Dans l'interview accordée, jeudi soir, à un groupe de chaînes de télévision et de radios françaises, à la veille de son départ pour Dakar et la RDP du Congo, où il assistera au Sommet France-Afrique sur la francophonie, le président français François Hollande a détaillé la position de la France sur le Sahel et le Mali. Il a clairement laissé entendre qu'un consensus se serait déjà dégagé au Conseil de sécurité de l'ONU autour d'une intervention militaire au Mali. A son avis, ni la Russie ni la Chine n'opposeront leur veto à la résolution sur une intervention militaire. Et pour cause, Moscou et Pékin sont convaincues du bien-fondé d'une intervention armée dans le nord du Mali, s'agissant d'y déloger Aqmi, le Mujao et leurs alliés salafistes du MNLA. Le scénario en deux temps est d'ailleurs déjà en place. Une résolution sera votée dans deux ou trois jours qui donnerait le feu vert à l'intervention, suivie d'une autre sur les conditions de cette intervention contre des groupes terroristes. Aux yeux de la Russie et de la Chine, en effet, la situation qui prévaut Sahel n'a rien de comparable avec la crise syrienne où les enjeux particuliers des puissances occidentales divergent avec les leurs. Le président socialiste français a employé un ton assez modéré et une démarche se voulant au maximum consensuelle. Dans tous les cas, le président Hollande a utilisé dans sa plaidoirie en faveur d'une action armée au Mali des arguments qui tranchent nettement avec l'agressivité de son prédécesseur, Nicolas Sarkozy, dans le débat sur la guerre de Libye ou la crise syrienne. Il s'est dit favorable à une intervention militaire des pays de la Cédéao, précision de taille, approuvée par l'Union africaine. Autre précision de fond, la France, elle, se limitera à apporter un appui logistique et la formation sans s'impliquer militairement sur le terrain des affrontements. Tous les experts sont d'accord sur le principe qu'il faut entre deux et six mois pour que les 3200 soldats de la Cédéao soient opérationnels. La France dispose donc de suffisamment de temps pour expliquer sa position à l'Algérie où le président François Hollande doit se rendre en visite officielle avant la fin de l'année en cours. Il est évident, en effet, que l'Algérie privilégie la solution politique à la crise malienne. Tout le monde connaît les dangers d'une dérive ou d'un enlisement sur terrain d'une telle option. L'exemple afghan et irakien et l'expérience de guerre libyenne contre laquelle Alger avait averti en son temps, sont, hélas, là pour lui donner raison. François Hollande a reconnu, d'ailleurs, que l'Algérie a payé le prix fort dans sa lutte contre le terrorisme pour avoir besoin qu'on vienne lui donner des leçons sur la démarche à suivre. Le gouvernement algérien s'en tient à sa conviction que seule la voie du dialogue peut conduire à une solution à la crise malienne. Le rôle qu'elle a joué depuis le début des années 1990 pour réconcilier le gouvernement malien et la rébellion azawad est son meilleur argument. C'est pour l'exploration de cette voie que Abdelkader Messahel s'est rendu, la semaine dernière, en Mauritanie puis au Mali. Réconcilier les Maliens entre eux mais aussi et, surtout, renforcer la ligne de front contre Aqmi et le Mujao pour garantir la sécurité dans le Sahel, au Maghreb et en Méditerranée. Constat positif que font ces mêmes experts : Alger, qui a mille fois plus de raisons de se préoccuper d'un conflit à ses frontières, et Paris développent deux démarches sur la crise malienne qui peuvent paraître différentes par certains aspects, mais qui ne sont pas forcément antagonistes comme ce fut le cas avec l'interventionnisme français en la Libye.