Dans un enregistrement diffusé hier par l'agence d'informations mauritanienne Al Akhbar, trois des sept diplomates algériens enlevés en avril dernier à Gao, ville du nord du Mali, sollicitent le président Abdelaziz Bouteflika et le gouvernement algérien pour œuvrer à leur libération. L'otage que les ravisseurs avaient annoncé avoir exécuté n'apparaît pas dans l'enregistrement, note-t-on. «Nous appelons le président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika, à trouver une solution à notre situation, en acceptant les conditions de la Djamaâ (les ravisseurs) pour qu'on puisse revenir parmi nos familles», a lancé le consul d'Algérie à Gao, dans l'enregistrement. Les trois otages apparaissaient avec des barbes fournies, assis à même le sol et entourés d'hommes armés. L'enlèvement des sept diplomates algériens avait, rappelle-t-on, été revendiqué par le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao), organisation terroriste occupant une partie du nord du Mali. Le but des ravisseurs est de faire plier les autorités algériennes pour les contraindre à accepter les conditions fixées par le Mujao en contrepartie de la libération des otages. Pas seulement ça puisque, dans le même enregistrement, le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest tente de mettre la diplomatie algérienne dans la gêne et semer le doute entre les familles des otages, victimes de cet acte criminel, qui est le rapt, et les autorités algériennes. Le Mujao tente d'infliger un revers à la diplomatie algérienne «Nous avions l'occasion de quitter Gao avant notre enlèvement, mais sur ordre du ministère des Affaires étrangères, nous sommes restés pour assurer les intérêts de notre communauté. Maintenant, nous lui demandons (le président Bouteflika) de nous aider en remplissant les conditions de la Djamaâ. Nous voulons sortir d'ici et revenir sains et saufs chez nous», ajoute, en effet, le consul algérien. Le texte étant fort probablement imposé par le Mujao, ces phrases sont faites pour mettre les autorités algériennes dans la gêne suite à leur décision de maintenir en poste les diplomates algériens à Gao malgré l'avancée d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et le Mujao, et le repli de l'armée malienne et aussi vis-à-vis des familles des victimes dont la détresse est exploitée par le Mujao pour parvenir à la satisfaction de ses revendications et, surtout, pour infliger un revers à la diplomatie algérienne. Dans le même enregistrement, un troisième otage apparaît, appelant le président Bouteflika, le gouvernement et le peuple algériens à «nous faire sortir de cette crise et nous permettre de revenir à nos familles». Une preuve de l'exécution de Tahar Touati ? Pour rappel, trois des sept diplomates algériens enlevés à Gao avaient été relâchés il y a quelques mois. Les quatre autres sont toujours détenus par leurs ravisseurs. Le Mujao avait exigé la libération de plusieurs éléments d'Aqmi, dont Ishak Soufi, arrêté par les forces spéciales de l'Armée nationale populaire (ANP) à Ghardaïa, en plus du paiement d'une rançon, en contrepartie de la libération des diplomates. Devant le refus des autorités algériennes de céder au chantage, le Mujao avait annoncé l'exécution d'un des quatre diplomates toujours pris en otage par cette organisation terroriste. Le ministre algérien des Affaires étrangères, Mourad Medelci, avait déclaré, suite à cette annonce, qu'«il n'y a aucune preuve matérielle attestant de cette exécution». Tahar Touati n'est pas apparu dans l'enregistrement diffusé hier. Ce qui pourrait, malheureusement, conforter la thèse de son exécution par le Mujao qui n'a, pourtant, diffusé aucun enregistrement prouvant que l'exécution a bien eu lieu. Le Mujao avance vers les frontières algériennes La diffusion de cette vidéo, qui aurait été enregistrée en novembre 2012, coïncide avec un important déploiement du Mujao vers les frontières algériennes. Des dizaines de véhicules, appartenant à cette organisation terroriste, équipés de mitrailleuses lourdes, ont, rappelle-t-on, campé à El Khalil, ville désertée du nord du Mali et distante de 14 kilomètres de Bordj Badji Mokhtar. L'installation d'un campement de cette organisation terroriste près des frontières algériennes est perçue, par les observateurs, comme une «provocation» à l'encontre de l'Algérie, cible privilégiée du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest. L'installation de ce campement intervient, également, quelques jours seulement après la signature, à Alger, d'un accord de principe de partenariat entre Ançar Eddine et le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), sur la base duquel les deux mouvements s'engagent, rappelle-t-on, à lutter contre le terrorisme et le crime organisé et à tout faire pour libérer les otages détenus par Aqmi et le Mujao. Les «initiatives» du Mujao tendent, donc, à «casser» cet accord et empêcher toute solution pacifique à la crise au nord du Mali puisque Ançar Eddine et le MNLA ont exprimé leur volonté de s'engager dans des négociations pour la recherche d'une solution pacifique à la situation. Solution qui ne semble intéresser ni Aqmi ni le Mujao.