Qui tient tant à manipuler l'affaire de l'assassinat des 7 moines de Tibhirine, au point de défier les preuves concrètes et matérielles attestant d'une vérité qui n'arrange, il est clair, pas les choses pour ceux qui continuent de tenter d'imposer le doute et la déstabilisation en Algérie ? Ceux-là mêmes (et leurs commanditaires), dont le journaliste et réalisateur Jean-Baptiste Rivoire, qui n'ont pas hésité, avant-hier, de plonger dans le ridicule, à travers une émission diffusée sur la chaîne de télévision Canal+, pour arriver à leurs fins. Emission diffusée à l'occasion de la sortie d'un nouveau livre de Jean-Baptiste Rivoire, Le crime de Tibhirine, accusant les services algériens d'être responsables du massacre des 7 moines de Tibhirine. Cette émission annoncée comme «contre-enquête» (car des enquêtes, des vraies, il y en a eu, comme celles menées par Didier Contant, retrouvé mort) sur l'assassinat des 7 religieux, tentant d'imputer le massacre aux services de renseignements algériens, a cumulé des lacunes qui en disent long sur le «sérieux» des «investigations». Sur les plans professionnels et de la déontologie, certaines erreurs et contradictions méritent d'être soulevées pour éclairer l'audimat algérien et étranger sur un dossier très sensible qui exige dans son traitement une responsabilité à l'égard de l'histoire et de l'opinion pour ne pas tomber dans le piège de blanchir le Groupe islamique armé (GIA) qui a assassiné horriblement des milliers d'Algériens y compris des bébés et des enfants. En effet, ce documentaire d'une durée de 58 minutes n'a été finalement que des redits, en d'autres termes, du vieux pour faire du neuf, pour ne pas dire pour accomplir une mission aux visées inavoués. C'est ainsi que 31 minutes sont des images d'archives et quatre autres, consacrées aux photos figées. La nouveauté n'a commencé qu'à la 13e minute. Les téléspectateurs ayant suivi l'émission auraient suivi la présentation de deux témoins qui auraient, selon le journaliste Jean-Baptiste Rivoire, participé à l'enlèvement des moines. Ils ont été présentés sous les pseudonymes de Rachid et le lieutenant Kamel, come étant «des anciens du CTRI (Centre territorial de recherche et d'investigation) de Blida. Pourquoi se cachent-ils alors qu'Abdelkader Tigha et Karim Moulay ainsi que Mohamed Samraoui (présentés comme étant des transfuges des services de renseignements algériens) ont témoigné à visage découvert ? Pourquoi ce traitement sélectif des témoins clés qui seraient tous du DRS (Département du renseignement et de sécurité), services de renseignements algériens ?
La fausse voix d'El Para et l'informateur de la DST Y a pas que ça. La voix qu'on entend dans l'enregistrement des moines n'est pas celle d'El Para puisque ce dernier a la voix de l'est algérien (comme en témoigne la bande sonore du document de l'émission «Envoyé Spécial», intitulé Le Ben Laden du désert, diffusée par la chaîne de télévision France 2 en décembre 2004». La voix dans l'enregistrement proposé par Rivoire est bel et bien celle de Yacoub de Birkhadem, de son vrai nom Beladci Hacène, chargé de la séquestration des moines depuis leur arrivée à Bougara (Blida), jusqu'au jour de leur assassinat, et par la suite leur étêtement. Le journaliste réalisateur Rivoire a, par ailleurs, présenté un témoin comme étant un haut responsable de la DST (Direction de la surveillance du territoire, services secrets français), sous couvert de l'anonymat. Pourquoi Rivoire a protégé son interlocuteur de la DST ? Selon certaines informations, c'est parce que tout simplement il s'agirait du préfet Remy Pautrat, ex-numéro 2 du secrétariat général du ministère français de la Défense qui a rapporté le fait que Lamari s'était vanté auprès de Raymond Nart, l'inamovible n° 2 de la DST, de contrôler le GIA. Sur ce point, il faut revenir sur les propos de Nicole Chevillard, parente de l'un des moines assassinés, qui atteste que ce type de propos lui ont été tenus par Remy Pautrat, du secrétariat général de ministère français de la Défense, reprenant pour sa part les propos de Raymond Nart. Où est donc l'enquête que Rivoire se vante d'avoir menée ? En effet, lors du procès de Rachid Ramda dans les attentats du RER Saint Michel, il a été révélé le caractère