Le chef de la diplomatie espagnole, José Manuel García-Margallo, a annoncé samedi au cours d´une conférence de presse, le «rapatriement volontaire» des 13 membres des organisations civiles espagnoles qui assistent les populations sahraouies des camps de réfugiés de Tindouf. Douze d´entre eux ainsi que deux Français et un Italien, l´ont été ce même jour à l´aube par avion des forces armées à destination de la base militaire de Torrejon (Madrid) alors que le treizième avait quitté Tindouf la veille par ses propres moyens en compagnie d´une camarade péruvienne. Seul un ressortissant espagnol a décidé de rester sur place, déclarant «assumer le risque» avancé par les autorités de son pays. Surprise générale ! Cette décision est l´aboutissement d´incessantes pressions gouvernementales exercées au lendemain du 23 octobre 2011 sur ces organisations de soutien à la cause sahraouie par l´ancien président socialiste José Luis Zapatero qui avançait des «raisons sécuritaires». C´était à la suite la séquestration de deux ressortissants espagnols, Anoa Fernandez de Rincón et Enric Gonyalons, et de l´Italienne Rossella Urru sur leur lieu de résidence à Rabouni (Tindouf), par le groupe armé, le Mouvement pour l´Unicité et le Jihad en Afrique de l´Ouest (Mujoa), jusque-là inconnu. La libération de ces trois missionnaires a été obtenue, il y a une dizaine de jours, après sept mois de captivité, contre paiement d´une rançon dont le montant exact n´est pas encore connu, en plus de la remise en liberté par la Mauritanie des deux prisonniers sahraouis impliqués dans cette opération de prise d´otages et d´un troisième salafiste incarcéré au Niger. La nouvelle du retrait des volontaires espagnols des camps de Tindouf où les organisations humanitaires internationales sont établies depuis le début de l´occupation du Sahara occidental par le Maroc en 1975 a suscité la «surprise générale» au sein de la délégation du Front Polisario en Espagne et des associations de soutien à la cause sahraouie. L´argument «sécuritaire» de García-Margallo Le gouvernement Rajoy a tenu, indirectement, à rassurer le mouvement sahraoui et ses partisans de la société civile, laissant entendre que sa décision n´a rien de politique et ne remet nullement en question sa position sur le conflit du Sahara occidental, fondée sur le respect du droit à l´autodétermination du peuple sahraoui. Le rapatriement des missionnaires espagnols avait été pourtant formellement exclu, le 24 octobre 20111, par les organisations civiles d´origine, déclinant la proposition que leur avait faite en ce sens l´ancienne ministre des Affaires étrangères de José Luis Zapatero, Trinidad Jimenez. Le gouvernement Rajoy assure que ces Ong sont revenues sur leur décision de départ après avoir été informées du rapport des agents secrets espagnols (CNI) présents au Sahel, faisant état d´«indices fondés» sur la préparation d´actes de terrorisme dirigés contre des «objectifs étrangers» dans la région. «Le nord du Mali s´est transformé en une base terroriste», a déclaré samedi M.García-Margallo au cours d´une conférence de presse. Du «tout cuit», selon José Taboada Les arguments de M.Margallo sont du «tout cuit» pour les associations de soutien à la cause sahraouie qui font observer que le rapatriement des missionnaires espagnols n´a rien de volontaire. La Fédération des Associations de Soutien au Sahara (Concas) présidée par José Taboada, estime que c´est là le résultat d´une série de pressions du lobby pro-marocain en Espagne et en France pour mettre un terme à l´aide humanitaire aux réfugiés sahraouis. Les missionnaires travaillaient sur des projets financés par l´Agence d´Aide Espagnole de Coopération Internationale au Développement (AECID) dépendant du ministère des Affaires étrangères. Pour Taboada, nul doute que Madrid a usé de cet instrument de pression. «Nous ne sommes pas d´accord avec ces arguments improvisés et infondés de rapatriement volontaire car les mesures de sécurité adoptées par le Front Polisario dans les camps de réfugiés de Tindouf sont suffisantes», estime-t-il. Des volontaires de retour à Tindouf cette semaine Le président de la Concas a ajouté que sa fédération ne permettra pas l´abandon du peuple sahraoui en informant la presse de la visite, cette semaine, d´un groupe de volontaires espagnols dans les camps de réfugiés de Tindouf pour «poursuivre la mission d´aide humanitaire et de soutien politique au peuple sahraoui et prouver qu´il n´y a aucun danger là-bas». En conclusion de sa déclaration, il a interpellé le ministre, avec une certaine ironie, sur le sort des 5500 enfants sahraouis qui passent actuellement leurs vacances en Espagne : «Que doit-on en faire ? Je propose qu´on les gardent ici du moment qu´il y a danger à Tindouf comme vous dites !» Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères de la RASD, M.Ould Salek, s´est limité à transmettre un message de «regret» suite à la décision du gouvernement espagnol qui «aura sans aucun doute des effets négatifs sur la situation des réfugiés».