Dix mille personnes ont défilé samedi en direction de la place Taksim, dans le centre d'Istanbul, en scandant des slogans hostiles au gouvernement turc après la mort d'un manifestant kurde tué la veille par les forces de l'ordre dans le sud-est du pays. Le rassemblement entrait dans le cadre du mouvement de contestation entamé fin mai, mais s'est mué en élan de solidarité avec la minorité kurde après ce décès. "Policiers assassins, hors du Kurdistan!", ont crié certains manifestants. "L'Etat meurtrier paiera!", lançaient d'autres militants. Le jeune Kurde de 18 ans tué vendredi à Kayacik, dans la province de Diyarbakir, protestait contre la construction d'une gendarmerie. Dix autres manifestants ont été blessés par les forces de l'ordre. Ces troubles sont les plus violents depuis l'appel au cessez-le-feu lancé en mars par Abdullah Öcalan, chef historique du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) détenu depuis 1999, qui a entamé un processus de paix avec le gouvernement de Recep Tayyip Erdogan. A Istanbul, les forces de l'ordre ont empêché les manifestants d'accéder à la place Taksim, épicentre de la contestation depuis bientôt un mois. Après in sit-in dans les rues avoisinantes, la plupart ont quitté les lieux, mais un millier de personnes y sont restées. "ATTENTION, ERDOGAN" Les policiers les ont dispersées en les poussant à l'aide de leur bouclier. Ils étaient appuyés par un canon à eau qui n'a pas été utilisé. Plusieurs centaines de personnes ont également manifesté à Diyarbakir, dans le sud-est de la Turquie, lors des obsèques de la victime. "Attention, Erdogan, ne nous pousse pas dans les montagnes!", ont-elles lancé. Dans le cadre du processus de paix, les combattants du PKK ont commencé à quitter la Turquie pour rejoindre leurs camarades retranchés dans le nord de l'Irak. Le ministère de l'Intérieur a annoncé l'ouverture d'une enquête sur le décès, précisant que 250 personnes avaient attaqué le chantier et que les forces de l'ordre avaient procédé à des tirs de sommation pour disperser la foule. Le Parti pro-kurde pour la paix et la démocratie (BDP) a appelé à des manifestations ce week-end dans plusieurs villes de Turquie, notamment Diyarbakir, Mersin et Adana. Il entend lancer un "été de mobilisation" et faire pression sur le gouvernement afin qu'il lance les réformes prévues par l'accord de paix conclu avec le PKK.