moqueur et menteur de Raymond Nart. La copie du procès reprenant les propos de Nicole Chevillard, diffusée sur le site hostile Algeria Watch. Rivoire aurait dû se documenter pour s'éviter le ridicule. Ensuite, pour rafraîchir la mémoire de Rivoire, la cour a entendu François Geze, membre d'Algeria Watch, puis Rémy Pautrat. Ce dernier s'est insurgé qu'on ait osé le déranger en le convoquant à ce procès, alors que ses fonctions en 1995 au SGDN (Secrétariat général du ministère français de la Défense) n'avaient rien à voir avec la gestion des attentats de 1995, rappelle-t-on. Nicole Chevillard a ajouté que «pour le reste, il ne se souvient de rien. Ni de m'avoir rencontrée, ni d'avoir financé une étude à la demande de la DST», et d'ajouter qu'à toutes les questions qui lui ont été posées, il a répondu la même chose sur un ton de plus en plus excédé. C'est bien que son audition a très vite tourné court». «Quand je suis allée le voir à la sortie, il s'est montré pareillement indigné, m'accusant d'être la personne qui avait contribué à ce qu'il soit dérangé. Et comme il était bras dessus bras dessous avec Jean-François Clair qui a répondu à sa place : «Vous savez, il ne faut pas toujours croire à ce que raconte Raymond Nart ! Il aime plaisanter», note Nicole Chevillard dans son témoignage.
Le cas de Mohamed Samraoui Mohamed Samraoui, présenté comme transfuge du DRS par les partisans du «qui tue qui ?» est présenté par Jean-Baptiste Rivoire comme «témoin clé» dans l'affaire de l'assassinat des 7 moines de Tibhirine. Il faudrait rappeler le faux témoignage de Mohamed Samraoui dans l'affaire du diplomate algérien Mohamed Ziane Hasni qui a été acquitté par la justice française. Le diplomate algérien avait, rappelle-t-on, été injustement empêché de rentrer dans son pays, son passeport confisqué, à cause du faux témoignage. La volonté douteuse de dédouaner le GIA, «ascendant» du GSPC Il est, éventuellement, utile de rappeler à Rivoire que dans un entretien accordé le 2 septembre au journal francophone marocain Libération, Karim Moulay, a déclaré ne pas avoir les informations affirmant la responsabilité de telle ou telle partie dans l'assassinat des moines. «Je ne pourrais évidemment pas me prononcer sur un événement dont je n'ai pas les détails qui me permettraient d'affirmer qu'il a été l'œuvre de telle partie ou de telle autre», a-t-il annoncé au journaliste de Libération. Jean-Baptiste Rivoire ne l'entend pas de cette oreille et veut l'impliquer, coûte que coûte, dans l'accusation du DRS dans l'assassinat des 7 moines de Tibhirine, et dédouaner, pour des raisons ignorées, les vrais auteurs du massacre, les terroristes du GIA, en l'occurrence, organisation terroriste qui a donné naissance au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC ou Aqmi). Le même GSPC qui, sous l'appellation d'Al Qaïda au Maghreb islamique est l'un des bénéficiaires des armes larguées par l'armée française, il y a quelques mois, en Libye, en plein conflit armé. Jean-Baptiste Rivoire va à l'encontre des déclarations de Karim Moulay en rapportant que ce dernier accuse les services algériens d'être derrière le massacre des 7 moines. Un autre point mérite d'être soulevé. Durant les 58 minutes de son reportage diffusé avant-hier sur Canal +, Jean-Baptiste Rivoire n'a pas prononcé un mot sur l'émissaire du GIA, un certain Abdallah, qui a été reçu à l'ambassade de France ni celui dépêché par les autorités françaises pour rencontrer Djamel Zitouni, alors émir national du GIA, dans son fief et négocier la libération des trappistes à l'insu des services secrets algériens. Or, il a affirmé, dans une interview publiée le 18 septembre dernier par le journal régional français Le progrès, que «les responsables des ravisseurs ont appris, fin avril 1996, que la France avait envoyé un de ses agents pour essayer de négocier avec Djamel Zitouni». Pourquoi occulter un détail d'une telle importance ? Est-ce une sous-estimation des choses ou un service recommandé par les Français, M. Rivoire ? Jean-Baptiste Rivoire doit écouter sa conscience et non les instructions, pour répondre aux questions. Comme il doit écouter sa conscience dans la mort de Didier Contant, victime des partisans du «Qui tue qui ?» dont Rivoire fait partie.