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Salah Assad : «L'EN actuelle défend très bien»
Maroc-Algérie
Publié dans Le Temps d'Algérie le 24 - 05 - 2011

Désigné meilleur ailier du monde au lendemain de la Coupe du monde 82, Salah Assad était promis à une brillante carrière, mais des blessures à répétition ne lui ont pas permis de donner la plénitude de ses moyens.
Après un bref retour dans le football comme manager général du RC Kouba, son club de toujours, Assad s'est complètement retiré du circuit, jugeant le milieu du foot inadapté aux gens intègres.
Après un bref passage au RC Kouba, vous vous êtes complètement éclipsé de la scène sportive. Pourquoi ?
Pour vous dire la vérité, même ce bref passage était presque forcé. Des amis à Kouba m'ont mis la pression pour revenir dans le football, et comme j'en avais besoin aussi j'ai dit oui.
J'en avais besoin parce que je venais de sortir de prison et que ce retour était pour moi une sorte de thérapie, surtout que toute ma vie je n'ai fait que du football. Je ne sais pas faire autre chose.
Ce fut une année très difficile. Je me suis rendu compte qu'en mon absence beaucoup de choses avaient changé et le football est tombé malade jusqu'à la moelle. Il est devenu difficile aux gens du football d'accéder à des postes de responsabilité dans les associations sportives.
Je ne parle pas de la corruption qui gangrène le foot algérien à tous les niveaux ni de l'arbitrage. Pendant une seule saison, j'ai eu ma dose. Donc, pour ne pas perdre l'estime des gens que j'ai acquise pendant de longues années, j'ai préféré me retirer.
Pour faire quoi ?
Je suis toujours dans le sport. Je possède des magasins d'articles sportifs à Alger.
Beaucoup de joueurs ont décidé de se retirer comme vous, à l'instar de Lalmas, Bencheikh et autres. Ne pensez-vous pas que c'est cette politique de la chaise vide qui a laissé n'importe qui gérer le football ?
Vous avez bien fait de me parler d'Ahcène Lalmas. Voilà un joueur qui a été un modèle pour toute une génération et qui a tout donné à l'Algérie pour être en fin de compte victime de marginalisation. Lalmas, c'était l'Algérie dans les années 70 avec sa forte personnalité et sa fierté.
Ce grand homme s'est complètement retiré parce qu'il s'est rendu compte qu'on voulait l'utiliser comme tremplin pour atteindre des postes importants. Tout footballeur intègre et honnête aurait fait comme Lalmas. Un ancien grand joueur comme lui, qui était en parallèle commissaire de police, aurait pu donner beaucoup au football algérien comme dirigeant, mais on ne lui a rien proposé. C'est grave !
On sait que vous vouez un grand respect pour Rachid Mekhloufi. Si demain il revient à la fédération, seriez-vous prêt à travailler avec lui ?
Si on n'a pas profité de Mekhloufi lorsqu'il avait 50, 60 ans, on ne va pas profiter de lui aujourd'hui qu'il a 75 ans et qu'il coule une retraite heureuse. Donc, cette possibilité n'existe pas. Une réforme du football par contre me poussera ainsi que tous les anciens à revenir donner un coup de main.
Vous arrive-t-il de regarder des matchs, notamment ceux de l'équipe nationale ?
Comme tout supporter algérien, je ne rate pas les matchs de l'équipe nationale. Comme tout supporter algérien aussi, je n'aime pas perdre et je veux être toujours le meilleur.
Cela ne m'empêche pas d'être en désaccord avec la politique de la fédération, avec une amicale des anciens footballeurs par-ci, une équipe des capitaines d'équipe par-là. J'ai comme l'impression qu'on veut à tout prix disloquer les anciens footballeurs. Le pire, c'est que ceux qui veulent nous diviser sont là depuis 30 ans, ce n'est pas normal tout ça.
A côté des bons résultats de l'équipe nationale A, il y a des choses qui ne me plaisent pas du tout. Lorsqu'on exige que l'entraîneur national soit titulaire d'une licence CAF, n'est-ce pas une manière de nous écarter ?
Il faudrait aussi arrêter des critères pour le poste de président de fédération, non ? On ne veut pas de nous parce qu'on leur fait de l'ombre, c'est tout. Pourtant, nous avons beaucoup de choses à donner au football, contrairement à ceux qui sont en place.
Il y a eu pourtant une qualification en Coupe du monde...
Cette qualification c'est l'arbre qui cache la forêt. J'ai beaucoup de respect pour les joueurs algériens nés en France et qui viennent défendre les couleurs de l'Algérie avec beaucoup de cœur et d'amour, mais il faut développer le football ici. Dans les années 80, il y avait une cinquantaine de joueurs sélectionnables formés par d'anciens footballeurs. Est-ce le cas aujourd'hui ?
