Le président égyptien Mohamed Morsi a prévenu lundi que son pays ne laisserait pas sa part du Nil être menacée même "d'une goutte", après la décision de l'Ethiopie d'entamer une déviation sur le Nil Bleu en vue de construire un barrage. "Nous ne pouvons rien laisser passer qui puisse avoir un impact sur une goutte des eaux du Nil", a déclaré M. Morsi lors d'un dialogue sur ce dossier avec des personnalités politiques et religieuses égyptiennes, retransmis en direct à la télévision publique. "Il faut que nous prenions les mesures garantissant la protection de la sécurité hydraulique égyptienne", a-t-il ajouté sur son compte officiel Twitter, sans donner plus de précisions. "La situation actuelle nécessite d'unir les rangs pour empêcher toute menace contre l'Egypte", a-t-il poursuivi. Le dialogue à la présidence portait sur le rapport d'une commission tripartite Egypte-Soudan-Ethiopie concernant la décision de l'Ethiopie d'entamer une déviation sur le Nil Bleu, pour construire un important barrage hydro-électrique qui inquiète l'Egypte et le Soudan, situés en aval. Des responsables égyptiens ont estimé que la décision éthiopienne était essentiellement technique et ne modifiait pas le débit des eaux du Nil, fleuve vital pour l'Egypte comme pour le Soudan. Mais un conseiller de M. Morsi, Khaled al-Kazzaz, a estimé que ce dossier touchait à "la sécurité nationale" de l'Egypte, et la nervosité des autorités égyptiennes s'est traduite mercredi par une réunion du gouvernement sur ce sujet, qui a rappelé que Le Caire était opposé "à tout projet qui pourrait affecter le débit du fleuve en aval". Le Nil Bleu rejoint le Nil Blanc à Khartoum pour former le Nil, qui traverse le Soudan puis l'Egypte avant de se jeter dans la Méditerranée. L'Ethiopie a entamé une déviation du Nil Bleu sur 500 mètres, en vue de la construction d'un important barrage hydro-électrique dénommé "Grande renaissance", un projet de 4,2 milliards de dollars (3,2 mds EUR). Les travaux pour la première phase du barrage - d'une capacité de 700 megawatts - devraient durer trois ans. Le barrage devrait au final avoir une capacité de 6.000 megawatts. L'Egypte considère que ses "droits historiques" sur le Nil sont garantis par deux traités datant de 1929 et 1959 lui accordant ainsi qu'au Soudan des droits sur 87% au total du débit du fleuve, et un droit de véto sur tout projet en amont que le Caire jugerait contraire à ses intérêts. Ces accords sont toutefois contestés par la majorité des autres pays du bassin du Nil, dont l'Ethiopie, qui ont conclu un traité distinct en 2010 leur permettant de développer des projets sur le fleuve sans avoir à solliciter l'accord du Caire.