Un décret d'amnistie générale des détenus politiques pour ouvrir la voie à des élections pacifiques au cours de l'année, a été signé samedi par le président tunisien par intérim Fouad Mebazza, selon des médias tunisiens. Cette mesure correspond à une promesse faite par le nouveau pouvoir moins d'une semaine après la chute, à la mi-janvier, du président ben Ali à la suite d'un soulèvement populaire. Cette mesure tend à mettre fin à une ère de répression et fournira le cadre adéquat pour la tenue des élections. Selon des estimations d'organisations de défense des droits de l'homme, le pays comptait un millier de détenus politiques après 23 ans de régime du «raïs» de Carthage qui avait mis hors-la-loi l'opposition islamiste et réprimé d'une main de fer toute voix discordante. Par ailleurs, quelque 15 000 personnes ont manifesté samedi sur la principale artère de Tunis pour dénoncer la mouvance islamiste en appelant à la tolérance en matière confessionnelle au lendemain de l'annonce par le ministère de l'Intérieur de l'assassinat d'un prêtre polonais. «Le terrorisme n'est pas tunisien» et «La religion est une affaire privée», scandait notamment la foule qui réclame une Tunisie laïque. Confronté à une vague de violences depuis la chute de Ben Ali, le gouvernement a appelé «tous les hommes de religion et la société civile» à agir «avec détermination pour éviter que de tels actes ne se reproduisent». Les forces de sécurité sont restées très discrètes aux abords de l'avenue Bourguiba, même si un périmètre de sécurité a été maintenu devant le bâtiment du ministère de l'Intérieur. Trois mille autres manifestants se sont massés devant l'ambassade de France, située à proximité, pour réclamer le départ de l'ambassadeur Boris Boillon, nommé par Paris après le renversement de Ben Ali. Le diplomate français s'est attiré les foudres de la rue en raison notamment d'une vidéo où on le voit tancer des journalistes tunisiens pour leurs questions «débiles» sur la ministre des Affaires étrangères Michèle Alliot-Marie et les liens de Paris avec l'ancien dirigeant tunisien. Plusieurs centaines d'autres manifestants ont réclamé le remplacement du cabinet de transition tunisien, contre lequel une autre marche est prévue dimanche, en dépit qu'elles «restent illégales» en vertu des mesures d'exception prises depuis la révolution, selon le ministre de l'intérieur. Depuis la chute de Ben Ali, la mouvance islamiste tunisienne montre des signes d'organisation. Ces dernières semaines, les islamistes ont ainsi fait pression sur le pouvoir pour fermer au moins trois maisons de passe. Le mouvement islamiste Ennahda a diffusé samedi un communiqué condamnant l'assassinat du prêtre polonais ainsi que la violence observée lors de récentes manifestations islamistes contre les maisons de passe.