Monsieur est détenu pour... rébellion. Madame exige sa libération devant la juge de marbre, un marbre plus glacial que la magistrate avait lancé en direction de toute l'assistance comme pour avertir les amateurs de menaces et de chantage ! L'épouse d'un détenu inculpé d'émission de chèque sans provision a frôlé l'outrage en début d'audience face à Mme Mounira Nacer, la présidente de la section correctionnelle section détenus. Elle a frôlé l'outrage car elle s'est écriée depuis le banc réservé au public qu'elle allait ramasser la somme due et qu'en fin d'audience, la justice se devait de libérer l'époux : elle est décidée la dame. «Allez, Madame. Récoltez la somme de la victime, en attendant les débats sont renvoyés au 25 du mois», siffle le juge, à l'aise sous le regard perdu du procureur de l'audience, un regard perdu et interrogatif comme pour signifier : «Dites donc, Madame, pour qui vous prenez-vous pour lancer un défi au tribunal ?» N'empêche que la femme, mère de quatre enfants en bas âge, a lancé avant de quitter la salle d'audience : «Débrouillez-vous, cet après-midi mon mari doit rentrer chez lui.» La mère de famille n'avait pas encore atteint le seuil de la salle d'audiences qu'une longue vague de réprobation se dégagea de l'assistance. Les menaces lancées à l'encontre du tribunal avaient-elles fait un effet espéré ? Non, à entendre de nouveau une voix fluette et décidée. Et Madame la présidente, froide et tenace, de reprendre dans la foulée : «Le 25, Madame, le procès se tiendra à condition de ramener le dû de la victime et si vous exécutez la décision de justice qui a ordonné l'expulsion, le tribunal en tiendra compte.» La présidente s'apercevra à la reprise de l'audience vers quatorze heures que les membres de la famille étaient venus en nombre réclamer la libération provisoire du papa réclacitrant, détenu pour s'être opposé à la décision qu'il juge «assassine» de jeter ses enfants à la rue. «ça y est, Madame la présidente, nous avons quitté le domicile. Nous voulons vous remettre les clés et que vous délivriez le chef de famille», dit un proche visiblement excité mais résigné. On a dû lui souffler que si la présidente a renvoyé les débats sous huitaine en attendant la présence de la victime, le papa avait zéro chance de passer la nuit du dimanche chez lui au chaud. Et comme pour démontrer qu'elle était une dame de faire face à celle qui se prend pour une dame de fer, on avait eu cette réponse : «Bien, bien. Rejoignez donc le siège de la sûreté en vue de dépêcher un élément faire le constat de ce que vous avancez. Le procès aura lieu la semaine prochaine et le détenu restera là où il est pour qu'il réfléchisse à son acte de rébellion et pour avoir affronté la justice», tranche Mme Nacer qui prend acte que les membres de la famille du détenu n'ont point répliqué. Ils venaient d'apprendre ainsi que la justice ne pouvait se prononcer dans le chahut, le brouhaha, la révolte et autres vaines vociférations.