Hier, dès l'aube, des véhicules des forces de Kadhafi ont été bombardés par la coalition à l'ouest de Benghazi. Des «systèmes clés de la défense antiaérienne et des sites de missiles près de Tripoli, de Misrata, et de Syrte» ont également été attaqués, selon le commandement militaire américain. Un sous-marin britannique a notamment tiré des missiles Tomahawk dans le cadre d'«un raid coordonné contre les systèmes libyens de défense antiaérienne», a précisé le ministère britannique de la Défense à Londres, alors que les forces aériennes britanniques ont annoncé avoir renoncé à mener une opération prévue dans la nuit, en raison de la présence de civils dans le périmètre visé. Pour ce qui est des forces françaises, le ministère de la Défense a annoncé dès les premières heures de la matinée d'hier que les opérations aériennes ont repris. Il faut savoir que les appareils qui décollent des bases sur le territoire français, notamment de Solenzara en Corse et de Saint-Dizier, ont environ trois heures de vol pour arriver sur la zone des opérations. Les dernières frappes de la coalition remontaient à la veille quand un bâtiment administratif situé dans le complexe résidentiel du dirigeant libyen Mouammar Kadhafi à Tripoli a été totalement détruit par un tir de missile. Ce bâtiment était situé à une cinquantaine de mètres de la tente où le colonel recevait en général ses hôtes de marque. Ce tir a-t-il visé directement le locataire de Bab El Azizia ? Toujours selon le ministère français de la Défense, l'objectif de la coalition internationale est de faire appliquer la résolution 1973 de l'ONU sur la Libye et n'envisage «ni de près ni de loin» l'élimination du colonel Mouammar Kadhafi. Même son de cloche du côté du Royaume-Uni. Le chef d'état-major de l'armée britannique, le général David Richards, a exclu que les forces de la coalition prennent directement pour cible le guide de la Jamahiriya, contrairement à ce qu'avaient pu laisser entendre deux ministres, dont celui de la Défense. Interrogé lors d'une conférence de presse au Pentagone, le vice-amiral Bill Gortney a emboîté le pas à ses collègues européens, Kadhafi n'étant pas visé par les frappes de la coalition. Mais ce sont ses forces militaires qu'il faudrait parvenir à isoler. Car celles-ci ne comptent pas rester là. Alors que ces mêmes forces loyales ont été contraintes, hier, de reculer jusqu'à Adjedabia, suite aux bombardements nocturnes de la coalition, elles ont toutefois poursuivi le pilonnage de la région d'Al Jabal Al Gharbi (sud-ouest de Tripoli), en particulier les villes de Zenten et Yefren sous contrôle de la rébellion. Ce, au moment où la situation restait totalement confuse à Misrata, des sources sur place ayant indiqué que les troupes de Kadhafi mobilisaient de force les habitants pour, paraît-il, se servir comme boucliers humains. Ce qui expliquerait que les opérations de la coalition en cours vont traîner en longueur ? Elles dureront encore un certain temps, a lancé le conseiller spécial de Nicolas Sarkozy, Henri Guaino, sur RMC, sans plus de précision. Elles ne sont qu'au début de leur seconde phase qui consiste à couper les lignes de ravitaillement des forces du colonel Kadhafi. Sauf que la poursuite de cette intervention ne réjouit pas l'ensemble de la communauté internationale. Bien que le secrétaire général de l'Onu ait déclaré à partir du Caire que l'intervention en Libye est «un avertissement aux régimes autoritaires», selon l'ONU, beaucoup ne sont pas de son avis. La résolution de l'ONU rappelle «les croisades», a dit Vladimir Poutine, Premier ministre de la Fédération de Russie. Pour sa part, le ministre indien des Affaires étrangères, S. M. Krishna, a appelé à la fin des raids aériens, estimant que les attaques risquent de toucher plus de «civils innocents, de citoyens étrangers et de missions diplomatiques». Force est de reconnaître que le front des antiguerre ne se limite pas à Moscou et à New Delhi. Rome a refusé qu'une «guerre» soit menée en Libye. Le ministre des Affaires étrangères italien, Franco Frattini, a indiqué qu'il veut vérifier la conformité des premiers bombardements avec la résolution de l'Onu. Ce, au moment où Berlin s'est dit conforté dans ses réserves. Face à ces refus en chaîne, le porte-parole du gouvernement français, François Baroin, a expliqué que la coalition internationale est «pleinement dans l'application de la résolution 1973» de l'Onu. Selon lui, «les frappes depuis 48 heures permettent de dire aujourd'hui que nous avons stoppé Kadhafi dans le développement du massacre des civils».