Il arrive qu'on ne puisse rien contre la violence de la nature, surtout quand elle se manifeste de manière aussi capricieuse. Le «problème» est que d'une manière générale, la nature, pour des raisons... naturelles de géographie est plutôt clémente avec notre espace régionale. Ca aurait pu être une chance mais la chance a souvent besoin d'être entretenue. C'est le niveau de prévenance et de réaction, en un mot, de prise en charge, qui fait que les drames que provoque la nature soient évités ou ramenés à des proportions moins tragiques. Et c'est cette capacité à atténuer les douleurs et réduire les pertes qui font le développement en la matière. On a vu de grandes puissances de ce monde essuyer de cinglants revers face au déchaînement des vents, des eaux ou des neiges. Il est même arrivé qu'un drame naturel et la qualité de sa prise en charge influe de manière substantielle sur une élection présidentielle comme ça a été le cas aux Etats-Unis avec Catarina. On a vu en France des étudiants qui n'avaient aucune raison de... mourir, emportés par les flots d'une rivière en crue. On a vu les séismes les plus meurtriers... Mais on s'est à chaque fois rendu à l'évidence : c'est rarement le degré de violence d'un phénomène naturel qui détermine l'ampleur des drames humains et matériels mais plutôt le niveau des mesures de prévention et de réaction à postériori qui limite les dégâts et atténue les douleurs. Et ce ne sont pas les grandes catastrophes qui inquiètent tant les citoyens ordinaires, mais les «petites» surprises qui, par leur récurrence, leur ressemblance leur fatalité font redouter aux Algériens le pire... pour si peu. Et par dessus tout, ce sentiment que l'Etat a abandonné les siens, même s'il se «mobilise» à chaque fois qu'il se passe quelque chose. C'est précisément à ce moment-là que les gens se rappellent qu'entre les inondations d'il y a des décennies et celles de cette fois-ci, il ne s'est rien passé ou plutôt, rien n'a été fait ! Il n'y pas plus horrible que le sentiment que la vie ou la baraque des plus faibles ne préoccupe personne au sein des autorités de l'Etat ! Un sentiment qu'on ne peut pas évacuer pourtant, parce qu'à chaque hiver et parfois bien avant, la nature nous en fournit la preuve par des drames souvent évitables en ce sens qu'ils sont dus à des manifestations de la nature rarement périlleuses. Et face à ce sentiment d'abandon, on exprime sa colère de façon parfois aussi capricieuse que la nature. Tenez, un cas exemplaire : un citoyen d'Aït Yahia Moussa, au sud de la wilaya de Tizi Ouzou, a «réussi la prouesse de fermer le siège de l'APC et bloquer la RN 25 pendant toute une matinée, à lui tout seul», nous apprend notre correspondant local ! Le brave homme n'est pourtant pas fou. Sa modeste demeure s'est effondrée déjà l'hiver dernier et cette fois, la nature n'a pas attendu la saison pour l'inonder de nouveau. Dans le même sujet, on apprend qu'une jeune fille a perdu la vie et quatre autres femmes ont été sérieusement blessées dans l'effondrement d'une bâtisse à Alger, des routes ont été coupées à la circulation, dix-sept accidents de la circulation ont été enregistrés dans la seule wilaya de Sidi Bel-Abbès, plusieurs maisons ont été envahies par les eaux à Boumerdès, quatre cents nouvelle villes ont été réalisées sans systèmes d'évacuation, 13 oueds menacent la capitale, que la wilaya d'Oran a «tout mis en place» pour se prémunir du danger des eaux. On nous dit ça depuis longtemps. On a toujours peur et chaque hiver, parfois avant, les preuves que pas grand-chose n'a été fait nous sautent à la figure. Et souvent dans des conditions tragiques. [email protected]