Quid du professionnalisme dans le football en Algérie ? «Nous sommes obligés d'y aller sinon notre football restera à l'état de médiocrité qui est le sien en ce moment», disait, récemment, le président de la Fédération algérienne de football, Mohamed Raouraoua. Et ce ne sont pas les exploits de l'équipe nationale qui le contrediront car cette équipe nationale n'est pas le produit du football algérien mais celui de notre émigration. Celui qui refuse une telle évidence ne rendra jamais service à ce sport. Un texte sur le professionnalisme existe depuis 2008 à un niveau international. Il a été élaboré par la Fifa qui donne jusqu'à 2011 aux clubs intéressés par ce projet pour se conformer à ses dispositions. Il s'agit, en fait, à travers ce document, d'acquérir auprès de la FAF une licence professionnelle qui permettra à son bénéficiaire de disputer les compétitions internationales. Une réunion importante Apparemment, il y a du retard dans le projet en Algérie mais cela n'est pas uniquement du ressort des clubs. En effet, la Fifa a demandé à toutes les confédérations d'amender leurs textes en fonction du règlement de la licence professionnelle, textes qui serviront ensuite de référence aux fédérations nationales pour qu'elles élaborent une règlementation qui tienne compte de cette nouvelle donnée. Il semblerait que pour ce qui est de l'Afrique, la CAF n'a pas encore accompli cette opération, d'où le retard enregistré par la FAF. Une FAF prise par les exigences de l'équipe nationale, qui s'apprête à disputer une Coupe du monde, mais qui est tenue d'être impliquée à fond dans le processus du professionnalisme. Mais la fédération algérienne ne peut rien faire si elle ne dispose pas des appuis de la puissance publique incarnée par le ministère de la Jeunesse et des Sports. C'est ce dernier qui apporte sa caution sur le plan juridique, financier ou matériel. C'est lui la courroie de transmission avec le gouvernement afin d'obtenir des avantages et certains privilèges s'il y a nécessité. Du reste, c'est à son niveau que s'élaborent toutes les décisions concernant la professionnalisation du football algérien. En d'autres termes, c'est le MJS qui pilote cette opération en collaboration avec la FAF. Une réunion portant sur les besoins de l'équipe nationale et sur la mise en place du professionnalisme dans le football a d'ailleurs eu lieu récemment entre le Premier ministre Ahmed Ouyahia, d'un côté, et le ministre de la Jeunesse et des Sports, Hachemi Djiar, et le président de la FAF, Mohamed Raouraoua, de l'autre. Dans l'entreprise qui est en train de s'accomplir, il y a un obstacle de taille, à savoir comment permettre aux clubs désireux d'entrer dans le professionnalisme d'avoir un outil de travail. La Fifa demande à ces clubs d'avoir un stade qui ne soit pas obligatoirement à eux. Ce qu'elle voudrait, c'est que ces clubs disposent durant toute l'année d'un terrain où ils peuvent disputer leurs matches officiels. L'instance internationale insiste, d'un autre côté, sur le fait que ces clubs doivent avoir, chacun, un centre de formation. Au jour d'aujourd'hui, un seul club en Algérie répond à ce critère mais il n'a pas de stade, le sien étant fermé pour on ne sait quelle raison : c'est le PAC. Les autres, tous les autres n'ont rien ou font dans le bricolage en matière de formation. Le MJS et la FAF songent à donner à chaque club qui veut devenir professionnel un stade en concession. Cependant, l'opération est loin d'être facile quand on sait que la plupart des stades sont communaux, les autres appartenant au MJS. Il faudrait donc trouver un moyen de faire signer des conventions entre les propriétaires des stades et les clubs dans le cadre d'une concession. Mais cette dernière risque de revenir très chère aux clubs. C'est pourquoi l'appui du Premier ministre est nécessaire afin que des avantages d'ordre financier soient accordés aux clubs. Cela devra obligatoirement se faire dans le cadre d'une loi de finances. Il reviendra ensuite aux clubs acquéreurs de rentabiliser le site, quitte à faire payer n'importe quel utilisateur du stade, une éventualité qui risque de faire du bruit. Le MJS et la FAF songent également aux clubs qui seront engagés dans les compétitions internationales et le moyen de les prendre en charge. On sait qu'il s'agit d'un sujet qui fait parler de lui depuis très longtemps. Il est opportun de définir une bonne fois pour toutes la manière dont l'Etat pourra intervenir dans ce genre de prise en charge. Quels dirigeants pour les clubs ? Pour ce qui est de l'aspect juridique de l'opération, l'accès au professionnalisme est codifié en Algérie par un décret exécutif, le décret n°06-264 du 8 août 2006 relatif au club sportif professionnel et fixant les statuts-types des sociétés sportives commerciales. Les clubs ont ainsi trois alternatives devant eux, à savoir devenir une société à responsabilité limitée (Sarl), une société par actions (SPA) ou une entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (Eurl). Ce texte invite des particuliers et des entreprises à se porter acquéreurs des clubs selon des critères bien définis. Il faudra ensuite faire la différence entre la société et le club, le second appartenant au premier. La difficulté qui se présente est que les particuliers et les entreprises désireuses d'investir dans le football ne courent pas les rues. En outre, le club peut être son propre patron à la condition qu'il fasse état d'un capital supérieur à 50 millions de dinars mais cela voudrait dire que le risque est grand de retrouver les dirigeants actuels aux commandes de ces clubs avec toutes les dérives que cela implique. Et nous croyons savoir qu'au niveau des autorités du pays l'espoir est grand de voir nos clubs gérés par une nouvelle race de dirigeants. Une autre embûche est constituée par le fait que le sponsoring ne joue pas tellement le jeu chez nous. On parle de sponsoring au sens propre du terme, pas de celui qui a cours en ce moment et qui consiste à autoriser les entreprises impliquées dans le financement des clubs à déduire de leurs déclarations fiscales annuelles l'argent qu'elles donnent à ces clubs. Le sponsor est celui qui apporte son écot dans le cadre d'une opération de marketing, le club servant de support, en matière de communication visuelle, à celui qui le finance. Des sponsors de ce genre ne courent pas, eux aussi, les rues en dehors des deux opérateurs de téléphonie mobile, Nedjma et Djezzy. On laissera de côté plusieurs aspects de l'accession au professionnalisme comme l'entend la Fifa. Il existe des critères auxquels aucun club en Algérie ne peut répondre favorablement. Il faudra au MJS et à la FAF de trouver un moyen de contourner ces impératifs tout en gardant en point de mire l'échéance 2011 fixée par l'instance internationale comme date limite à la mise en place du professionnalisme.