Le désormais ex-Premier ministre britannique paie les erreurs de politique étrangère commises dans le traitement de l'affaire irakienne. Tony Blair, qui a quitté officiellement le pouvoir hier -cédant la place au Chancelier de l'Echiquier (ministre des Finances) Gordon Brown- fera un dernier discours, aujourd'hui, devant la chambre des Communes. Un adieu très ‘'british''. Un départ qui s'explique pour une grande part du fait des erreurs que M.Blair avait accumulées, en politique étrangère, notamment en entraînant son pays dans la guerre contre l'Irak, résultat d'un suivisme aveugle de son «grand ami» Bush, le président américain. Paradoxalement, au plan économique, Tony Blair laisse une Grande-Bretagne en excellente santé qui n'a jamais été aussi bien portante que sous le mandat de l'ex-Premier ministre. Personne -Tony Blair compris- ne s'attendait en réalité à cette fin en queue de poisson que rien ne laissait envisager, surtout pas les résultats obtenus ces dernières années par le gouvernement Blair. D'ailleurs, ce dernier, lors de sa réélection à la tête du Labour en 2004, avait laissé entendre qu'il ne briguerait pas un quatrième mandat, mais irait jusqu'au terme de sa troisième mandature, déclarant en marge du congrès du Labour «Si je suis élu, j'effectuerai un troisième mandat complet. Je ne veux pas faire de quatrième mandat (...)». Mais déjà, Tony Blair n'avait plus son avenir entre les mains alors que son aura n'en finissait pas de décliner auprès de la rue britannique et surtout de l'électorat, alors que le Labour commençai à perdre du terrain au profit des Tory (Conservateurs) et des Libéraux. La guerre menée en Irak depuis mars 2003 -où de plus en plus de soldats britanniques perdaient la vie- a été pour beaucoup dans la perte d'image de Tony Blair, d'autant plus que les arguments sur lesquels s'est appuyé le locataire de Downing Street, pour justifier l'entrée en guerre de la Grande-Bretagne contre l'Irak se sont révélés les uns après les autres faux, voire de simples affabulations. De fait, l'opinion britannique comprenait très mal l'allégeance de son Premier ministre au chef de la Maison-Blanche, George W.Bush, la presse londonienne allant jusqu'à qualifier M.Blair de «caniche» de Bush. Mais dix ans de pouvoir ça use et Tony Blair -même s'il donnait l'impression de garder une énergie intacte, qui faisait de lui un véritable battant- se trouvait dans une impasse piégée autant par sa fidélité à son ami George W.Bush, que par les ravages que la guerre faisait parmi les troupes britanniques. D'ailleurs, lâchant du lest, Tony Blair avait annoncé, en avril, que les troupes britanniques en Irak seraient graduellement réduites d'ici à la fin de l'année, même si un calendrier de retrait définitif n'ait encore été fixé. Aussi, ce départ avant terme de Tony Blair n'était guère prévu quand il a été triomphalement réélu en 2004 à la tête du Labour, un départ qui entache quelque peu une carrière par ailleurs exemplaire, selon les analystes et commentateurs britanniques. Tony Blair aura, ainsi, à son bénéfice le fait d'avoir remis sur pied une économie exsangue et un pays mal en point miné par divers dysfonctionnements. Toutefois, Tony Blair ne profitera pas de sa «retraite» et/ou ne restera pas longtemps «chômeur», c'est selon, à en croire les bruits qui circulaient hier dans les couloirs du Quartette pour le Proche-Orient (USA, UE, ONU, Russie), où une nouvelle mission de médiateur semble devoir lui être confiée dans le cadre du processus de paix israélo-palestinien. L'intéressé n'a ni démenti ni confirmé, mais le fait semble acquis selon les médias britanniques qui estiment que M.Blair a, encore, un rôle à jouer et qu'il aurait le profil parfait pour mettre son expérience au profit d'une solution du contentieux entre Israéliens et Palestiniens. Tony Blair a, cependant, insisté sur le fait qu'il estimait «essentiel» un «règlement durable de la question israélo-palestinienne. Et je ferai tout ce que je peux pour aider à ce qu'on parvienne à un tel règlement», a-t-il indiqué en marge de sa rencontre hier avec le gouverneur de Californie, Arnold Schwarzenegger, venu à Londres discuter du réchauffement climatique. Selon le Guardian d'hier, le rôle de Tony Blair sera essentiellement celui de négocier avec les Palestiniens sur les questions de sécurité, d'économie et de gouvernance. Autant dire qu'il aura un rôle périphérique où l'on demandera encore d'autres efforts aux Palestiniens quand rien ne semble devoir être reproché, ni exigé d'Israël qui occupe depuis quarante ans les territoires palestiniens. La Grande-Bretagne tourne, donc, aujourd'hui une page de son histoire avec le départ de Tony Blair qui a été, néanmoins, l'un des Premiers ministres et hôtes les plus populairesb de Downing Street, avant que son étoile ne dépérisse dans le bourbier irakien.