Le Niger est désormais sous le contrôle de l'armée qui a renversé jeudi le président Mamadou Tandja. Un «conseil suprême pour la restauration de la démocratie» (CSRD), formé d'officiers des forces de défense et de sécurité, préside aux destinées de ce pays considéré comme l'un des plus pauvres de la planète. L'armée nigérienne détient depuis jeudi la totalité du pouvoir. Une entité se faisant appeler «conseil suprême pour la restauration de la démocratie», le CSRD, a destitué de force le président Mamadou Tandja qui se trouve actuellement aux mains des putschistes, dans un lieu tenu secret. Le CSDR a également décidé de suspendre la constitution et de dissoudre toutes les institutions qui en sont issues. Les putschistes, dont l'action a été fermement condamnée par Jean Ping, le président de la commission de l'Union africaine, ont aussi décidé de la fermeture des frontières aériennes et terrestres et de l'instauration d'un couvre-feu de 18 heures à 6 heures du matin à partir d'hier. Dans une déclaration diffusée jeudi tard dans la soirée, le CSRD confirme la prise du pouvoir par les forces de défense et de sécurité et indique que l'action est motivée pour mettre fin à la situation politique tendue qui prévaut dans le pays. Le CSRD annonce la suspension de la constitution tout en réaffirmant son attachement aux traités et conventions précédemment souscrits par l'Etat du Niger. «Nous appelons l'opinion nationale et internationale à nous soutenir dans notre action patriotique pour sauver le Niger et sa population de la pauvreté, du mensonge et de la corruption», précisent les putschistes appelant la population à demeurer calme et à faire confiance à son armée.
Des morts et des blessés Alors que le président Tandja est sous surveillance dans un lieu en dehors de Niamey, et que la plupart des ministres sont «séquestrés» ou sous bonne garde, des tirs avaient été entendus aux alentours du palais présidentiel où des blindés avaient été déployés. Des témoins affirment que l'on a procédé à des tirs à la mitrailleuse lourde (12,7mm) et de roquettes. Un char a été atteint par un obus et ses occupants, trois membres d'équipage, ont été déchiquetés. Un journaliste nigérien a affirmé que plusieurs morts et blessés se trouvaient à l'hôpital de Niamey. Il a ajouté que dans les rues, «tout est calme, les gens sont plutôt contents de ce qui arrive. Il y avait énormément de tensions depuis que le président Tandja avait refusé l'accord proposé par la Cédéao pour partager le pouvoir avec l'opposition». Le coup d'Etat a été précédé dimanche d'une grosse manifestation de l'opposition à Niamey qui conteste, depuis plusieurs mois, la politique suivie par Mamadou Tandja. Le vieux colonel a décidé de se maintenir coûte que coûte au pouvoir et pour ce faire, il n'a pas hésité à procéder au changement de la constitution pour s'offrir un troisième mandat. Elu à la tête du Niger en 1999 puis réélu «à la régulière» cinq ans plus tard, Mamadou Tandja, qui fut ambassadeur et plusieurs fois ministre, a fini par prendre goût au pouvoir. Un analyste politique dira à son sujet que «Mamadou Tandja se croit indispensable à la bonne marche de son pays. Son entêtement conduira à l'exacerbation des conflits politiques et ethniques au Niger ; il choisira la répression de la rébellion touarègue, poussant le Mouvement des jeunes nigériens (MJN) à reprendre les hostilités armées au nord du pays. Face au mécontentement de l'opposition, voire d'une partie de son propre clan, sur la manière dont il a décidé de conduire les affaires du pays, Tandja ne s'est pas gêné de dissoudre l'Assemblée nationale et la Cour constitutionnelle, avant d'organiser un référendum sur mesure l'été dernier. La communauté internationale a condamné, mais a laissé faire le vieux colonel qui jouissait du soutien presque inconditionnel de la France. La production d'uranium dont regorge le sous-sol nigérien est assurée essentiellement par la multinationale française Areva.