L'ancien chef du gouvernement italien Silvio Berlusconi attend lundi le verdict du tribunal de Milan dans le procès Rubygate, où il est accusé d'abus de pouvoir et prostitution de mineure, une décision qui pourrait peser sur la stabilité politique de la péninsule. Après plus de deux ans de procès, l'audience consacrée à la décision sur le verdict a débuté peu après 7H30 GMT notamment avec le dépôt par la défense du Cavaliere d'un ultime "mémo" contenant ses arguments. Très vite, les trois magistrates qui décideront du sort du magnat se sont enfermées en "chambre du conseil" pour délibérer. Le Corriere della Sera, le premier quotidien du pays, s'est fait l'écho d'un grand pessimisme dans le camp Berlusconi, son entourage le décrivant comme d'"humeur noire, prêt au pire". En cas de condamnation "à moitié", à une peine pas trop haute, le climat pourrait se rasséréner mais en cas de "condamnation totale et dure, personne ne se sent en mesure de parier sur la réaction du Cavaliere", selon le Corriere. Plusieurs médias dont le journal La Stampa ont souligné que Silvio Berlusconi percevait son soutien au gouvernement de coalition comme une protection contre les poursuites judiciaires, mais en l'absence de cette protection "son intérêt à soutenir le gouvernement disparaîtrait". Cette thèse a été démentie par son entourage mais le ton est monté ces derniers jours à droite dans les critiques adressées au gouvernement à l'approche du verdict du Rubygate, même si les reproches formulés sont essentiellement de nature économique et sociale (exigence d'un report d'une hausse de la TVA, pressions pour supprimer définitivement une taxe foncière). Nitto Palma, président de la Commission justice du Sénat et membre du parti du Cavaliere, a ainsi affirmé lundi que "le gouvernement ne court aucun risque lié aux affaires judiciaires de Berlusconi (...) mais il court un risque s'il ne fait pas ce qu'il a promis de faire sur les thèmes économiques". Entamé en avril 2011, le procès tourne autour des dîners à l'ambiance débridée, décrites comme des "orgies" par le parquet de Milan, organisées au printemps 2010 dans la luxueuse villa de Silvio Berlusconi à Arcore, près de Milan: les fameuses soirées "bunga-bunga", auxquelles a participé, entre autres, la jeune Marocaine Karima El Mahroug, alias "Ruby la voleuse de coeurs", qui avait 17 ans à l'époque. Agé de 76 ans, le Cavaliere est poursuivi pour abus de pouvoir et prostitution de mineure. La procureure Ilda Boccassini a demandé une "peine de base de cinq ans de prison" pour le premier chef d'accusation -M. Berlusconi, alors Premier ministre, aurait utilisé sa position pour faire libérer la jeune Ruby interpellée à Milan pour un larcin-, "aggravée d'un an" pour avoir rémunéré les prestations sexuelles de cette mineure, un délit en Italie. Mme Boccassini a assorti son réquisitoire d'une sévère requête d'"interdiction à vie d'exercer toute fonction publique" à l'encontre de l'ex-président du Conseil, sénateur depuis les élections de février. Deux femmes sont venues d'ailleurs manifester devant le tribunal portant plusieurs pancartes dont une disait "Merci à la magistrate Ilda Bocassini". Pour sa part, la défense du Cavaliere a demandé son acquittement pur et simple. "Silvio Berlusconi doit être acquitté car il n'a commis aucun délit", a affirmé lors d'une des dernières audiences son avocat Niccolo Ghedini, dénonçant des "préjugés" des juges et du parquet à l'encontre de son célèbre client. La thèse de Silvio Berlusconi est que des "magistrats rouges" (communistes, ndlr) tentent, en le poursuivant sur le plan judiciaire, de se substituer aux partis politiques de gauche qui n'ont pas réussi à le battre sur le plan politique. Le verdict arrivera quelques jours à peine après le rejet par la Cour constitutionnelle d'un recours très important pour Silvio Berlusconi, qui cherchait à obtenir l'annulation d'une condamnation pour fraude fiscale (procès Mediaset) risquant de le priver de tout mandat électoral. Depuis son entrée en politique en 1994, le Cavaliere a été condamné à un total de 11 ans et cinq mois de prison ferme, dont trois ans couverts par une amnistie, pour divers délits, mais aucun de ces jugements n'a jusqu'à présent été définitif.