près deux tentatives infructueuses, Julian Assange, détenu à Londres depuis le 7 décembre dans le cadre d'une procédure d'extradition vers la Suède, a finalement réussi jeudi à arracher à la justice britannique sa mise en liberté conditionnelle après neuf jours de prison. Au terme d'une audience de 90 minutes, la Haute cour de Justice de Londres, qui examinait l'affaire en appel, s'est rendue aux arguments de ses avocats. Le parquet britannique --qui représente la Suède à l'origine d'une demande d'extradition dans le cadre d'une affaire d'agressions sexuelles dans ce pays-- avait fait appel mardi de la décision de remise en liberté, de peur que le prévenu prenne la fuite. "Je vais accorder la mise en liberté sous caution," a annoncé le juge Duncan Ouselay, dont la décision ne peut faire l'objet d'aucun recours. La cour a estimé qu'elle n'avait pas affaire à "quelqu'un qui fuit la justice" et qui cherche "à se soustraire à un interrogatoire et à des poursuites". Julian Assange, qui a toujours clamé son innocence et crié à la machination politique, va donc pouvoir quitter prochainement la cellule de sa prison de Wansdworth où il était détenu depuis neuf jours, dans des conditions "dignes de Dickens" aux dires de ses avocats. Il sortira "à un moment donné aujourd'hui, ou au pire demain", a déclaré l'un de ses avocats londoniens, Mark Stephens. Mais pas à n'importe quel prix: le fondateur de WikiLeaks devra porter un bracelet électronique, verser une caution de 240.000 livres (283.000 euros), dont 200.000 en liquide, et être assigné à résidence dans la (très belle) propriété d'un de ses amis à environ 200 kilomètres de Londres. Une "assignation dans un manoir", selon le bon mot d'un de ses avocats.. Il devra aussi se plier à couvre-feu et se présenter régulièrement au commissariat de police le plus proche. Mark Stephens s'est également engagé à ce que la caution soit versée avant la fin de la journée. Plusieurs célébrités, comme le réalisateur américain Michael Moore et le réalisateur britannique Ken Loach, ont promis de mettre la main à la poche. Un petit groupe de supporteurs de M. Assange, qui attendait depuis des heures devant la Haute Cour, vêtus de tee-shirts à son effigie, a salué la nouvelle en criant: "Dévoiler des crimes de guerre n'est pas un crime". Une allusion aux milliers de télégrammes diplomatiques confidentiels américains publiés dernièrement par le site, au grand dam des chancelleries. Sa mère, Christine Assange, venue spécialement d'Australie pour le soutenir, s'est déclarée "absolument ravie" mais pas surprise de cette décision: le contraire aurait été vraiment "scandaleux", a-t-elle dit en quittant le tribunal. M. Assange avait déjà tenté deux fois d'obtenir sa libération en justice: la première après sa reddition à la police le 7 décembre, la seconde mardi. Même s'il sort rapidement de prison, le périple judiciaire de M. Assange est cependant loin d'être terminé: la justice britannique doit en effet encore se prononcer sur son extradition, ce qui peut prendre des semaines, voire des mois. Prochaine étape le 11 janvier, quand elle fixera la date du jugement sur son extradition. John Pilger, un journaliste et militant des droits de l'Homme australien présent sur les lieux, a assuré que "le grand non-dit" dans l'affaire jugée jeudi était --par delà une extradition en Suède-- la menace d'une extradition vers les Etats-Unis, où Assange aurait à répondre des fuites publiées par WikiLeaks.