La production aurifère en Algérie connaît une grave crise. La réduction de la production annuelle ne pousse pas à l'optimisme. De grandes inquiétudes sont exprimées sur la situation du plus grand gisement d'exploitation d'or d'Amesmessa de l'Entreprise nationale de l'or (ENOR), dans la wilaya de Tamanrasset, qui connaît une dégradation progressive. Le gisement a connu, ces dernières années, une importante réduction de la production estimée à plus de 50% annuellement. Après avoir atteint un rendement de près de 130 kg entre 2006 et 2010, la production n'a pas dépassé 35 kg durant le premier semestre de l'année en cours. Des doutes s'installent sur la concrétisation des prévisions faites et annoncées par l'ancien ministre de l'Energie et des Mines, Chakib Khelil, lequel avait promis d'atteindre une production record estimée à 1800 kg en 2011. Des sources bien informées affirment que «la mauvaise gestion» est à l'origine de la dégradation de la situation dans ce gisement. L'unité en question ne dispose pas d'un atelier performant de maintenance pour le matériel utilisé dans l'exploration des mines d'or. Les équipements utilisés depuis 2006 sont vétustes et beaucoup sont à l'arrêt en raison du manque cruel de techniciens spécialisés dans la réparation de certaines machines exportées, et qui sont indispensables dans le processus d'exploration. Cela a fait que des pelles, des engins et autres matériels ne sont plus exploités par les travailleurs de ce gisement. Comme solution de rechange, les responsables de cette usine ont eu recours à la sous-traitance. Une procédure s'est soldée par l'entrée en course d'un entrepreneur de Biskra qui opère sur le gisement avec son matériel et son personnel. Absence de matériel ? Depuis le retrait des travailleurs canadiens du gisement en 2009, l'exploration de l'or est devenue une tâche extrêmement difficile. Les fêlures réalisées par les Canadiens permettaient l'extraction d'une bonne quantité d'or. L'Enor n'a pas pu avancer grandement sur ce chantier et les failles réalisées depuis quelque temps sont trop exiguës et ne permettent pas d'avancer ni avec la même cadence ni avec la même facilité de travail. On déplore également l'absence de normes dans le traitement de l'or par le système de raffinage et de purification mis en place à cet effet. L'opération consistant à séparer l'or du minerai après son retrait des gisements ne se fait pas selon des normes connues mondialement, en raison de l'absence de spécialistes capables de détecter les défauts que présentent les machines importées d'Arabie saoudite et d'Afrique du Sud. Menace de grève... S'ajoute aux problèmes techniques le grand malaise social qui s'installe au sein de l'entreprise. Les 600 travailleurs employés dans ce gisement sont sous la menace d'un arrêt total ou cyclique de l'activité dans cette usine. Les informations ou «rumeurs» qui circulent ces derniers mois à ce propos les déstabilisent énormément. L'arrêt de cette usine signifie des coupures de vivres pour des milliers de familles qui se nourrissent, se soignent et arrivent encore à préserver leur dignité grâce à ce travail décent. La situation de crise que vit le gisement a eu des répercussions négatives sur les travailleurs qui ont des retards de salaires, n'ont pas bénéficié des différentes augmentations annoncées dans le secteur et n'ont pas vu leurs primes versées depuis mars 2011. Ceci s'ajoute à la dégradation des autres services assurés par l'entreprise, dont la restauration. Complicité ou non avec l'administration ? Le syndicat de l'entreprise est pointé du doigt et accusé de complicité avec l'administration sur la situation de l'usine et le devenir des travailleurs. L'atmosphère de psychose et le flou qui règnent dans cette usine les a amenés à ne plus croire aux initiatives de l'entreprise même celles qui concernent leur situation socioprofessionnelle. La dernière décision émanant du ministère portant sur la titularisation des travailleurs n'a eu aucun effet sur eux, car ils ne croient plus en rien. Les travailleurs ont menacé à maintes reprises d'observer des mouvements de protestation contre ces conditions de travail qu'ils jugent déplorables. Ils n'écartent pas le recours à une grève dans les prochains jours s'ils ne constatent pas une amélioration de la situation de l'entreprise. Le gisement d'Amesmessa est situé dans la localité de Tinzawatine, à 460 km du centre ville de Tamanrasset. C'est la seule industrie existante dans cette localité et la seule industrie lourde dans la région, qui a apporté énormément de choses à la population locale. Quelles perspectives ? Le gisement a permis de créer près de 600 postes d'emploi des différentes wilayas du pays. Il a d'autres énormes potentialités pouvant absorber définitivement le taux de chômage dans la région. Les techniciens qui opèrent dans ce site ont acquis des connaissances, de la maîtrise et un savoir-faire appréciables dans l'exploitation aurifère, mais le manque flagrant d'équipements les a freinés dans le développement de ce secteur. Aucune extension n'a été réalisée à ce jour en dépit de la richesse de la région en la matière. L'absence de formation qualifiante est également déplorée dans ce secteur. Le projet de réalisation d'un centre de formation n'a jamais vu le jour dans cette wilaya alors qu'il devait être déjà opérationnel. Le gisement a été créé grâce à une coopération entre l'Enor et une entreprise canadienne dans une conjoncture marquée par l'encouragement de l'investissement étranger en Algérie. La production est exonérée de tous les droits de fiscalité pendant une durée de 10 ans. Beaucoup d'interrogations sont suscitées sur le devenir de ce gisement en particulier et l'exploitation aurifère en général. La production se dégrade alors que la région constitue une grande richesse en la matière. Cela intervient au moment où les prix de l'or ont atteint un niveau record sur les marchés mondiaux. Aucune stratégie n'a été tracée pour exploiter ces quantités importantes d'or et les écouler sur les marchés internationaux. Aucune perspective n'est prévue pour le placement de l'or algérien comme une réserve intangible. Des craintes sont également exprimées sur l'exploitation du gisement de Tiririne, dans la daïra de Tazrok, par un investisseur libanais qui vient de renouveler son contrat d'exploitation obtenu il y a trois ans alors qu'il n'a rien fait sur le site. De nos envoyées spéciales :