Les chefs d'Etat de la Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest (CEDEAO) et des représentants de la communauté internationale débattront lundi à Dakar de la situation prévalant au Mali, au lendemain de l'annonce par les militaires putschistes du rétablissement de la Constitution et des institutions dans ce pays à des troubles sécuritaires dans le nord. La Cédéao a décidé de tenir cette deuxième réunion, après celle d'Abidjan, après la prise dimanche par des groupes rebelles de la ville de Tanbouctou (nord-est). Profitant du chaos provoqué par le coup de force militaire contre le président Amadou Toumani Touré le 22 mars dernier, ces groupes armés ont investi ces derniers jours tout le nord-est du Mali, prenant samedi le contrôle de la ville de Gao (nord-est) qui abritait l'état-major régional de l'armée après s'être emparé de la ville de Kidal. "Nous sommes préoccupés par la situation à Gao et Tombouctou. Nous avons demain (lundi) une rencontre à Dakar des chefs de l'Etat de la Cédéao et des représentants de la communauté internationale pour prendre des mesures qui s'imposent", avait affirmé dimanche M. Ouattara, président en exercice de la Cédéao, arrivé la veille à Dakar pour assister à la prestation de serment du nouveau chef d'Etat sénégalais Macky Sall. Lors d'une rencontre avec M. Sall, le président ivoirien a indiqué que les pays de la Cédéao tiennent à "l'intégrité du territoire malien", ajoutant que des mesures seront prises "pour stopper la rébellion touareg dans ce pays". "Nous tenons à l'intégrité du territoire malien. Nous mettrons tous les moyens pour stopper cette rébellion et pour que le Mali retrouve l'intégrité de son territoire. C'est un devoir pour la sous-région", a souligné M. Ouattara. "Les chefs d'Etat de l'espace Cédéao sont d'accord pour engager des troupes pour stopper la rébellion au Mali", a-t-il affirmé. Préoccupée par les évènements au Mali, la Cédéao a, lors d'un sommet extraordinaire tenu mardi dernier à Abidjan, décidé d'envoyer une délégation de plusieurs présidents pour "permettre un retour rapide à l'ordre constitutionnel" au Mali. Composée des présidents du Burkina Faso (Blaise Compaoré), du Bénin (Boni Yayi) du Liberia (Ellen Johnson Sirleaf), du Niger (Mahamadou Issoufou) et du Nigeria (Goodluck Jonathan), la délégation de la Cédéao est conduite par M. le chef de l'Etat ivoirien. La Cédéao a aussi décidé d'imposer des sanctions contre le Mali incluant une interdiction de voyager et un gel des avoirs dans la région pour les membres de la junte au pouvoir. En outre, une force armée de 2000 hommes a été mise en alerte par la Cédéao. Devant les fortes pressions internationales, la junte malienne a annoncé dimanche avoir rétabli la Constitution et les institutions, tout en s'engageant à mettre en place un "gouvernement de transition". "Nous prenons l'engagement solennel de rétablir à compter de ce jour (dimanche) la Constitution du Mali du 25 février 1992, ainsi que les institutions républicaines", avait déclaré le capitaine Amadou Sanogo dans un texte lu à la presse à son quartier général de Kati, en banlieue nord de Bamako. "Toutefois, compte-tenu de la situation de crise multidimensionnelle que vit notre pays, et afin de permettre une transition dans de bonnes conditions et de préserver la cohésion nationale, (nous) décidons d'engager, sous l'égide du médiateur, des consultations avec toutes les forces vives du pays dans le cadre d'une convention nationale (...)" , a-t-il expliqué. Ces consultations devraient permettre, a-t-il ajouté, "la mise en place d'organes de transition en vue de l'organisation d'élections apaisées, libres, ouvertes et démocratiques auxquelles nous ne participerons pas". Le chef de la junte a en outre réaffirmé son attachement "à l'unité et à l'intégrité territoriale" du Mali, se disant "très préoccupé par les attaques des mouvements armés dans le nord du pays et déterminés à défendre à tout prix le territoire national". Les militaires putschistes ont aussi dépêché des émissaires auprès des groupes rebelles pour tenter d'obtenir un cessez-le-feu, a également annoncé Amadou Haya Sanogo, sans plus de précision. Face à ces développements, l'Algérie a annoncé avoir pris acte de l'engagement solennel des putschistes de rétablir la constitution ainsi que les institutions au Mali. L'Algérie a en outre réitéré son appel à la restauration rapide de l'ordre constitutionnel et à l'arrêt des hostilités dans le nord du pays qui continue de soulever de vives réactions internationales. Plusieurs pays et organisations ont vivement condamné le coup de force des militaires mutins au Mali et appelé au rétablissement rapide de l'ordre constitutionnel. Le représentant spécial du secrétaire général des Nations unies pour l'Afrique de l'Ouest, Said Djinnit, a dénoncé un acte "inacceptable", appelant les responsables de la junte à garantir la sécurité du président renversé. La Chine a exhorté la junte malienne à "engager au plus vite un dialogue" avec la CEDEAO afin de mettre un terme à la crise actuelle au Mali.