S'il ne s'agissait que du respect de «l'intimité» et de «la vie privée» des individus tout le monde serait déjà rassuré, du moins ceux qui n'en font pas vraiment une maladie : les scanners corporels qu'on projette d'installer aux portiques de contrôle des voyageurs dans les aéroports ne déshabillent pas vraiment ceux qui s'y soumettent, contraints ou consentants. Cela fait déjà un moment que les télévisions européennes nous font la démonstration technique. Comme prime, à moins que ce ne soit plutôt ça le plus important, les voyageurs interrogés dans les couloirs des aéroports sont très souvent acquis à toute mesure, aussi contraignante qu'elle soit, susceptible de renforcer leur sécurité et leur permettre de voyager sans angoisse. Ils réagissent même avec patience et bonhomie aux désagréments dus aux longues files d'attente avant l'embarquement. Pour des voyageurs qui n'ont pas la réputation et l'habitude de prendre leur mal en patience quand il s'agit d'accepter le moindre inconfort dans un service qu'ils paient plutôt cher, ça ne passe pas inaperçu. Mais en l'occurrence, il ne s'agit pas que de vie privée, d'intimité et de liberté. Les débats sur la sécurité, ou plus exactement sur la lutte antiterroriste, parce qu'au fond, c'est de cela qu'il s'agit, ont toujours été détournés vers des polémiques de politiques nationales ou communautaires. Que ces polémiques soient motivées par des objectifs de pouvoir ou de leadership, il en résulte la même incapacité à trouver des solutions communes à un péril qui ne peut pas être combattu en solo. Encore heureux qu'on en soit là, parce qu'à un moment, il a même été question de ne pas le combattre ! Après avoir multiplié les comptoirs de dédouanement du terrorisme quand ils croyaient leurs pays à l'abri de ses opérations et les contrées qui en souffrent susceptibles d'être des laboratoires pour républiques islamistes, certaines puissances ont «changé leur fusil d'épaule». Avant, il n'y avait pas de terroristes chez nous, maintenant, nous sommes tous des terroristes. Et pour nous, le dire dans les termes les plus «courtois» possibles, ils nous sélectionnent pour un passage prioritaire sous les portiques, ou pire, opposent la lutte antiterroriste aux libertés individuelles quand ce n'est pas aux considérations d' «intimité» corporelle. «Nos citoyens ne sont pas des objets», a déclaré récemment Mme Viviane Reding, la nouvelle commissaire européenne à la justice, farouche opposante aux scanners corporels. On s'en doutait un peu, sauf qu'elle a ajouté qu' «il ne peut pas y avoir de liberté sans sécurité…» Et c'est là qu'elle ne croyait pas si bien dire. Si bien sûr, elle parle de liberté et de sécurité pour tout le monde. Cet e-mail est protégé contre les robots collecteurs de mails, votre navigateur doit accepter le Javascript pour le voir