Si le commun des Algériens est au courant que des terroristes d'Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) se trouvent dans des maquis en Algérie et dans d'autres pays de la région, beaucoup ignorent si les terroristes du Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao) ont des refuges en sol algérien ou se contentent-ils de traverser les frontières algériennes pour perpétrer des attentats. L'arrestation, le 24 mai 2012, par l'Armée nationale populaire (ANP) de deux ressortissants maliens, membres du Mujao à Tine Zawatine, dans la wilaya de Tamanrasset (voir notre édition du 25 mai 2012), à bord d'une Toyota Station, apporte quelques éléments d'informations sur la méthode utilisée par cette organisation terroriste dans le pays. C'est ainsi que l'enquête a révélé que les deux éléments du Mujao arrêtés à 80 kilomètres en profondeur du territoire algérien étaient en Algérie pour voler des véhicules tout-terrains et attaquer des institutions financières. L'enquête a révélé que les deux membres du Mujao ont déjà volé plusieurs véhicules de marque Toyota Station sur le sol algérien, et attaqué, en septembre 2011, un bureau d'Algérie Poste de Tine Zawatine dans la même localité, agressant deux agents des P et T et volant la somme de 200 millions de centimes. L'opération de recherche, qui a commencé suite à une alerte donnée par le propriétaire d'une Toyota Station agressé par les deux terroristes qui l'ont dépossédé de son véhicule, a permis aux forces de sécurité de récupérer un téléphone cellulaire de marque Thuraya et des quantités importantes de carburant et de munitions. Contrairement aux terroristes d'Aqmi qui sont dans les maquis, les acolytes du Mauritanien Hamada Ould Kheirou, «émir» national du Mujao, font des incursions à partir du nord du Mali pour voler des véhicules tout-terrains, attaquer des institutions financières et perpétrer des attentats comme celui de la fin de semaine écoulée à Ouargla. A noter que le Mujao adopte le même modus operandi que celui prôné par le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC, devenu Aqmi), à savoir le vol de véhicules tout-terrains dans le Grand Sud pour servir, soit pour le transport des terroristes jusqu'aux frontières, avant leur revente ou leur utilisation dans des attentats à l'explosif. Le GSPC devenu Aqmi utilisait cette méthode depuis le début des années 2000. La ressemblance entre les méthodes d'Aqmi et le Mujao ne s'explique pas uniquement par le fait que le Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest soit une organisation terroriste dissidente d'Al Qaïda au Maghreb islamique. Elle s'explique, surtout, par une «complémentarité» et un «partage de rôles» entre les deux organisations terroristes. Aqmi menace les populations locales C'est ce qui est prouvé quand l'organisation terroriste dirigée par Abdelmalek Droukdel, alias Abou Mossaâb Abdelouadoud, actuel «émir» national d'Aqmi, prête main-forte au Mujao qui combat depuis les 26 et 27 juin dernier le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA). Le Mujao bénéficie de renforts en armes et en effectifs de la part d'Aqmi, au nord du Mali. Le Mnla a, lui également, de renforts. Ce qui n'est pas pour plaire à Droukdel et ses acolytes. C'est ainsi qu'Aqmi a menacé, avant-hier, d'agir «avec fermeté et détermination» contre ceux qui collaboreront avec une force militaire appelée à intervenir dans la région. La menace aurait été exprimée, avant-hier, par Mokhtar Belmokhtar. «Nous prévenons chacun devant la tentation de tirer profit» de la situation actuelle dans le nord du Mali «en collaborant avec les forces étrangères qui guettent la région, que nous ne resterons pas les bras croisés et que nous agirons en fonction de la situation avec fermeté et détermination», a affirmé Mokhtar Belmokhtar dans un communiqué diffusé par l'Agence Nouakchott Informations (ANI), un média privé en Mauritanie. Le chef terroriste faisait également allusion à la saisie par la Communauté économique pour le développement des Etats de l'Afrique de l'Ouest (Cédéao) du Conseil de sécurité de l'ONU pour donner son aval à une intervention militaire au nord du Mali. Pour ce qui est des affrontements entre le Mujao et le Mnla, Mokhtar Belmokhtar dira que des hommes d'Aqmi ont été contraints de riposter les 26 et 27 juin à des rebelles touareg du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) qui, a-t-il accusé, les avaient «sciemment agressés». C'est un aveu de la part de d'Aqmi d'être directement impliquée, aux côtés du Mujao, dans les affrontements contre le Mnla. Aqmi aide-t-elle le Mujao à occuper des maquis en Algérie ? Cette éventualité n'est pas exclue selon des observateurs de la scène sécuritaire.