Bordj Badji Mokhtar, à la frontière nord du Mali, déclarée zone militaire depuis quelques mois déjà, est en alerte renforcée depuis le 24 décembre dernier. Outre l'alerte pour ce qui est de l'aspect sécuritaire, justifiée, rappelle-t-on, par l'installation à quelques kilomètres de l'autre côté des frontières de membres du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), Bordj Badji Mokhtar est devenue la destination d'asile de nombreuses familles maliennes fuyant El Khalil, localité désormais occupée par cette organisation terroriste. En famille ou individuellement, nombreux sont les habitants d'El Khalil qui font à pied les 14 km les séparant de Bordj Badji Mokhtar. Selon les témoignages de certains, les terroristes du Mujao se sont emparés des véhicules des habitants et ont entamé une grande opération d'intimidation à leur encontre. «Vous savez, El Khalil était déjà presque entièrement désertée à cause des combats qui opposaient il y a près d'une année les touaregs et les islamistes à l'armée malienne. Nombre de familles sont retournées chez elles après l'accalmie et le contrôle de cette zone par le mouvement Ançar Eddine, mais les choses ont changé depuis l'invasion de la localité par le Mujao le 24 décembre dernier», témoigne un des habitants qui a réussi à rejoindre Bordj Badji Mokhtar après plusieurs heures de marche. El Khalil, première localité malienne après la traversée des frontières à partir de Bordj Badji Mokhtar, est distante de 100 kilomètres de Tassalit, l'agglomération malienne la plus proche, et d'environ 150 kilomètres d'Aguelhok, en territoire malien. «Bordj Badji Mokhtar est donc la localité la plus proche de nous», dira un habitant d'El Khalil venu en famille. «Nous n'avons que Bordj Badji Mokhtar pour fuir les terroristes du Mujao qui ont investi la localité par centaines à bord de dizaines de véhicules équipés de mitrailleuses», ajoute un autre habitant d'El Khalil arrivé à Bordj Badji Mokhtar. «Les véhiculesdes habitants volés» Les éléments du Mujao qui se sont accaparés d'El Khalil ont dépossédé les habitants de cette localité de leurs véhicules. «Ils nous ont pris nos véhicules de force, ce qui nous empêche de nous déplacer jusqu'à Tassalit ou Aguelhok pour nous approvisionner en denrées alimentaires», selon les témoins. «Nous ne pouvions donc trouver refuge qu'à Bordj Badji Mokhtar», ajoutent-ils. «Les quelques familles qui sont revenues à El Khalil sont désarmées et n'ont pu affronter les terroristes du Mujao qui a tout volé», selon eux. Certains des habitants d'El Khalil qui ont pu se rendre à Bordj Badji Mokhtar ont trouvé un travail qui pourrait les aider à survivre. D'autres disent avoir l'intention de se rendre à Timyawine pour rallier les camps de réfugiés maliens. Le mouvement national de libération de l'Azawad a, de son côté, rendu public un communiqué dans lequel il informe que «depuis le 24 décembre, un groupe de narco-terroristes du Mujao inflige des sévices à la population d'El Khalil, à la frontière algérienne et à une centaine de kilomètres au nord de Tessalit», ajoutant que «des biens ont été pillés et saccagés et des violences exercées sur les femmes». Selon le MNLA, «une cinquantaine de véhicules appartenant à la population a été volée. Désormais dépourvue de moyens pour s'approvisionner, la plus grosse partie des résidents a cherché refuge en territoire algérien». «Le Mujao s'en est pris à cette population sans défense afin de s'assurer un contrôle total sur la route qu'il utilise pour acheminer la drogue vers le nord avant de l'envoyer en Europe», est-il expliqué dans le communiqué du MNLA. Le Mujao, qui s'est emparé d'El Khalil, près des frontières algériennes, s'est installé dans cette agglomération quelques jours avant d'annoncer la création, par cette organisation terroriste, de quatre nouvelles brigades et une nouvelle phalange menaçant les pays voisins, «l'Algérie en particulier».