Les espèces naturelles et les ressources génétiques du Hoggar et du Tassili sont en voie de disparition. La rareté et les spécificités de la composante génétique de l'homme, la faune et la flore de la région lui donnant des capacités de résister aux conditions climatiques rudes font que cette richesse est objet de convoitise et de pillage de la part de plusieurs organismes étrangers qui les transforment en produits industrialisés et mondialement commercialisés. L'absence de texte de loi protégeant ces ressources génétiques est à l'origine de cette perte considérable. Il faut ajouter à la lacune juridique, l'absence d'un inventaire sur la quantité et la composante de cette ressource génétique ainsi qu'une politique d'identification et de préservation de ces espèces. Cette situation déplorable porte une grave atteinte au patrimoine naturel de la région, déjà victime de plusieurs autres fléaux dont l'impact est d'un véritable désastre. La sonnette d'alarme a été tirée par Aissa Abdelguerfi, chercheur, professeur en agronomie - option génétique- à l'institut d'El Harrach, dans une communication intitulée «La gestion des ressources génétiques en relation avec le savoir-faire ancestral» donnée à l'occasion de l'ouverture de rencontres-débats dans le cadre du festival international des arts de l'Ahaggar à Tamanrasset. «La région possède des ressources génétiques qu'on ne trouve pas ailleurs dans le monde. Elles sont objet de pillage énorme qui se pratique par plusieurs pays désirant les étudier pour utiliser leurs spécificités dans l'industrie des médicaments et autres ou bien les développer après avoir connu leurs spécificités et composantes. Des micro-labos sillonnent la région pour extraire cette richesse qui pourtant nous appartient, dans l'impunité totale, au vu et au su de tous», a-t-il indiqué. «L'Algérie a ratifié la convention de Rio sur la biodiversité qui attribue la propriété de ce patrimoine au pays où il se trouve à travers la législation. Le décret sur la convention a été publié en 1995 mais il n'a pas été suivi d'effet puisque aucun texte de loi n'a été élaboré pour s'approprier cette richesse et faire cesser le pillage atroce pratiqué par les autres», a-t-il ajouté en plaidant sur l'urgence de la publication de cette loi car «en l'absence de loi, personne n'est voleur» a-t-il précisé. M. Abdelguerfi est revenu sur l'absence d'une politique visant la protection et la conservation de ces espèces en Algérie. Notre patrimoine génétique est méconnu Il a affirmé que le circuit qui devrait aboutir à la conservation de ces espèces s'interrompt automatiquement au niveau de la collecte. «On collecte des espèces qu'elle soit animale ou végétale mais les moyens de les conserver sont inexistants, alors on les perd et on recommence de nouveau pour s'arrêter au même point», a-t-il affirmé en appelant à une prise en charge réelle et une prise de conscience sur l'importance de cette richesse et les moyens de tirer profit. Le conférencier, très passionné et ayant une bonne maitrise du sujet, a alerté sur une autre perte plus dangereuse. Il s'agit, cette fois-ci, de la perte du savoir-faire, et du traitement de l'homme envers ces espèces, qui n'est plus transmis aux générations de demain. Pour lui, les espèces génétiques se développent et l'homme a cette capacité de s'adapter et de répondre à ces modifications à travers l'observation et les pratiques quotidiennes. Ceci est en voie de disparition en raison de certains comportements visant à changer la vie de ces nomades, qui sont les véritables conservateurs et connaisseurs de cette richesse. «Tout cela fait que notre patrimoine génétique est méconnu, abandonné et méprisé surtout», a-t-il regretté. La conférence a attiré l'attention de l'assistance et a suscité un débat intéressant. M. Abdelguerfi dira que sa conférence s'adresse d'abord aux gens de la région qui doivent prendre conscience et faire l'effort de préserver cette richesse en attendant de trouver le cadre visant à améliorer la situation.