A-t-on un grand choix ? Je ne le pense pas. A notre époque, on pouvait composer jusqu'à trois sélections nationales de bon niveau, uniquement avec les joueurs locaux. Les pros sont des Algériens à part entière, mais on
les a ramenés par accident, il n'y a même pas une politique de suivi des Algériens vivant en France. Sincèrement, je plains le sélectionneur national qui se rend vite compte qu'il doit composer avec uniquement les professionnels qui ont au moins une maturité tactique et l'expérience du haut niveau, car dans le championnat algérien il n'y a rien. Que du khorti !
Quand vous entendez des joueurs comme Brahimi ou Feghouli hésiter à jouer pour l'Algérie, comment réagissez-vous ?
Moi, j'ai toujours dit que le meilleur exemple pour les joueurs algériens nés en France c'est Mustapha Dahleb. C'était une star du PSG, mais cela ne l'a pas empêché de venir passer son service national en Algérie et de répondre présent dans les 24 heures à chaque fois que l'équipe nationale avait besoin de lui. Il y a d'autres joueurs comme Kourichi et Mansouri qui pleuraient pour venir jouer en équipe d'Algérie.
A l'époque, la moindre hésitation coûtait la mise à l'écart pure et simple. Aujourd'hui, la venue de tel ou tel joueur est devenue un feuilleton. Dans un passé récent, des joueurs ont attendu l'équipe de France pendant des années, et quand ils ont perdu espoir ils se sont rabattus sur l'Algérie juste pour ajouter le statut d'international à leur CV. C'est grave !
Cette équipe nationale composée pratiquement de joueurs nés en France est quand même arrivée à se qualifier en Coupe du monde…
En tant que supporter algérien, j'ai été fier de cette qualification car, comme je viens de le dire, ces joueurs nés en France ont prouvé leur amour pour l'Algérie et c'est le plus important à mes yeux. L'amour du maillot c'est essentiel, qu'on soit nés ici ou là-bas.
Abedi Pelé avait déclaré un jour que l'actuelle équipe nationale algérienne ne pourra jamais rivaliser avec la vôtre…
Je me rappelle de Pelé lorsqu'il avait commencé à jouer avec le Ghana lors de la CAN 82. A cette époque, il était tout jeune mais il nous regardait déjà avec des yeux admiratifs. Pour répondre à votre question, je vais vous raconter une anecdote :
une fois, un jeune est venu me dire la même chose après la qualification de l'équipe nationale au Mondial sud-africain. Je lui ai dit : écoute mon fils, il ne faut jamais comparer les deux équipes. Toutefois, les joueurs actuels ne doivent pas oublier leurs aînés en en faisant des modèles. Nous, dans les années 80, notre modèle c'était l'équipe du FLN.
Aujourd'hui, nous devons servir d'exemple à cette génération. Malheureusement, certains veulent à tout prix effacer l'histoire. Avec rien, nous nous sommes qualifiés deux fois en Coupe du monde et cinq fois à la CAN, cela personne ne peut l'effacer. Les jeunes ne doivent pas l'oublier pour faire plus que nous incha Allah, car le football algérien ne s'est pas arrêté en 82.
Y a-t-il des joueurs qui vous ont appelé pour vous demander des conseils ?
Oui. Avant la CAN en Angola, Yazid Mansouri et Anthar Yahia m'ont appelé. C'était pour discuter seulement et j'en ai profité pour leur rappeler les attentes du peuple algérien avant cette compétition. Je leur ai glissé quelques conseils qui pouvaient leur servir, notamment pour leur première participation en Coupe du monde.
J'avoue que lorsque la personne qui me les a passés m'avait dit que Yahia et Mansouri voulaient me parler, j'étais très touché. Cela prouve que l'actuelle génération n'a pas oublié les anciens, car j'ai senti dans leur voix de l'admiration et un grand respect pour ma modeste personne.
Que craignez-vous pour l'équipe d'Algérie le 4 juin à Marrakech ?
Vous savez, l'actuelle équipe défend très bien. Son problème c'est devant. Nous sommes capables de jouer pour ne pas encaisser, mais faut-il se contenter de jouer le nul ? Moi, je dis non. Il faut donc trouver des solutions pour marquer.
Le problème de l'attaque c'est la qualité des joueurs ou la tactique adoptée ?
Un peu les deux. Il faut donc changer et essayer de jouer comme on l'avait fait contre l'Egypte à Blida avec deux attaquants de pointe et Ziani juste derrière pour les alimenter en passes dans les espaces.
Un attaquant comme Djebbour, on ne lui donne pas assez de bons ballons dans la course, il faut savoir jouer sur ses qualités et mieux exploiter un jeu fait de débordements sur les côtés.


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