La population de la commune de Fréha, à une trentaine de kilomètres à l'est de la ville de Tizi Ouzou, est sous le choc, suite à la «bavure» que vient de commettre un militaire. Dimanche soir, alors qu'elle était de retour d'un domicile mortuaire en compagnie de deux cousines, Zahia Kaci, née Ebessaine, âgée de 55 ans et mère de 14 enfants (9 filles et 5 garçons), a été touchée de plusieurs balles dans le dos, tirées par des soldats appartenant au 43e bataillon de parachutistes de la 1re Région militaire, à Fréha. La victime a rendu l'âme sur le coup. C'est aux environs de 22 heures, alors que les trois femmes étaient de retour d'une veillée funèbre, à leur passage devant la caserne militaire, non loin de leurs domiciles, des soldats ont ouvert le feu de l'intérieur de la caserne. Selon les témoignages de Fetta et Ouardia, qui étaient en compagnie de la victime, «tout se passait bien depuis le retour et rien n'indiquaient qu'une chose pareille allait se produire». «Mais tout d'un coup, poursuit Fetta, alors qu'on s'éloignait carrément de la caserne nous avons entendu des manœuvres d'armes suivies de tirs nourris de kalachnikovs. On s'est jeté par terre pour éviter les tirs, malheureusement Zahia a été touchée et a rendu l'âme sur le coup.» Elle ajoutera avoir entendu d'autres militaires essayé d'alerter leurs collègues d'arrêter le feu, mais en vain. «Ne tirez pas ! Ne tirez pas ! ce sont des femmes ! criaient des soldats», nous explique Fetta, encore sous le choc, et ne pouvant retenir ses larmes. Pour Ouardia, «c'est vraiment affreux ce qui vient d'arriver». Cette dernière s'est évanouie en arrivant chez elle. La clôture de son domicile, a-t-on constaté sur les lieux, a été touchée de plusieurs balles. D'après les dires des femmes et des citoyens qui nous ont accompagné jusqu'au lieu où est tombée Zahia, il s'avère que les trois femmes ont suivi un chemin à proximité de la caserne et sont même passées en bas des quatre postes de garde. Les soldats se trouvant à l'intérieur savaient bien qu'il s'agissait d'un groupe de femmes de retour du domicile mortuaire. Et c'est qu'en passant près du cinquième poste que les tirs ont commencé. La bavure de trop Juste après la «bavure», des militaires sont sortis pour prendre le corps de la malheureuse femme à l'intérieur. Un cousin de la défunte, alerté par les deux femmes, s'est rendu devant la caserne mais a été humilié et agressé par des soldats. «En arrivant devant le portail, et avant même de descendre de mon tracteur, un soldat m'a giflé», raconte Hend. K. Et d'ajouter : «Ils (les soldats, ndlr) m'ont conduit de force à l'intérieur et m'ont tabassé. Ils ont aussi confisqué mon téléphone portable et ce n'est que grâce à la mobilisation des citoyens qui se sont rendus sur les lieux, que j'ai été relâché deux heures après.» Transférée au CHU Nedir-Mohamed de Tizi Ouzou, le soir même, la victime a été enterrée hier après-midi à Fréha dans un climat de colère. La population réclame la vérité et exige que toute la lumière soit faite sur la mort de la quinquagénaire. Les autorités de wilaya, représentées par le wali Abdelkader Bouazghi, ainsi que le P/APW Mahfoud Belabbas, se sont rendus au domicile familial de la défunte et ont assisté à son enterrement. Le premier responsable de la wilaya a présenté des excuses officielles de l'Etat à la famille. Plusieurs élus locaux ont tenu aussi à apporter leur soutien à la population en cette douloureuse circonstance. Le sénateur Mohand Ikherban s'est rendu à Fréha pour présenter ses condoléances à la famille de la victime. Par ailleurs, l'auteur présumé de la «bavure» aurait été arrêté durant la journée d'hier suite à l'enquête déclenchée par la brigade de gendarmerie de Fréha, indiquent des sources judiciaires. Il sera présenté devant le tribunal militaire dans les jours qui viennent, précise-t-on. Cette bavure militaire intervient, faut-il le rappeler, moins de trois mois après celle contre un citoyen de la même daïra d'Azazga. Mustapha Dial, âgé de 42 ans, père de 4 enfants et ouvrier de son état, a été tué lors de l'attentat qui a ciblé, le 23 juin, un convoi de l'ANP à moins d'une centaine de mètres de l'hôpital de la ville. Hier en fin d'après-midi, les citoyens de la commune de Fréha n'avaient encore rien décidé. Un mouvement de protestation est attendu du fait de la grande colère des citoyens, mais, «la vigilance est de mise. Il ne faut pas laisser place à la précipitation», estime un cousin de la victime. L'époux, les fils et les filles de la défunte, encore sous le choc, ne pouvaient rien déclarer à la presse locale.