Sans aller dans le détail des projets des codes de wilaya et de commune, le Premier ministre Ahmed Ouyahia est longuement revenu hier, dans ses réponses aux sénateurs, sur les collectivités locales, qui souffrent, selon lui, de la faiblesse d'encadrement et de manque de moyens financiers. Considérant l'administration territoriale comme «pilier de base», le Premier ministre a regretté que les collectivités locales manquent cruellement d'encadrement et souffrent en parallèle d'un manque criant de moyens financiers. Pour y remédier un tant soit peu, le représentant du gouvernement annoncera dans la foulée, pour ce qui est de la faiblesse de l'encadrement, le recyclage de 5000 cadres dans les différentes spécialités et le recrutement de 10 000 universitaires, précisant que cet effort de l'Etat «va s'intensifier à l'avenir». «Le ministère de l'Intérieur avait récupéré l'Ecole nationale l'administration (ENA) et le réseau des centres de formation administrative pour pallier ce manque». Qualifiant le manque de moyens financiers de «situation de fait avec laquelle l'Etat compose», le Premier ministre a rappelé les moyens consentis par l'Etat pour prendre en charge ce volet. «Nous sommes peut-être le seul pays au monde à procéder au financement des APC via les PCD», dit-il, annonçant le chiffre de 60 milliards de dinars annuellement «absorbés», tout en regrettant que plusieurs «milliards ne sont pas consommés», ce qui peut être considéré comme un aveu de mauvaise gestion. Il a rappelé également que l'Etat avait effacé les dettes des communes à deux reprises durant les dix dernières années. M. Ouyahia rappellera dans le même contexte le fonds de solidarité des collectivités locales destiné notamment à aider les communes pauvres. Bien que d'énormes dépenses sont consenties dans ce cadre par l'Etat, le Premier ministre suggère «l'autonomie de décision» des communes appelées à prévoir à l'avenir le drainage des investissements et des programmes de développement local. M. Ouyahia a exhorté dans ce sens les élus locaux à demeurer en contact avec les citoyens et à ouvrir la porte du dialogue sur toutes leurs préoccupations au niveau local, une sorte de «complémentarité pour M. Ouyahia qui a appelé à cette occasion à veiller à l'application de la loi. La commune «doit être indépendante financièrement et dans la prise de décision», a affirmé M. Ouyahia, insistant sur la coordination entre l'élu et le représentant de l'Etat concernant les dépenses, une question qui est, selon lui, examinée actuellement dans le cadre du projet de code communal. Le Premier ministre n'a cependant pas évoqué dans ses réponses les prérogatives des élus locaux auxquels s'est contenté de leur suggérer un nouveau mode de gestion «collégiale». Lutte contre la corruption : renforcer la transparence dans la gestion des finances publiques «La lutte contre la corruption est un dossier des plus importants», a réitéré hier le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, qui rappellera les différentes mesures prises par l'Etat, notamment la directive présidentielle n° 3 et l'ensemble des mesures pour le renforcement de la transparence dans la gestion des finances publiques. «L'argent sale existe», reconnaît le Premier ministre qui préconise dans ses réponses de «tracer l'argent». L'introduction de ces instruments a permis de réaliser une avancée dans la lutte contre les fraudes fiscales, douanières et financières et de «réduire le crime économique entre 15% et 20%, a estimé Ouyahia qui rappelle la création d'un office de lutte contre la corruption, des pôles économiques de la police judiciaire et l'élaboration d'une série de mesures pour tracer l'argent. Il citera, entre autres, la modification de la loi sur le mouvement des capitaux transfrontaliers, la modification de la loi sur le crédit et la monnaie, l'obligation faite aux opérateurs économiques d'utiliser des chèques pour toute transaction de plus de 500 000 DA et l'introduction du credoc ainsi que le nouvel identifiant fiscal. Dans son exposé, M. Ouyahia a affirmé que le gouvernement s'est fixé quatre objectifs dans le domaine de l'exécution de la dépense publique qui consiste en la maîtrise de la réévaluation des projets qui commence à atteindre un seuil catastrophique. A ce titre, il a mis l'accent sur la nécessité d'exercer une pression sur les secteurs concernés à travers, a-t-il dit, «l'amputation du coût de la réévaluation d'un projet du budget du