Hier s'est terminé à Azzaba, le périple présidentiel, qui a été entamé au début de la semaine avec des visites à Jijel, Milia, Mila et Skikda Ce périple, qui intervient dans un contexte assez particulier, aura été au moins clair sur les priorités du Président de la République et l'état d'esprit avec lequel il les aborde. Tout d'abord, il faut noter le ton net, tranchant, péremptoire avec lequel il réaffirme sa volonté d'aller immédiatement vers une réconciliation nationale. Affichant une indépendance totale vis-à-vis de l'option «guerre aux islamistes» décidée par l'administration Bush, il prêche pour un «dialogue global et sans exclusive». Tous les acteurs politiques sont conviés à ce dialogue et chaque chef d'Etat connaît les propres spécificités de son pays pour agir en conséquence. Même ceux qui sont encore au maquis peuvent encore souscrire à cette option bouteflikienne. Son «nous avons tendu nos bras à ceux qui nous avaient tendu la main» est assez explicite pour relancer le débat sur une trêve éventuelle avec tous ceux qui affichent la volonté de déposer les armes et d'intégrer les lois de la République. Mais là, attention: dialogue et trêve ne sont pas une réhabilitation de la mouvance islamiste radicale dissoute, en l'occurrence le FIS. La différence est de taille et il n'y a plus, dit le Président, «à y revenir». L'invitation lancée à l'endroit de la coordination des archs mérite aussi le détour. Que s'est-il passé après cinq mois? Le Président a-t-il vu, dans le pourrissement de la situation et l'imbroglio né autour de la région kabyle, une tentative de le saborder? Tout est du domaine du possible lorsqu'on constate que face à l'offre de dialogue émise par la présidence, un rejet catégorique, émanant des maximalistes, a immédiatement suivi Autre message, et non des moindres, la guerre à la corruption qui gangrène l'Etat dans ses fondements. L'utilisation des scanners dans les différents ports du pays, la halte à la corruption et aux passe-droits etc., ont été autant de messages lancés à «ceux qui usent encore de privilèges anticonstitutionnels». Jusqu'où le Président de la République pourra-t-il aller dans ce chapitre? Seul l'avenir le dira, car c'est le sentier le plus périlleux qu'il pourra emprunter dans l'état actuel des choses, et à moins qu'il ne soit destiné à la consommation rapide, ce discours va mettre la nébuleuse mafieuse sur le qui-vive. L'autre message à saisir au vol est le fait même d'entamer un voyage politique dans un contexte, aussi bien intérieur qu'extérieur, en pleine ébul- lition. Le Président de la République reprend son bâton de pèlerin et renoue avec les bains de foule, en réponse à une tentative de l'isoler du peuple. Car il reste dans les moeurs politiques du pays d'isoler un président dans un premier temps, de le discréditer face à l'opinion ensuite, puis de le destituer enfin sans que personne trouve à redire. Cela s'est répété par le passé, à l'excès. Le voyage du Président dans l'est du pays aura permis de constater le ton ferme, la démarche indépendante et la reprise des choses en main. Ces quatre messages lancés vers les uns et les autres ont aussi apporté le discrédit aux propos de certains de ses proches collaborateurs. Pour le Président, les choses doivent être claires et les choix précis. Mais jusqu'à quel point la «nébuleuse» qui gravite autour de lui, souscrira-t-elle à ses options?