Seulement une vingtaine de pharmaciens inspecteurs exercent leur travail d'inspection à travers le territoire national. Ce qui reste très insuffisant d'après M. Benbahmed, vice-président de l'Ordre des pharmaciens, qui nous explique qu'il s'agit de pharmaciens envoyés sur le terrain par le ministère de la Santé après une formation professionnelle, pour contrôler les officines. Leur travail est de remédier à l'exercice illégal et aux fautes graves telles que la vente de psychotropes, à titre d'exemple, qui peut induire une sanction pénale ou la fermeture de la pharmacie. Toutefois, hormis le fait que ces inspecteurs ne soient pas nombreux, ils vérifient «principalement» l'état des lieux, telle que la disponibilité des produits. «Ils ne sont pas réellement formés pour faire un travail d'inspection au sens propre du terme, dans le sens où ils ne se basent pas spécialement sur les délits», a précisé notre interlocuteur. En tant qu'organisation, l'Ordre des pharmaciens réagit à tout cela par des campagnes de sensibilisation. «Nous réagissons, en général, à des plaintes émanant de médecins où de patients mal conseillés par des pharmaciens, où par des pseudo-pharmaciens», développe notre interlocuteur. Celui-ci entend par pseudo-pharmaciens ces vendeurs qui gèrent les officines en l'absence du pharmacien. «Il y a des pharmaciens qui vivent à l'étranger et lèguent leur commerce à une personne qui n'a aucune notion en pharmacie. Pis encore, il y a d'autres qui vendent leur licence d'ouverture d'officine à n'importe qui», indique-t-il, poursuivant que la vente illégale des médicaments fait, cependant, parti de ces pratiques qui étaient plus répandues dans les année 1990. Il explique qu'il y a une quinzaine d'années, la pharmacie était considérée comme un commerce. «Nous combattons cela depuis la création de notre organisation et nous avons obtenu, à titre d'exemple, la fermeture d'une soixantaine d'officines l'année dernière réparties à travers le pays, pour la majorité situées à M'Sila et Aïn Defla», précise t-il, ajoutant que ce genre de pénalité pourrait dissuader certains pharmaciens de faire de leur espace «médical» un espace commercial. L'achat des médicaments sans ordonnance dénote l'absence de couverture sociale L'on a parlé, récemment, du libre achat des médicaments, ce phénomène qui cause des dégâts, voire des décès. Bien qu'elle soit moins répandue qu'il y a de cela une quinzaine d'années où il y avait une absence totale d'inspecteurs, la vente des médicaments sans ordonnance doit être traitée comme un véritable problème de santé publique et prise au sérieux. Ce sont les propos de M. Benbahmed, qui estime que cette pratique en dit long sur le niveau social de notre pays. Autrement dit, l'achat sans ordonnance dénote l'absence de la couverture sociale chez nombreux des malades, selon lui. Il estime que ce problème ne pourrait être résolu que lorsque les consultations médicales seront prises en charge par la sécurité sociale. «Et encore, cela concernera uniquement les gens assurés. Les autres, ceux qui ne le sont pas, continueront à acheter des médicaments sans ordonnance, avec l'approbation de certains pharmaciens inconscients», a-t-il ajouté, précisant qu'actuellement, seuls les malades chroniques ont droit à la gratuité de leurs traitements médicamenteux, prescrits sous ordonnance bien entendu. L'automédication est une autre paire de manches Dans les pays développés, plus de 3000 morts dues à l'automédication sont enregistrés annuellement, d'après M. Benbahmed qui estime qu'un chiffre aussi important rappelle que le médicament peut être fatal et que «ce qui est bénéfique pour les uns ne l'est pas pour les autres». «Contrairement à ce que l'on pense, l'automédication se fait, la plupart du temps, à la maison, sans l'avis d'un médecin ni celui d'un pharmacien», explique notre vice-président, développant que sans avoir recours à un pharmacien, un malade se soigne seul en se procurant un remède chez la voisine ou en fouillant dans une boîte pharmaceutique familiale. «Ainsi, il se retrouve à utiliser du collyre ou à consommer un sirop inadéquat ou périmé qui peuvent lui causer des intoxications médicamenteuses.» Ce qui veut dire que l'automédication n'est pas forcément liée à la vente des médicaments sans ordonnance mais «surtout» à la consommation du médicament chez soi, sur conseil d'un proche, par «intuition» ou par expérience. Ce qui est pire encore d'après notre interlocuteur. «D'où l'importance de la sensibilisation dans ce cas de figure», conclut-il.