Des centaines de manifestants se sont rassemblés hier près de Tunis, pour dénoncer un projet de loi dit d'«immunisation de la révolution». Cette loi est destinée à exclure des prochaines élections les anciens cadres. «Non à l'exclusion, non à la punition collective», «Non à la dictature», «Nous voulons un Etat civil et démocratique contre l'esprit rétrograde», ont scandé les manifestants, rassemblés devant le siège de l'Assemblée nationale constituante (ANC) à l'appel de l'opposition. Les protestataires ont aussi manifesté leur colère contre le parti islamiste Ennahda au pouvoir, qu'ils accusent de vouloir instaurer une nouvelle dictature. «Du pain et de l'eau mais pas Ennahda», ou encore «Pauvre peuple, tu as été manipulé au nom de l'Islam», ont lancé les manifestants encerclés par un important dispositif sécuritaire. Ennahda et ses alliés au pouvoir, Ettakatol et le Congrès pour la République, sont les promoteurs de ce projet de loi controversé. Selon eux, il immunisera la révolution contre un éventuel retour des piliers de l'ancien régime et membres de l'ancien parti au pouvoir, le Rassemblement constitutionnel démocratique (RCD). Pour l'opposition, cette loi vise à l'écarter de la scène politique. «Personne n'a le droit de priver un citoyen de ses droits civiques, la Tunisie est pour tous les Tunisiens !», s'est indigné Taïeb Baccouche, secrétaire général du principal parti de l'opposition, Nidaa Tounès. «Priver un Tunisien d'exercer ses droits politiques revient à lui enlever la nationalité. C'est le but du projet de loi sur l'immunisation de la révolution», avait déjà estimé le chef de ce parti, Béji Caïd Essebsi, bête noire d'Ennahda. Selon lui, «60 000 Tunisiens pourraient bien être exclus sous prétexte qu'ils traitaient avec le gouvernement déchu de Ben Ali ou qu'ils travaillaient sous ses ordres». Ce projet de loi qui agite la scène politique a été soumis aux élus de l'ANC le 27 juin.