L'initiative du ministre français de la Défense, Gérard Longuet, visant à transférer les cendres du tortionnaire, le général Marcel Bigeard, à l'Hôtel des Invalides à Paris où reposent les gloires de l'armée française, a suscité la réaction des hommes politiques, des intellectuels, des journalistes et des historiens français et algériens. Ces derniers ont lancé un appel pour exiger «que le gouvernement français renonce à cette initiative historiquement infondée, politiquement dangereuse et humainement scandaleuse.» Le dernier vœu de ce criminel de guerre, mort en juin 2010, qui souhaitait que ses cendres soient dispersées au-dessus de Dien Biên Phù, n'a pas été exaucé. Les autorités vietnamiennes s'y sont fermement opposées. Le transfert du corps de ce criminel confirmé le 19 novembre dernier par le ministère de la défense a été mal accueilli par les français et les algériens. Ces derniers interprètent cette initiative comme une tentative visant «à glorifier un homme très connu pour les atrocités et crimes de guerre qu'il a commis au Vietnam mais également durant la guerre d'Algérie.» Le sinistre général était à l'origine notamment de la lâche exécution de Larbi Ben M'hidi. Un témoignage en 2000 de Paul Aussaress, membre des services spéciaux, révèle comment Ben M'hidi a été exécuté dans une ferme à une vingtaine de kilomètres d'Alger par Bigeard. Les exécutions de beaucoup d'autres algériens avec tortures et autres pratiques criminelles ont été également dévoilées par Aussaress. En réaction à cette initiative, des historiens, journalistes, hommes politiques, journalistes algériens et français ont adressé un appel au gouvernement français afin qu'il révise sa position vis-à-vis de cette initiative «historiquement infondée, politiquement dangereuse et humainement scandaleuse». Cette décision prise par le ministre français de la défense et qui intervient après la loi du 23 février 2005 glorifiant la colonisation de l'Algérie, et après les stèles de Marignan et d'ailleurs honorant la mémoire des membres de l'OAS (Organisation armée secrète) a suscité la colère et l'indignation du collectif qui affirme que «cet acte relève de la falsification de l'histoire», estimant dans ce sens que «le général Bigeard est classé dans la catégorie des criminels de guerre au vu des exactions et crimes qu'il a commis durant sa carrière militaire, notamment en Indochine et en Algérie, et plus exactement durant la bataille d'Alger en 1957 où il s'illustra par ses méthodes de tortionnaire avec le consentement du gouverneur général et ministre Robert Lacoste et sous les ordres du général Massu». Hormis Aussaress, le témoignage de Paul Teitgen, secrétaire général de la préfecture d'Alger, chargé de la police, d'août 1956 à septembre 1957 confirme «les odieux crimes commis par Bigeard alors à la tête du 10e bataillon de parachutistes». Cependant et de son vivant, Bigeard a toujours nié les faits qui lui étaient reprochés. Il le confia également en 2002 à la sœur de Ben M'hidi qui était accompagnée de son époux. Le collectif, en mettant en exergue le passé criminel de Bigeard, exprime son indignation au gouvernement français et au président français Nicolas Sarkozy, l'invitant «à ne pas souiller le sol où sont enterrés les héros français». Comment expliquer que le gouvernement français ait refusé d'enterrer le général Jacques de Bollardière qui fut, pendant la guerre d'Algérie, le seul officier supérieur à avoir condamné ouvertement la pratique de la torture ? Sa prise de position publique lui valut une sanction de 60 jours d'arrêt. Ses cendres ne sont pas aux Invalides mais son nom est donné à une intersection en France. En effet, le Conseil de Paris a décidé, à l'unanimité, de baptiser «Général-Jacques-Pâris-de-Bollardière» le carrefour entre les avenues de Suffren et de la Motte-Picquet (VIIe et XVe arrondissements). L'inauguration a eu lieu le 29 novembre 2007.