Le système LMD doit être placé dans le contexte économique et social du pays. Dans cet entretien, Nabila Bouchaala, enseignante à l'Ecole nationale supérieure de journalisme et des sciences de l'information, explique que la réussite de ce système doit être rehaussée par la disponibilité de moyens pédagogiques et matériels. Le succès du système LMD reste tributaire de l'intégration du mode d'emploi et à l'implication des entreprises pour déterminer les besoins de l'économie. Les besoins du marché ne sont pas connus, d'où la déconnexion entre l'université et les entreprises, a-t-elle expliqué. Le Temps d'Algérie : Comment évaluez-vous le système LMD ? Nabila Bouchaala : Nous avons commencé à appliquer le système LMD en 2004 de manière progressive. Je suis tout à fait d'accord pour dire que le programme de mastère, par exemple, est trop chargé. L'étudiant n'arrive pas à suivre. Dans les écoles supérieures, nous avons beaucoup d'étudiants qui ont commencé une vie professionnelle et ont exprimé le besoin d'approfondir leurs connaissances et se perfectionner. Mais ils ont vite constaté que les programmes sont chargés et que le volume horaire est élevé aussi. Le système LMD a été créé par le système anglo-saxon qui répond aux besoins économiques. L'université forme les employés de demain qui seront au service des entreprises. Chose qui n'a pas été faite en Algérie. Nous ne connaissons pas encore les besoins de l'économie algérienne. La jonction qui devait se faire au départ entre l'entreprise et l'université n'a pas été faite. Ce pont qui devait exister entre le monde économique et l'université n'est pas encore établi. Autrement dit, l'entreprise doit devenir partenaire et discuter avec l'université pour évaluer les besoins de l'économie. Mais nous ne voyons pas que l'entreprise algérienne s'implique dans ce nouveau fonctionnement. Nous avons transposé un système sans essayer de l'appliquer comme il a été prévu dans la société d'origine. L'étudiant en mastère est normalement attaché à l'entreprise où il effectue un stage pratique. L'autre problème est lié au but de l'enseignement du mastère. L'idée de départ est de créer des formations ayant le caractère professionnel. La formation en mastère des écoles est ambiguë. Les écoles offrent jusque-là des formations essentiellement académiques. Il est reproché au système LMD justement de n'être que le système classique auquel on a apporté quelques changements. Qu'en pensez-vous ? Nous constatons d'abord des problèmes au niveau du système pédagogique car il n'y a pas eu de mise à niveau du personnel d'encadrement. Pour les enseignants de mastère, il n'y a pas eu de formation leur permettant d'accompagner les changements. Le déficit d'encadrement doit être rattrapé pour pouvoir encadrer les étudiants du système LMD. Dans quelques années, il y aura des difficultés pour encadrer les étudiants en doctorat LMD car le nombre d'années d'études a été réduit. Les moyens pédagogiques manquent aussi. Au niveau de l'Ecole supérieure de journalisme, par exemple, il est indispensable de disposer de moyens techniques et de laboratoires audiovisuels notamment. Les moyens pédagogiques, qui font jusque-là défaut, doivent pourtant accompagner le passage du système classique au système LMD. Beaucoup d'enseignants s'accordent à dire que l'application actuelle du LMD a révélé des insuffisances. Le ministère de l'Enseignement supérieur a-t-il décidé de lancer un débat pour porter des ajustements qui seront introduits dans les prochaines années universitaires ? C'est l'application actuelle du système qui pose problème. Le bilan a été déjà fait mais il y a eu très peu de débat au sujet de ce système concernant son application. La question qui se pose est liée à la circulation de l'information entre le ministère et l'enseignant. Nous connaissons les insuffisances et il est indispensable d'engager un débat auquel seront associés les enseignants. Les décisions ne doivent pas être prises de manière unilatérale et doivent être élargies à tous les concernés. Comment se présente la recherche scientifique dans le cadre du système LMD ? Dans le cadre du LMD, nous parlons de la recherche action qui doit venir en aide au système social, économique et politique du pays. Les thèses doivent accompagner le développement des segments d'activités et permettre leur développement. Les sujets sont sélectionnés selon des problématiques qui intéressent la société algérienne. Le doctorat doit donc servir la société. Mais ce n'est pas encore le cas en Algérie. Propos recueillis