Surpris, choqués ou plein d'espoir pour la nomination d'un pape plus moderne, les fidèles de l'Eglise catholique à travers le monde ont réagi diversement lundi après l'annonce de la démission fin février du pape Benoît XVI. "J'ai toujours pensé qu'une démission pour un pape, c'est comme un divorce, ce n'est pas possible. Vous continuez jusqu'au dernier souffle", explique Hugh Stafford Northcote, un directeur d'école britannique à la retraite, qui a rencontré avec sa femme samedi Benoît XVI à Rome. "En une fraction de seconde, son regard a croisé le mien et j'ai pensé : oh, il ne restera pas longtemps sur cette terre", témoigne sa femme Hilary. Certains refusent pourtant d'y croire. En pèlerinage à Lourdes dans le sud-ouest de la France, le père dominicain italien Enrico Nicoletti se dit persuadé qu'il s'agit d'un complot monté par la presse. "C'est un mensonge, un mensonge bien organisé", s'exclame-t-il sur le parvis de la basilique plusieurs heures après la publication de l'information. A Madrid, devant la cathédrale de la Almudena, même surprise: "Je ne savais pas que le pape pouvait démissionner, je pensais qu'il devait le rester jusqu'à sa mort", reconnaît Gabriel Gar, 46 ans, chef d'entreprise. "L'Eglise a besoin d'un pape progressiste comme Jean XXIII, qui regarde la vie d'aujourd'hui et qui voie comment avance la société", juge Julio Ferreiro, retraité galicien. "Je trouve cela très bien qu'il ne reste pas jusqu'à la mort. J'ai moi-même 82 ans et je vois bien que l'on ne peut pas suivre le rythme terrible imposé à un pape quand on est si âgé", concède Olga Camus devant l'église Saint-Eustache à Paris. "Je rêve maintenant d'un pape noir, pieds nus et en haillons", déclare Bertille Vincent, une autre retraitée. En Pologne, terre natale de Jean Paul II, prédécesseur de Benoît XVI, Henryk Damaszewski, de Varsovie, se félicite que Benoît XVI aille se reposer et ouvre la voie au choix d'un nouveau pape. German Diaz, 25 ans, étudiant à l'Université catholique de La Salle à Mexico, espère lui que cette démission favorisera une rénovation de l'Eglise : "J'espère qu'ils choisiront un pape jeune, plus adapté à l'époque actuelle. Si le pape démissionne, c'est qu'il a ses raisons et sûrement, l'âge a joué, c'est très dur de diriger une Eglise aussi grande et aussi complexe, je ne crois pas qu'un vieillard puisse le faire". "Les voies impénétrables du Seigneur" En Terre sainte, les rumeurs les plus folles ont couru. Des commerçants palestiniens à Jérusalem ont laissé entendre que le pape était en fait déjà mort et que sa disparition était gardée secrète par le Vatican. "Choc, choc" sont les seuls mots de deux religieuses polonaises qui s'apprêtent à aller prier à l'église du Saint-Sépulcre. D'autres, plus bavards, imaginent différentes raisons de la décision pontificale. Dans l'église de la Nativité à Bethléem, un jeune Palestinien de 21 ans préfère rester prudent : "Nous ne connaissons pas la vraie raison, mais le Vatican la connaît". En Afrique, à Cotonou, Guy Kpakpo souligne que le pape s'en va au moment où l'Eglise traverse une "crise profonde", mais pour Rosalie Quenum Assogba sa démission est "un message qui va au-delà de l'Eglise catholique". A la mi-journée, devant la cathédrale d'Abidjan avec son toit bleu ciel qui surplombe la lagune, Victor Ségueï, quinquagénaire en costume-cravate, regrette le départ de Benoît XVI : "Il est le chef de l'Eglise, il devait conduire son peuple jusqu'au bout et ne pas démissionner". Et devant un kiosque regorgeant de cartes postales et de statuettes catholiques, l'institutrice Odette Tanon attend de savoir ce que "les évêques et surtout l'archevêque vont nous dire". De l'autre côté de la planète, à Manille, la patronne du restaurant de la Mitre, Elvira Go, est catégorique : "Il n'aurait pas démissionné s'il avait pensé avoir la force de continuer" sa tâche. Pour Ivy Taalip, d'une communauté tribale christianisée dans l'extrême Sud du pays, femme de ménage à Manille, "c'est la volonté de Dieu. L'Eglise nous a toujours enseigné que les voies du Seigneur sont impénétrables. Mais qu'arrivera-t-il à l'Eglise maintenant?"