La Libye fête le premier anniversaire de sa «révolution du 17 Février», mais des inquiétudes demeurent sur l'avenir du pays confronté à de nombreux défis pour assurer sécurité et stabilité et fonder un Etat de droit. Les conséquences de la guerre libyenne sont importantes pas uniquement sur la Libye, mais également sur toute la région du Sahel qui souffre aujourd'hui de l'insécurité et des actes de terrorisme. Des quantités importantes d'armes et de missiles ont été volés, posant ainsi un risque majeur à la sécurité de la région. Sur le plan politique, le pays ne connaît aucune avancée. La violence ambiante est récurrente. Le président du CNT, Mustapha Abdeldjalil, a failli être lynché, il y a quelques semaines, par des rebelles qui ont poussé son adjoint, Abdelhafid Ghoga, à la démission. La guerre a provoqué des dégâts énormes à la société libyenne. Des milliers de personnes se retrouvent sans aucun soutien, alors qu'auparavant les Libyens étaient les mieux servis dans le monde avec un niveau de vie comparable à celui des pays européens, malgré l'absence de libertés sous Kadhafi. Le «vent de liberté» qui a soufflé sur ce pays a laissé des séquelles et des actes atroces qui ont ébranlé le monde entier, notamment le nombre de victimes dues aux bombardements des avions de l'Otan, dont des enfants, des personnes âgées et des fonctionnaires. Les conflits entre partisans et opposants à l'ancien guide libyen auraient causé plus de 100 000 blessés et plus de 30 000 morts, selon des chiffres non officiels. Aujourd'hui, rien ne présage d'un avenir meilleur. La Libye souffre de l'absence d'institutions et de modèle. Elle est livrée à la merci des «thowars», qui tiennent à leurs fiefs et au pouvoir arraché par les armes. Les milices renforcent d'ailleurs leur arsenal et comptent peser sur un CNT obligé de composer et de tergiverser pour éviter l'implosion du pays. Les affrontements se multiplient, et les milliers d'armes de guerre volatilisées dans la nature sont une grande source d'inquiétudes. Un arsenal important a été récupéré par la nébuleuse d'Al-Qaïda, dont des missiles sol-air, alors que des éléments incontrôlés menacent toute la région. La détérioration de la situation au nord du Mali est par exemple un dégât collatéral de l'instabilité induite par le conflit libyen. L'incursion terroriste en Tunisie et les menaces qui pèsent sur ce pays également. La Tunisie vient dans ce contexte de démanteler un réseau de terroristes islamistes qui constituait des armements pour fonder «un émirat islamiste dans la région du Maghreb». La prolifération des milices d'ex-rebelles, qui font la loi en Libye, est une autre réalité douleureuse, surtout que chaque milice a réussi à s'emparer d'un bien économique, hôtels, usines, aéroports, région pétrolière... L'activité économique réduite à néant et le manque de ressources financières sont une autre source d'instabilité. L'Union européenne étant empêtrée dans la crise ne peut rien pour les Libyens, et les discours de Sarkozy et de Cameron à Tripoli semblent remonter à des années-lumière. Le Qatar, lui, se taille des fiefs et aide ses affidés, à l'image de Abdelhakim Belhadj, qui est devenu le régent de Tripoli, alors que Doha est actuellement le vrai maître de la Libye. «Les milices ont pris les armes pour se libérer du joug de la dictature. Mais quand ils ont obtenu la liberté, ils n'ont pas lâché les armes», déplorent aujourd'hui des tripolitains. Au terme d'un conflit sanglant, certains n'écartent pas le risque d'une autre rébellion qui veut venger la mort de milliers de Libyens et se libérer du pouvoir des «pays amis de la Libye». Des milices très armées n'hésitent pas à sortir l'artillerie lourde au moindre conflit d'intérêt, faisant à chaque fois des victimes, et le CNT est discrédité. Les prisonniers libyens, dont des combattants et des partisans de l'ancien régime, dont certains ont été torturés à mort, ne font qu'accentuer le malaise dans la «nouvelle Libye».