secteur». Il s'agira aussi, selon lui, de la nécessité de la finalisation des études de projets avant le lancement des travaux de réalisation et que tout marché d'une valeur supérieure à 20 milliards DA doit être approuvé par le fonds des équipements relevant du ministère des Finances. Le Premier ministre a ainsi relevé qu'un ensemble de dispositions législatives et réglementaires nouvelles sont venues renforcer l'action de l'Etat contre le gaspillage des deniers publics, rappelant que le code des marchés publics a allégé les dispositions d'octroi des marchés et introduit la préférence nationale. Pour confirmer la détermination du gouvernement, conformément aux orientations présidentielles, d'aller davantage de l'avant dans le renforcement de la transparence dans la gestion des finances publiques, «l'Etat a décidé de porter à trois, au lieu de deux, le nombre de commissions nationales des marchés pour l'étude d'un projet : l'une sera chargée des travaux, l'autre des études et la troisième des fournitures et services, de sorte à réduire les délais d'examen de ces dossiers des marchés publics». Education : un saut quantitatif «miracle» Evoquant le secteur de l'éducation et de l'enseignement en Algérie, le Premier ministre a estimé que ce dernier a connu un saut quantitatif qualifié de «miracle» mais également une importante amélioration du point de vue qualitatif. «Nul ne peut ignorer le développement qualitatif que connaissent l'éducation nationale, l'enseignement supérieur et la formation», a-t-il déclaré citant le développement quantitatif enregistré dans ces secteurs, depuis le lancement des réformes fin 1999 et début 2000. Le Premier ministre qui a estimé que l'éducation, l'enseignement supérieur et la formation nécessitent toujours davantage de développement, a toutefois indiqué que ces secteurs «n'ont pas encore atteint le niveau escompté». Chiffres à l'appui, M. Ouyahia revient sur l'évolution enregistrée et rappelle que sur les 48 wilayas du pays, 46 disposent d'universités ou de centres universitaires, à l'exception des wilayas de Tindouf et d'Illizi qui sont dans l'attente de projets futurs. M. Ouyahia a donné comme exemple des progrès réalisés dans le domaine de l'éducation nationale, la wilaya de Tindouf où le taux de scolarisation des filles et des garçons âgés de 6 ans a atteint 98%, tandis que celui des enfants âgés de 6 à 15 ans est de 90%. Il a également rappelé que l'Etat consacre une enveloppe de 16 milliards de dollars par an aux secteurs de l'éducation, de l'enseignement supérieur et de la formation. Le plan quinquennal 2010-2014 prévoit la réalisation de 300 écoles, 1100 CEM et plus de 800 lycées, a-t-il ajouté, soulignant que «cela prouve que l'Etat ressent la nécessité d'imprimer une plus grande dynamique au secteur». Le Premier ministre a rappelé, dans le même contexte, que 9 millions d'élèves se rendent quotidiennement dans les écoles et près de 1,5 million dans les universités et bénéficient tous de la gratuité de l'enseignement. Il a relevé, enfin, que «l'école ne peut remplacer les parents et la société en matière d'éducation». 1000 nouveaux médecins spécialistes d'ici à 2014 Evoquant le domaine de la santé qui a connu des progrès considérables, le Premier ministre qui répondait à une interpellation sur le manque de médecins spécialistes, reconnaît, tout comme son ministre de tutelle, cet état de fait et affirme que l'Etat est conscient du problème. «L'Etat œuvre en vue de résorber ce déficit en veillant à ce que les médecins spécialistes s'établissent dans les wilayas du Sud en leur assurant, notamment, le logement.» Il annoncera à cet effet que 10 000 médecins spécialistes sortiront de l'université à l'horizon 2014, soit le double des spécialistes diplômés formés durant les cinq dernières années. Les mesures prises par le gouvernement, notamment dans les secteurs de la santé et de l'enseignement supérieur, donneront des résultats une fois que l'effectif des médecins spécialistes aura doublé d'ici 2014, a-t-il par ailleurs estimé. Evoquant les difficultés rencontrées par les citoyens dans certaines wilayas en raison du manque de médecins spécialistes et de moyens, le Premier ministre a soutenu que l'Etat «fait tout ce qui est en son pouvoir pour remédier à cette situation». Une situation qui diffère d'une wilaya à l'autre, a-t-il estimé, relevant cependant qu'«il n'était pas concevable qu'une wilaya soit dépourvue de toutes les spécialités à la fois».