue quelque peu à l'hypocrite, car l'artiste restera jusqu'à la fin de la pièce incompris par cette société qui ne croit qu'au matériel et à l'amour de l'argent. Des garçons et des fillettes montrent leur joie et dansent avant de tenter également de convaincre l'artiste, mais ne peuvent rien, car la décision de se suicider est déjà prise. Un sujet brûlant L'artiste qui n'a d'ailleurs même pas eu droit à un nom ou à un quelconque pseudonyme finit par se suicider, mais tout en laissant une leçon à ces enfants amoureux de l'art. Le sujet est brûlant, car derrière le texte et le rideau (lorsque cette pièce sera jouée) se cache la vraie question de la gestion de la culture et de l'art en Algérie. Cela nous ramène à la vie de ces scénaristes qui écrivent de beaux textes alors qu'ils ne sont jamais diffusés, à ces compositeurs tels que Mohamed Iguerbouchène qui ne fut découvert par le grand public qu'après sa mort alors qu'il était parmi les plus grands compositeurs du monde. On sait que dans chaque ville se trouve un artiste de talent, mais qu'à cause de certains gestionnaires qui ne sont pas à leur place, ces artistes resteront inconnus à l'éternité. Derrière le personnage de l'artiste se cache quelque part la personne de l'écrivain Khider Ben Si Saïd qui est polyglotte et a déjà écrit une pièce de théâtre en italien et un recueil de poèmes en anglais. Il faut noter que de très beaux dessins de l'artiste peintre et chanteur chaâbi Chouaib Zouaoui accompagnent les textes de l'ouvrage. Dessinés au crayon et au fusain, les dessins de Chouaib Zouaoui entrent dans le jeu des mots et des comédiens. Ces tableaux bien choisis pourraient bien servir de décor le jour où cette pièce sera jouée. Nos adaptateurs et nos metteurs en scène ont un très beau texte entre les mains. Avec une bonne adaptation, le succès est assuré.