Ecrivain prolifique, Fatima Bakhai s'attelle à conter la saga algérienne des origines à nos jours. Sans prétention aucune, loin d'être laudatrice et sans verser dans la glorification de l'histoire, elle a le don de narrer telle Shahrazade qui a su garder son souffle pour sauver sa vie. Fatima a cet esprit vif qui la caractérise. Volontaire, elle fait une incursion dans l'histoire de nos ancêtres. Toujours à la recherche d'innovation, elle ne tarit pas d'interroger la parole du terroir et de compulser les ouvrages anciens en quête de nouveautés. Se distinguant par sa volubilité et par son analyse pondérée, elle dit sans ambages sa passion de découverte, d'inventivité et de création. Dans cet entretien, c'est un écrivain enthousiasmé par l'histoire de l'humanité qui nous entraîne dans sa longue saga romancée. Le Temps d'Algérie : De formation juriste et ayant exercé comme avocate durant 20 ans, vous faites un saut dans la littérature, pourquoi ? Fatima Bakhai : En effet ! J'ai travaillé dans la justice pendant plus de vingt ans en qualité de magistrat puis d'avocate. Je n'avais plus rien à y découvrir, cela devenait une routine… J'aime la nouveauté, apprendre toujours. Les sciences humaines et la littérature m'ont toujours passionnée. J'ai tenté l'aventure ! - Après vos premiers romans, vous vous attelez à l'histoire de l'Algérie avec cette trilogie, pourquoi cet intérêt pour l'histoire, est-ce pour rétablir des vérités historiques ? - Rétablir des vérités historiques ? Je n'ai pas cette prétention ! D'abord je n'en ai pas les compétences, je ne suis pas historienne ! Mais l'histoire de l'humanité me passionne dans tous ses aspects. Ce n'est que très tard que j'ai découvert l'histoire de mon propre pays. On ne me l'a pas apprise à l'école. Tous mes livres y font référence : La Scaléra, Dounia, Un oued pour la mémoire, La femme du Caïd, Raconte-moi Oran et puis j'ai entrepris l'écriture de la trilogie Izuran. C'était passionnant ! Les Algériens, en général, ne connaissent pas leur histoire. Quelques bribes parfois. C'est frustrant ! J'ai voulu la leur raconter non de manière scientifique, académique mais romancée. C'est plus facile et plus attachant je crois. Une saga qui débute au néolithique et s'achève à la veille de la colonisation française… Au fond, comme on me le dit parfois, je suis une «conteuse» ! Il n'y a donc aucune vérité à rétablir mais une histoire à raconter et que je raconte telle que je l'ai perçue après bien des recherches. Les historiens pourront me faire des reproches peut-être, je les accepte ! Je ne les trahis pas, je raconte des faits historiques établis mais tels que j'imagine que les ont vécus des personnages purement fictifs. - Peut-on connaître la thématique de ce dernier roman Au pas de la Sublime Porte ? C'est la suite d'Izuran I - Au pays des hommes libres et d'Izuran II - Les enfants d'Ayye. La saga continue. Les descendants vont vivre la période allant de la chute de Grenade au fameux coup d'éventail. La période ottomane ! Il y a tant de choses à y découvrir. C'est passionnant, en tout cas cela l'a été pour moi ! Ensuite, l'histoire est connue ! J'en parle dans mes premiers romans d'ailleurs. - Y aura-t-il une autre suite à Izuran ? Non, je ne crois pas. La suite ne pourrait être qu'une répétition de Dounia, de La femme du Caïd et de La Scaléra et je vous l'ai dit, j'aime la nouveauté ! (rires) - Quel est votre avis sur la littérature algérienne, a-t-elle amorcé un nouveau tournant avec des thématiques nouvelles ? Il semble que oui ! C'est tout à fait normal, les temps ont changé et les écrivains aussi. Je constate un regain d'intérêt pour l'histoire et surtout une nouvelle liberté de ton, mais je suis très mal placée pour juger de la littérature aujourd'hui. Ce qui importe c'est que des hommes et des femmes de plus en plus nombreux prennent la plume et que des hommes et des femmes lisent ce qui leur est proposé ! La décantation se fera d'elle-même. Mais la littérature algérienne pour exister vraiment a besoin d'entrer à l'école. La littérature a besoin de lecteurs, et les lecteurs se forment dès l'école primaire ! Chacun a besoin de la reconnaissance de l'autre ! Entretien réalisé