Invité hier matin du Forum du quotidien Liberté, le président du Comité olympique algérien, le professeur Rachid Hanifi, a pu développer certains thèmes relatifs aux grandes questions que se pose, depuis quelque temps, l'opinion publique nationale au sujet du sport algérien et du bilan de la délégation algérienne aux récents Jeux olympiques de Londres. L'orateur a, surtout, mis en exergue le fait qu'un fossé sépare bien aujourd'hui l'instance olympique du ministère de la Jeunesse et des Sports, le second, selon ses termes, ayant cherché à le marginaliser ainsi que le COA. Nous retiendrons, pour notre part, une phrase lourde de sens et qui semblait s'adresser directement aux responsables du MJS ainsi qu'aux présidents des Fédérations sportives. «Le responsable qui ne reconnaît pas son échec pour en déterminer les raisons et apporter les correctifs est un responsable qui s'est fixé l'échec comme objectif», a-t-il déclaré pour signifier que malgré la médaille d'or de Toufik Makhloufi, il y a bien eu échec lors des Jeux de Londres et que cette consécration aussi importante qu'elle soit ne saurait camoufler toutes les carences dont souffre le secteur. La plus faible participation depuis 1988 «J'ai consulté les archives et je suis remonté jusqu'aux Jeux de Séoul en 1988. C'est vous dire que je suis allé loin. La participation algérienne de 2012 est la plus faible en nombre d'athlètes qualifiés depuis les Jeux de 1988. Certes la qualification en elle-même est déjà une performance compte tenu des compétitions par lesquelles on est passé, certes les critères de qualification sont de plus en plus difficiles, ce n'est pas pour cela qu'on pourra dire qu'on est en train d'avancer. Et puis, on fait sortir Makhloufi. Eh bien sachez que le mérite de cette victoire revient avant tout à l'athlète lui-même et aux techniciens qui l'ont préparé et tous les techniciens, pas seulement celui qui l'a pris en charge les six derniers mois. Je vais vous faire, à titre d'exemple, un récapitulatif des performances de l'Algérie aux Jeux sportifs arabes depuis 2004. Cette année-là, nous avions terminé 2e avec un total de 283 médailles dont 94 en or. En 2007, nous avions fini 3e avec 149 médailles dont 32 en or. En 2011, l'Algérie s'est contentée de la 5e place avec 88 médailles dont 16 en or. Comment peut-on qualifier ce bilan qui traduit bien qu'il y a une nette régression du sport algérien sinon que par l'échec ?» Le professeur Hanifi s'est alors étalé sur les rapports du COA avec le MJS. «Cela fait trois ans que nous sommes en poste et en dehors de deux petites subventions allouées au départ à titre d'urgence puis pour financer une semaine olympique, le COA n'a plus reçu d'argent de la part du MJS. Il est heureux que nous ayons eu l'entreprise Mobilis comme sponsor officiel pour pouvoir subvenir à nos besoins, sinon je me demande comment nous aurions pu activer. Trouvez-vous normal que le COA qui devrait avoir la charge de la préparation de la délégation algérienne aux Jeux en soit pratiquement éjecté ? Le MJS a, tout simplement, pris sur lui de s'occuper de ce volet et les 50 milliards qu'il prétend avoir débloqué pour cette participation, nous n'en avons pas vu un centime au COA. Mais le Comité olympique algérien a fait ce qui lui revenait sur le plan de la logistique. Je peux vous assurer que ce travail a été si bien accompli que nous avons été félicités par les organisateurs des Jeux et nous avons été cités en exemple. A ce sujet, je tiens à remercier outre Mobilis, la compagnie Air Algérie pour sa contribution ainsi que les services de notre ambassade sur place à Londres dont le personnel a été constamment à nos côtés pour résoudre tous les problèmes qui se posaient. Vous savez, j'ai eu un jour l'occasion de discuter avec le président du CIO, le Comte Jacques Rogge, en présence de l'actuel ministre de la Jeunesse et des Sports. Je lui avais dit que j'étais pour l'autonomie des Comités nationaux olympiques mais en aucun cas pour l'indépendance de ces Comités vis-à-vis de l'institution gouvernementale pour la simple raison que c'est celle-ci qui finance le sport et le mouvement olympique de son pays. Il y a cependant des règles comme la Charte olympique que je me dois de respecter. Apparemment, c'est cela qu'on ne comprend pas au MJS. Je vais vous faire une autre révélation. Nous avions eu une fois l'intention d'organiser en Algérie une journée d'études sur le sport de performance avec des experts internationaux. Nous avions eu l'aval du ministère des Affaires étrangères et à 15 jours de l'évènement nous avons reçu une lettre du ministère de la Jeunesse et des Sports nous interdisant de l'organiser. C'est du blocage systématique. On voit de tout dans ce milieu puisqu'il se trouve qu'un Algérien candidat à la présidence d'une Fédération sportive internationale a été bloqué par les responsables sportifs de son propre pays.» «Nous irons vers une AG ordinaire» S'agissant de la crise qui secoue le Comité olympique algérien, le Professeur Hanifi est intervenu en insistant, tout d'abord, sur la récente lettre du CIO adressée à celui qui était le SG du COA, à savoir Hassan Chikh, après que celui-ci eut contacté l'instance olympique internationale. «Cette réponse est cinglante et humiliante. Elle témoigne de l'irresponsabilité de celui qui a pris le risque de contacter le CIO à la veille de l'ouverture des Jeux de Londres, dira le président du COA. Mais je sais que cette personne n'a pas dû écrire cette lettre au CIO si on ne lui a pas ordonné de le faire. En tout cas, il a vu quelle estime le CIO a de lui aujourd'hui. Ceci dit, vous savez qu'il y a eu de nombreuses tentatives de médiation mais à chaque fois, ce que je nomme les contestataires ont tourné le dos. Pour eux, il y a deux conditions à appliquer : une que je me démette, deux que les conseillers que j'ai nommés sur décision prise en Comité exécutif, soient renvoyés. Ce matin, une réunion de ce comité exécutif devait se dérouler. Elle a été annulée faute de quorum. Je tiens cependant à faire savoir que deux des contestataires m'ont écrit pour s'excuser de leur absence. Maintenant, il ne nous reste plus qu'à attendre l'Assemblée générale ordinaire du 29 septembre, une AG statutaire où il sera question de bilans à débattre. Les contestataires exigent, eux, une AG extraordinaire avec un seul point à l'ordre du jour : la question de confiance au président. Je refuse cette option. Nous irons vers l'AG ordinaire et ce jour-là, si les membres estiment qu'il faut aller vers une AG extraordinaire, je me plierai devant la majorité. Je ne suis pas venu au COA pour faire carrière. J'ai toujours dit que j'étais venu pour gérer une transition et je n'ai nulle envie de rester accroché à ce poste.»