On est loin de l'austère Buckingham Palace: le petit palais de Kensington, qui rouvre lundi prochain au public après deux ans de travaux, offre depuis 300 ans un cadre presque intime à la monarchie britannique, de la reine Victoria à Diana, et bientôt Kate et William. Le visiteur curieux risque d'être déçu: la partie privée du palais, où le fils aîné de Diana et son épouse doivent emménager en 2013 dans l'appartement 1A est soigneusement préservée des regards, tout comme les appartements où "Lady Di" a vécu jusqu'à sa mort en 1997. Les photos de l'époque montrent le jardin jonché de fleurs déposées par les Britanniques en deuil. Si le palais de Kensington, dans le cœur de Londres, lui rend hommage, c'est presque à la dérobée, dans une petite pièce au bout d'un étroit couloir. Cinq robes emblématiques portées par Diana sont présentées comme dans un écrin, choisies comme autant d'"exemples de son évolution, au fur et à mesure qu'elle devient plus sûre d'elle et affirme son style", explique Alexandra Kim, l'une des conservatrices. Le contraste est saisissant entre la jeune princesse aux yeux baissés, moulée dans une longue robe noire signée David Emanuel pour sa première sortie officielle avec Charles, et l'icône de mode, en petite robe noire très moderne dessinée par son ami Gianni Versace, en 1995. Une grande photographie de Diana par Mario Testino de 1997 offre un portrait inhabituel de la princesse, très naturelle, un grand sourire aux lèvres. Juste en face, le même photographe, ami de la princesse, a fait le portrait de fiançailles de William et de Kate Middleton en 2010. Auront-ils un enfant? La question résonne de siècle en siècle dans chaque pièce du palais. Déjà, en 1689, lorsque William III et Mary II rachètent l'hôtel particulier niché dans les jardins de Kensington, fuyant la solennité du palais de Whitehall, la question les poursuit. Ils n'auront pas d'enfant. La couronne revient alors à la sœur de Mary, Anne, qui en dépit de ses 18 grossesses, n'aura pas non plus d'héritier. Son seul enfant à avoir survécu quelque peu, William, meurt cinq jours après son onzième anniversaire... Les potins chuchotés par d'invisibles haut-parleurs rappellent au visiteur la présence de la noblesse de cour, tout au long de la visite des appartements royaux. Une mise en scène théâtrale, où de petites chaises d'enfants évoquent les 17 bébés disparus, éveille l'intérêt. Une exposition spécifique est consacrée, à l'occasion cette année du jubilé de diamant de la reine Elizabeth II, à sa glorieuse ancêtre Victoria. Les images -déjà filmées- de la procession pour le jubilé de Victoria de 1897 font écho aux soixante ans de règne d'Elizabeth, qui seront fêtés au mois de juin. Si tout va bien, Elizabeth surpassera en 2015 le record de longévité sur le trône de son ancêtre. Victoria est née à Kensington Palace, mais le charmant palais n'a pas su égayer une enfance solitaire. La jeune princesse, constamment sous surveillance, ne pouvait même pas descendre seule un escalier! L'exposition rend justice à celle qui est restée sous les traits d'une vieille dame sévère, engoncée dans ses habits de deuil. Avant de perdre son "très cher Albert", Victoria était une jeune femme gaie, "qui aimait danser et adorait les fêtes", rappelle la conservatrice Deirdre Murphy. Ses mots tendres pour Albert, les bijoux délicats qu'il lui a offerts, la partition musicale qu'il lui avait dédiée évoquent une grande histoire d'amour. "Si les visiteurs sortent d'ici avec une autre image de Victoria, alors nous aurons réussi", conclut la conservatrice. La fondation qui gère le palais espère porter à 380.000 le nombre de visiteurs par an, contre 280.000 avant la rénovation.