Tony Blair a-t-il menti au sujet de l'Irak ? Avant même d'être auditionné par la commission parlementaire britannique, tout laisse dire qu'il n'est pas la pauvre victime de la grande supercherie de l'Amérique des Bush, comme certains veulent bien le présenter. L'ancien Premier ministre du Royaume-Uni savait tout. Du moins, l'essentiel. Que l'Irak ne possédait pas d'armes de destruction massive et que l'arrestation de Saddam était illégale. S'il était au courant de ces choses-là, il ne peut qu'en avouer d'autres. Que le Kurdistan irakien n'a pas servi de base arrière et de centre de repos aux lieutenants d'Oussama Ben Laden, comme l'avait grossièrement prétendu la propagande occidentale. En ce temps-là, le chef d'Al Qaïda et ses proches adjoints se trouvaient ailleurs que sous l'aile protectrice des laïcs d'Irak. Probablement, dans les montagnes de Tora Bora où il aurait pu être capturé sans grandes difficultés. Il était à la portée des troupes américaines lorsque le commandement US a pris la décision de ne pas engager plus de forces dans la traque de l'ennemi numéro 1 des Etats-Unis. C'est du moins ce que vient de révéler un rapport de la commission des relations extérieures du Sénat US dont son président John Kerry a passé commande. Donald Rumsfeld aurait-il lui aussi menti à l'époque quant à l'impossibilité de capturer Ben Laden mort ou vif ? Il avait estimé qu'aucun élément ne permettait de localiser avec exactitude le lieu où se cachait l'homme des grottes. La coalition aurait eu d'autres missions plus urgentes à mener qu'à suivre à la trace et jusqu'à la lassitude un seul homme. Pourtant, une telle prise aurait pu changer le cours des événements actuels. Le mouvement taliban ne connaîtrait pas un renouveau d'une pareille ampleur. Quant au Pakistan - où le Président a remis la responsabilité du contrôle du nucléaire à son Premier ministre au nom d'un renoncement des vieux pouvoirs dictatoriaux détenus par Musharraf et au profit d'un soulagement d'Hillary Clinton -, les tensions ne seraient pas celles qui minent aujourd'hui le voisin direct de l'Afghanistan. Bien que dans leur rapport, les démocrates US concèdent sur le fait que la capture de Ben Laden n'aurait pas permis un déracinement total de la menace terroriste, elle aurait au moins servi à saper le moral des djihadistes mondiaux dont celui des talibans. Dans un élan de solidarité avec l'ancien patron de l'appareil militaire américain, les républicains US vont-il monter au front pour détruire le rapport en question par la simple évocation du moment douteux, choisi par leurs adversaires politiques pour sa publication ? Ils mettraient tout en œuvre pour démontrer que le rapport de la commission des relations extérieures du Sénat US n'est pas tombé du ciel mais du tiroir de Barack Obama qui s'apprête à annoncer l'envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan. W. Bush se devait-il de prendre une telle décision alors que Ben Laden se trouvait encore dans les parages de Tora Bora ? Tout comme en Irak, les objectifs de départ, mensongers soient-ils, ont vite fait d'être détournés en Afghanistan, laissant place aux véritables desseins de la présence étrangère sur les deux fronts de guerre. Plus question d'armes de destruction massive mais de la tyrannie de feu Saddam, plus question de capture de Ben Laden mais de lutte contre un retour des talibans au pouvoir à Kaboul, voire leur propulsion au sommet de l'Etat à Islamabad. Indiscutablement, le projet de remodelage du Grand Moyen-Orient a permis les coups les plus bas. Les mollahs d'Iran en ressentent à présent les reconductibles méfaits.