Des centaines d'Egyptiens se sont rassemblés, hier, à la place Tahrir pour réclamer un calendrier précis en vue de l'instauration de la démocratie et la fin des procès militaires intentés à des civils. Les organisateurs des manifestations, qui ont contraint Hosni Moubarak à céder le pouvoir aux militaires, le 11 février dernier, ont baptisé leur dernier mouvement «Corriger le tir». Il donnera un aperçu de la popularité du Conseil suprême des forces armées (CSFA), après l'ouverture du procès de l'ex-président. Les Frères musulmans, mouvement le mieux structuré de la scène politique égyptienne depuis la dissolution du Parti national démocrate, dont Hosni Moubarak était issu, n'ont pas souhaité s'associer au mouvement. «Le peuple veut purifier l'Etat», pouvait-on lire sur l'une des banderoles brandies par les centaines de manifestants qui ont afflué place Tahrir, épicentre de la contestation contre le régime Moubarak cet hiver. Aucun policier n'était visible. Selon le ministère de l'Intérieur, les forces de l'ordre ont évacué les lieux jeudi soir pour 24 heures à l'occasion du rassemblement. Aux yeux de nombreux Egyptiens, la «révolution du Nil», qui fit 850 morts, tarde à porter ses fruits et beaucoup soupçonnent l'armée de chercher à se maintenir au pouvoir après les élections législatives et présidentielle promises avant la fin de l'année. Plusieurs milliers d'entre eux ont campé plusieurs semaines place Tahrir cet été pour réclamer une accélération des réformes démocratiques et des procédures judiciaires entamées à l'encontre des caciques de l'ancien régime impliqués dans la répression du soulèvement ou soupçonnés de corruption. Le CSFA a récemment fait savoir que les manifestations pacifiques seraient permises, mais qu'aucun débordement ne serait toléré. Selon les organisateurs, un trentaine de mouvements et de partis politiques devaient participer au rassemblement de vendredi. Parmi eux, le Front démocratique a invité les militaires au pouvoir à préparer «un calendrier complet détaillant les étapes de la transition, à commencer par l'élection présidentielle». Mohammed ElBaradeï, candidat à la magistrature suprême et ancien directeur général de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), a jugé leur mobilisation justifiée. Mohamed Saad el Katatni, secrétaire général du Parti pour la liberté et la justice, mis sur pied par les Frères musulmans dans l'optique des législatives de novembre, a en revanche prôné la patience, dans la mesure où les précédentes manifestations ont déjà donné des résultats.